Charles Dufresny

 

Les Mal-Assortis

 

a cura di Stéphane Miglierina

 

 

 

Biblioteca Pregoldoniana

 

 

lineadacqua edizioni

 

2016

 

 

 

Charles Dufresny

Les Mal-Assortis

a cura di Stéphane Miglierina

 

 

Ó 2016 Stéphane Miglierina

Ó 2016 lineadacqua edizioni

 

Biblioteca Pregoldoniana, nº 14

Collana diretta da Javier Gutiérrez Carou

www.usc.es/goldoni

javier.gutierrez.carou@usc.es

Venezia - Santiago de Compostela

 

lineadacqua edizioni

san marco 3717/d

30124 Venezia

www.lineadacqua.com

 

ISBN dell’edizione completa: 978-88-95598-49-9

 

 

La presente edizione è risultato dalle attività svolte nell’ambito del progetto di ricerca Archivo del teatro pregoldoniano II: base de datos y biblioteca pregoldoniana (ARPREGO II: FFI2014-53872-P), finanziato dal Ministerio de Economía y Competitividad spagnolo. Lettura, stampa e citazione (indicando nome del curatore, titolo e sito web) con finalità scientifiche sono permesse gratuitamente. È vietata qualsiasi utilizzo o riproduzione del testo a scopo commerciale (o con qualsiasi altra finalità differente dalla ricerca e dalla diffusione culturale) senza l’esplicita autorizzazione del curatore e del direttore della collana.

 

 

 

Biblioteca Pregoldoniana, nº 14

 

 

 

Nota al testo

Seguiamo l’edizione del 1693 il cui frontespizio recita:

LES MAL-ASSORTIS. | COMEDIE EN DEUX ACTES. | Mise au Théâtre par monsieur du F***, | & representée pour la premiere fois par | les comédiens Italiens du Roi, dans leur | hôtel de Bourgogne, le trentième de May | 1693.

            Segnaliamo la presenza di un’incisione su rame di 134x70 mm.[1] prima del testo (vol. IV, tra p. 350 e p. 351) disponibile sul sito Gallica (http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8438360p), 1693 (disegnatore: D. B.; incisore: Etienne Jahandier Desrochers).

Les Mal-Assortis non compaiono nelle edizioni precedenti.

 

 

 

Les Mal-Assortis

 

Comédie en deux actes

 

Mise au théâtre par monsieur du F** [Dufresny], et représentée pour la première fois par les Comédiens Italiens du Roi, dans leur hôtel de Bourgogne, le trentième de mai 1693.

 

 

 

Acteurs

 

arlequin, gouverneur d’une île en Espagne.

colombine, duègne, gouvernante de plusieurs filles.

isabelle, marinette, pasquariel, mezzetin, filles sous le gouvernement de Colombine.

pierrot, eunuque, gardien de ces filles.

octave [léandre], amant d’Isabelle.

le dieu d’hymen, un chanteur.

un cabaretier et sa femme.

un procureur et sa femme.

un jardinier et sa femme.

un jeune homme et sa femme fort vieille.

Plusieurs autres acteurs.

 

La scène est dans une île en Espagne.

 

 

 

                  Les Mal-Assortis

 

 

                                   Acte I

 

                                   Scène I

 

                                    Le théâtre représente une île en Espagne.

 

                                   Arlequin, gouverneur de l’île, Colombine.

 

            arlequin       La sotte coutume, madame, la sotte coutume! Quoi, quand un gouverneur prend possession de cette île, il est obligé de se marier? Ma foi, c’est acheter trop cher un gouvernement.

 

            colombin      Je vous dis que vous ne serez point reçu, que vous n’ayez choisi une femme.

 

            Arlequin       Mais, comment voulez-vous que je choisisse? Je n’en connais encore aucune. Est-ce que vous avez ici, comme à Paris, de ces rues marchandes, où l’on trouve des filles en magasin?

 

            colombine    Non, mais la loi ordonne que vous choisissiez entre les filles du dernier gouverneur, quand il y en a. Par bonheur, le gouverneur défunt en a laissé douze, dont je suis l’aînée et la gouvernante. Enfin, ma maison est une pépinière, où vous en trouverez de toutes les espèces.

 

5          arlequin       Et dans votre pépinière, les filles sont-elles toutes greffées?[2]

 

            colombine    J’ai, entre autre, une jeune plante nommée Isabelle, où j’ai pris soin de greffer la sagesse la plus à l’épreuve.

 

            arlequin       Hon, tous les arbres qu’on greffe ne reprennent pas, et la sagesse d’une fille est semblable à ces petites branches mal nourries qu’on veut enter sur un arbre trop fort, le plus souvent la sève les étouffe. Mais, dites-moi un peu ce qui a donné lieu à la coutume dont il s’agit, et quel intérêt vous avez que les gouverneurs se marient?[3]

 

            colombine    En voici la raison. C’est que le plus beau des privilèges de nos habitants est fondé sur ce mariage; c’est en sa faveur qu’ils jouissent du droit des Mal-Assortis.

 

            arlequin       Qu’est-ce que ce droit des Mal-Assortis?

 

10        colombine    C’est que tous les époux mal assortis, c’est-à-dire qui ne sont pas contents l’un de l’autre, auront permission aujourd’hui de se plaindre à vous, et vous aurez le pouvoir de les faire troquer de femmes et de maris, si vous le jugez à propos.

 

            arlequin       Oh, je jugerai toujours à propos de démarier les mal-assortis; car j’en sais les conséquences. Mais deux choses m’embarrassent en ceci. La première, pourquoi en faveur d’un si beau droit votre île n’est pas plus peuplée?

 

            colombine    C’est qu’on n’y reçoit point de Français, et surtout de Parisiens, qui déserteraient leur ville pour venir jouir d’un nouveau privilège.

 

            arlequin       La seconde difficulté que je trouve, c’est que tout le temps de mon gouvernement ne suffira pas, si je suis obligé d’écouter tous ceux qui sont mal mariés.

 

            colombine    Oh, c’est ce qui vous trompe, car nos peuples sont de si bon sens, que tel qui a une femme jalouse, laide, capricieuse et coquette, ne veut point changer, de peur de trouver pis, et vous n’aurez peut-être aujourd’hui que cinq ou six mal-assortis à juger.

 

15        arlequin       Mais, à propos, je viens de m’aviser, que sans aller choisir dans votre pépinière, je me contenterais…

 

            colombine    Oh, j’ai fait vœu de ne point me marier.

 

            arlequin       La témérité de ce vœux-là est écrite dans vos yeux.

 

            colombine    Je serais bien folle de me marier, puisque j’ai déjà, par devers moi, le plus grand avantage qu’attire après lui le mariage le plus heureux.

 

            arlequin       Que voulez-vous dire par là? Avez-vous de beaux enfants, bien conditionnés? C’est un grand avantage.

 

20        colombine    Vous n’y êtes pas.

 

            arlequin       Est-ce un gros douaire?[4]

 

            Colombine    Non.

 

            Arlequin       Ouais! Quel est donc ce grand avantage que le mariage le plus heureux attire après lui?[5]

 

            colombine    C’est le veuvage.

 

25        arlequin       Ma foi, vous avez raison. Comment est-ce que je ne l’ai pas deviné!

 

 

                                   Scène II

 

                                   Arlequin, Colombine, Pierrot eunuque.

 

            arlequin       Qui est cet homme-là?

 

            colombine    C’est le sous-gouverneur de mes sœurs.

 

            arlequin       Comment donc? Un homme pour sous-gouverneur de vos sœurs?

 

            colombine    Oh, Monsieur, ne vous scandalisez point, il a toutes les qualités requises pour…

 

5          arlequin       Oh, je vois bien à sa physionomie, que s’il est capable de gouverner des filles, ce n’est pas tant par les bonnes qualités qu’il a, que par celles qui lui manquent.

 

            pierrot          Madame… Monsieur, dis-je… non, non. Madame: ô, Monsieur… ô, Madame! A qui est-ce de vous deux que j’ai quelque chose à dire?

 

            arlequin       Ma foi, je n’en sais rien.

 

            pierrot          N’importe, c’est pour un secret que mesdemoiselles vos sœurs m’envoient vous dire tout bas à l’oreille à quelqu’un de vous deux. C’est que Monsieur le Gouverneur n’aille pas les voir que dans une petite demi-heure, parce qu’elles ne sont pas encore prêtes. L’une attend ses cheveux qui sont chez la coiffeuse; l’autre, deux ou trois dents qu’on achève de limer; celle-ci, sa couturière, qui lui fait une gorge de satin; l’autre répète sa leçon devant un miroir. Tant y a qu’il leur faut encore quelque temps pour achever tous leurs exercices.

 

            colombine    (à Arlequin) Monsieur, il faut donner du temps aux filles de s’ajuster.

 

10        arlequin       Je ne trouve pas cela étrange. Il n’est pas encore tout à fait nuit: et cinq heures du soir, c’est la plus belle heure de la toilette.[6]

 

            colombine    Monsieur, allons dans mon appartement, je vais achever de vous instruire sur les cérémonies des Mal-Assortis.

 

            pierrot          Et moi, je vais aider à ces pauvres filles à s’attifer; car elles n’ont point d’autre femme de chambre que moi.[7]

 

 

                                   Scène III

 

                                   Pierrot, Isabelle.

 

            pierrot          Ah, je suis bien aise que vous soyez plus diligente que vos sœurs! On ne saurait les tirer de leur toilette, et je crois que de deux heures d’ici, elles ne seront caparaçonnées.[8]

 

            isabelle         Hélas, mon soin est bien différent de celui de mes sœurs! Elles ont passé toute la nuit à s’ajuster, et moi à pleurer. Elles cherchent dans leur toilette des charmes qu’elles n’ont point, et je voudrais pouvoir cacher ceux que le ciel m’a donnés.

 

            pierrot          Oh, les filles n’aiment guère à se cacher; et si elles étaient toutes faites comme vous, elles amèneraient bientôt la mode de s’habiller l’été avec du réseau.[9]

 

            isabelle         Mon pauvre eunuque, je tremble de peur que le gouverneur me trouve aimable. Tu sais ma passion pour Léandre, et que la princesse a rompu notre mariage, dans l’espérance que le gouverneur me choisirait. Que je suis malheureuse, d’être plus jolie que mes sœurs! Ne sais-tu point quelque secret pour me faire paraître laide?

 

5          pierrot          Je n’en ai point encore vu dans les affiches: mais je m’imagine que si on pouvait composer quelque pommade douce avec de la poudre à canon, s’en couvrir le visage, et y mettre le feu… mais je ne l’ai pas encore éprouvé.[10]

 

            isabelle         Oh, je voudrais bien être laide pour déplaire au gouverneur: mais je serais bien aise de redevenir belle, pour plaire à Léandre.

 

            pierrot          Oh, cela ne se peut pas. La fleur de la beauté, c’est comme la fleur de la sagesse. Quand elle est une fois fanée, il n’y a plus rien à refaire.

 

            isabelle         Je n’ai donc plus qu’une ressource, et j’espère que ma vertu me guérira de l’amour que j’ai pour Léandre.

 

            pierrot          Bon, bon, la vertu! La vertu est justement tout comme les médecins, qui ne guérissent que des maladies qu’on n’a point.

 

10        isabelle         Oh, mon pauvre ami, s’il faut absolument que j’épouse le gouverneur, je ne verrai plus Léandre.

 

            pierrot          Quoi, ce Léandre, si beau, si bien fait, qui se démène comme un coq, et se campe comme un cheval de manège, vous ne le verrez jamais? À d’autres.[11]

 

            isabelle         Non, mais je m’enfermerai quelquefois dans ma chambre, et je l’aimerai toute seule sans qu’il y soit.[12]

 

            pierrot          Et cette vertu, morbleu, cette vertu?

 

            isabelle         Est-ce qu’il ne sera pas permis de prendre plaisir à penser à lui, malgré moi?[13]

 

15        pierrot          Prendre plaisir malgré vous! Oh, il n’y a point de concordance à cette phrase-là: prendre plaisir malgré vous! Cicéron appelle cela La chèvre et les choux.[14]

 

            isabelle         Je ferai donc tous les efforts pour oublier Léandre. Quand il me viendra dans l’esprit, je secouerai la tête, je me rongerai les ongles, je me promènerai à grands pas, je fermerai yeux et oreilles.

 

            pierrot          Oh, l’Amour est un voleur de nuit, qui trouve toujours quelque porte ouverte.

 

            isabelle         Hé bien, quand je serai lasse de combattre, je m’endormirai, afin de l’oublier tout à fait.

 

            pierrot          C’est là où l’amour vous guette. Il vous fera voir Léandre plus beau qu’il n’est, vous oublierez que vous dormez, et puis après, que sais-je, moi? Les songes sont bien malins.

 

20        isabelle         Mais, je ne serai point coupable, car ce ne sera qu’un songe. (on entend plusieurs voix de filles qui appellent Pierrot)

 

            pierrot          Voilà vos sœurs qui m’appellent, je m’en vais vitement plier leur toilette, afin que le gouverneur qui va venir ne voie pas tout cet attelage-là.

 

            isabelle         (seule) Ciel! Fais que le gouverneur me haïsse, autant que Léandre m’aime.

 

 

                                   Scène IV

 

                                   On voit toutes les filles de la duègne, qui se disposent à recevoir le gouverneur. L’une est à sa toilette, l’autre se fait lasser un corps; celle-ci fait des révérences devant un miroir, cette autre répète une danse, etc.[15]

 

            une des filles (pendant qu’on la lasse) Ah! Ah! Je n’en puis plus.

 

            pierrot          Voulez-vous que je la délasse?

 

            la fille          Non, non, serrez tant que vous pourrez…. Hai! Je crève… ma taille m’est plus chère que ma santé… serrez fort… je crève.

 

            pierrot          Est-ce assez?

 

5          la fille          Non, serrez. Ah! Ah!

 

            une autre

            fille               Pierrot, Pierrot. Ma couturière n’a-t-elle point apporté ma gorge?

 

            pierrot          Votre gorge? Est-ce qu’elle n’est pas sous votre peignoir?

 

            la fille          C’est cette gorge à ressort que je lui ai donnée, pour faire couvrir de satin.

 

            pierrot          Je ne connais point tout ces brimborions des filles, mais j’ai vu ici deux vessies de cochon: est-ce cela?[16]

 

10        la fille          Voilà ce que c’est. Aide-moi à les mettre. Cache-moi donc. Si mes sœurs me voyaient, elles en voudraient avoir de même.

 

                                   Toutes les filles appellent Pierrot. L’une lui demande une aiguillière, l’autre le pot à la pommade, une autre sa robe de chambre, une autre le miroir, une autre du rouge. Pierrot qui veut les servir toutes, s’embarrasse, tombe en courant d’un côté et d’un autre, et s’en va tout en colère.[17]

 

 

                                   Scène V

 

                                   Arlequin, les filles.

 

            arlequin       (à part) Je suis venu par l’escalier dérobé, afin de surprendre ces filles dans leur naturel, avant qu’elles aient le temps de se falsifier: car sitôt qu’une femme a le loisir de se préparer à recevoir visite, ma foi, les plus connaisseurs ne sauraient juger ni de son teint, ni de sa taille. J’ai toujours oui dire, que pour bien juger d’un tableau, il faut le voir sans bordure, et un cheval tout nu par le licol.[18]

 

            une des filles (à Arlequin) Ah, quelle trahison, Monsieur le gouverneur, quelle trahison!

 

            arlequin       Pardonnez ma curiosité.

 

            la fille          Est-ce qu’on surprend ainsi une fille, avant qu’elle ait le temps de… (elle fait voir son sein)

 

5          arlequin       Quelles mamelles! Où sont donc les petits marcassins? (à part) Ma foi, je ne suis plus curieux.

 

            la fille          C’est bien aise à dire, quand on a vu mille choses. En vérité, Monsieur, c’est un crime contre la bienséance.

 

            arlequin       Ce crime-là porte sa pénitence.

 

            la fille          Ce n’est pas par ces badineries-là qu’on prétend plaire; on a mille autres qualités.

 

            arlequin       On peut juger des autres par celles-là. Je vous laisse en liberté.

 

10        la fille          Vraiment, il est bien temps quand on a fait la faute.

 

            arlequin       Si j’ai fait la faute, je ne la boirai pas.[19]

 

            la fille          Il y a mille femmes scrupuleuses qui prendraient mal les choses: mais pour moi qui ai l’intention bonne…

 

            arlequin       Allez, allez, achevez de vous habiller.

 

            la fille          Puisque vous l’ordonnez, je serai à vous dans un moment.

 

15        arlequin       Si toute la famille lui ressemble, le choix m’embarrassera.

 

            une autre

            fille (tenant un tambour basque):

            Marinette    De la joie, de la joie, Monsieur le Gouverneur. (elle chante cet air italien)

                                   No, no, non, che non prendo marito

                                   Amo troppo la mia libertà.

                                   Del disciolto e allegro mio core

                                   Mai signor nissun non sarà;

                                   Voglio rider, cantar, e ballare,

                                   No, no, no, non mi vo’ maritare.

 

            arlequin       L’humeur de celle-ci me plairait assez, mais il y a quelque chose à refaire à cette taille-là.

 

            la fille          C’est que vous ne vous connaissez pas en tailles fines. Une fille sans embonpoint c’est une chambre sans meubles.

 

            arlequin       Oh, vive les tailles fines! Je me défie ces filles qui se piquent d’embonpoint, et qui sont toujours en déshabillé.

 

20        la fille          Croyez-moi, Monsieur le Gouverneur, vous seriez heureux avec une femme comme moi, qui ne sais ce que c’est que d’engendrer la mélancolie.

 

            arlequin       Non, mais vous savez ce que c’est que d’engendrer la joie. Franchement, je n’ai point envie de vous prendre.

 

            la fille          Ma foi, vous faites bien, car quand vous le voudriez, je ne le voudrais pas. (elle répète l’air italien, No, no, non…etc, et s’en va)

 

            une autre

            fille (avec une cornette qui lui cache le visage):

            Pasquariel    Il aime les tailles fines, il va me choisir. (elle se promène devant le gouverneur)

 

            arlequin       (à part) Cette taille-là me plaît assez, elle n’est point raboteuse. (haut) Madame, pourrait-on vous voir au visage?[20]

 

25        la fille          Ah! Je suis horrible aujourd’hui, je n’ai point dormi toute la nuit.

 

            arlequin       (à part) Apparemment qu’elle est jolie, car elle minaude. (haut) Hé je vous prie, Madame…

 

            la fille          Le soleil fait mille fausses lueurs.

 

            arlequin       Une vraie beauté est à l’épreuve du soleil.

 

            la fille          Je vous dis que je ne suis pas en jour.

 

30        arlequin       Hé bien, mettez-moi dans le point de vue.

 

            la fille          Fermez donc les rideaux. (elle se découvre et fait une grimace qui épouvante Arlequin, et le fait tomber sur un siège comme évanoui)

 

            la fille          Ma beauté l’a surpris, il faut lui donner le temps de se reconnaître. (elle s’en va)

 

 

                                   Scène VI

 

                                   Colombine, Arlequin, Isabelle qui survient.

 

            colombine    Hé bien, monsieur, parmi ces charmantes sœurs, en avez-vous trouvé quelqu’une qui vous convienne? Votre cœur s’est-il déterminé?

 

            arlequin       Non, mais il s’est soulevé. Ah! (il se laisse aller sur son siège)

 

            colombine    Vous trouvez-vous mal?

 

            arlequin       Franchement, Madame, j’aime mieux renoncer au gouvernement, que de me marier; votre famille est trop laide.

 

5          colombine    (à part) Où est donc Isabelle? Apparemment qu’il ne l’a pas encore vue. (apercevant Isabelle) Pourquoi donc vous cacher ainsi?

 

            isabelle         Ah, ciel!

 

            colombine    (à part) Celle-ci lui fera revenir le cœur. (à Arlequin) Monsieur le Gouverneur, tournez-vous; en voici une qui vous plaira sans doute.

 

            arlequin       (se tournant, et voyant Isabelle) Ah! Voici de l’eau de la reine de Hongrie. (à Colombine) Madame, je l’épouse, et me tiens trop heureux de l’avoir.[21]

 

            isabelle         (à Colombine) Mais, ma sœur, pourquoi contraindre monsieur à me choisir entre des sœurs qui sont plus aimables que moi?

 

10        colombine    Je lui ai donné le temps d’examiner leur mérite.

 

            arlequin       Leur mérite, ma foi, n’a pas besoin d’examen, il saute aux yeux d’abord. Madame, je m’en tiens à celle-ci, et je la choisis pour femme.

 

            isabelle         Ah, grands dieux, quel malheur!

 

            colombine    (à Isabelle) Allons, il faut obéir à la loi.

 

            isabelle         Ah, ma sœur! Faites-le changer de sentiment.

 

15        arlequin       Oh, ne craignez rien, je ne suis pas changeant.

 

            isabelle         Que je suis malheureuse!

 

            arlequin       Que dit-elle?

 

            colombine    Qu’elle est heureuse…

 

            isabelle         Oui, j’en mourrai.

 

20        arlequin       Comment? Elle en mourra?

 

            colombine    Oui, monsieur, de joie.

 

            arlequin       Oh, il faut que les femmes modèrent leur joie. Hippocrate dit que summum gaudium muliere dilatando occidit.[22]

 

            colombine    Je la laisse avec vous, et je vais donner mes ordres pour la cérémonie des Mal-Assortis.

 

            isabelle         (à part) Il me vient une pensée pour le dégoûter de moi; je vais lui faire accroire…

 

25        arlequin       Hé bien, charmante pouponne, je vais vous rendre heureuse.

 

            isabelle         Monsieur, puisque vous voulez me rendre heureuse, je ne puis sans ingratitude vous rendre malheureux, et je me crois obligée de vous avertir que j’ai mille défauts, que vous ne pourrez jamais supporter.

 

            arlequin       Oh, je me suis déjà aperçu de ces défauts-là. Vos yeux sont un peu trop vifs, votre bouche trop vermeille, votre taille trop fine. Mais quand on aime, on passe par-dessus ces petits défauts-là.

 

            isabelle         Si vous connaissiez mon humeur! Je suis bizarre, capricieuse…

 

            arlequin       Cela me vient le mieux du monde, car mon médecin m’a ordonné, à cause de ma bile, de donner tous les matins à jeun trois ou quatre soufflets à quelqu’un; et cette recette nous guérira tous deux, moi de ma bile, et vous de vos caprices.

 

30        isabelle         (à part) Quel brutal! Ô ciel! (haut) Monsieur, j’ai une autre maladie bien plus dangereuse. Toutes les nuits, je suis sujette à des rêves furieux, qui allument la rage dans mon âme; j’égratigne, le mords, j’assassine, et j’étouffais l’autre jour dans mes bras…

 

            arlequin       Un amant?

 

            isabelle         Un petit bichon que ma sœur m’avait donné.[23]

 

            arlequin       Il faudra se précautionner, et je coucherai avec une armure à toute épreuve.

 

            isabelle         Il n’y a point d’armure à l’épreuve de la rage d’une femme (bas) qui hait son mari. (haut) A propos, Monsieur, j’oubliais à vous dire… mais je n’ose.

 

35        arlequin       Dites, dites, je suis tout disposé à vous entendre.

 

            isabelle         C’est que j’ai eu déjà deux accès de folie.

 

            arlequin       Quoi! Vous n’avez eu que deux accès de folie à votre âge? Hé, vous êtes la perle des filles.

 

            isabelle         Mais, Monsieur, pourquoi vous obstiner à prendre une malheureuse? Si vous connaissiez le mérite d’une sœur que j’ai. Il faut que je vous la fasse voir. Ma sœur Toinon…

 

                                    Ici plusieurs filles accourent, chacune d’elles disant: C’est moi, c’est que Monsieur le Gouverneur a choisi. Elles le prennent par les bras, et le tirent chacune de son côté, de telle force qu’il tombe, et elles aussi: ce qui finit le premier acte.

 

 

 

                                   Acte II et dernier

 

 

                                   Scène I

 

                                   Le théâtre représente la salle des Mal-assortis. On voit L’Hymen au milieu de quantité de maris et de femmes qui se tournent le dos, et qui rechignent l’une conte l’autre. L’Hymen est assis sous un arbre sec, tout plein d’oiseaux de mauvais augure, comme coucous, hiboux, chauve-souris, etc. La symphonie joue un air fort triste.

 

            arlequin       O Hymen, protecteur du chagrin domestique,

                                   Divinité climatérique,

                                   Qui fais aux deux époux, par ta rare équité,

                                   Prodiguer tes faveurs avec égalité:

                                   À l’un des maux de têtes, à l’autre des coliques.

                                   Patron des animaux froids et mélancoliques,

                                   Des chauves-souris, des hiboux,

                                   Des limaçons, et des coucous,

                                   Je ne viens point pour soustraire à ta main malfaisante

                                   Cette troupe dolente

                                   D’époux mal-assortis

                                   Puisqu’en brisant leurs nœuds je les assujettis

                                   À prendre d’autres chaînes.

                                   Il est vrai que souvent le changement des peines

                                   Cause quelque plaisir,

                                   Mais ne te fâches point, car selon ton désir,

                                   Tu les verras demain plus malheureux encore

                                   Qu’ils ne l’étaient hier. Ma bile s’évapore,

                                   O Hymen! mais pardonne-moi.

                                   Quelque mal qu’on dise de toi,

                                   Ou tôt ou tard dans tes fers on s’engage.

                                   Et moi tout le premier je viens te rendre hommage,

                                   Et dire à ta louange avec sincérité,

                                   Que tu ferais toujours notre félicité,

                                   Si dans les douceurs du ménage,

                                   Tu trouvais le secret de séparer l’usage,

                                   De la propriété.[24]

 

                                   La symphonie reprend le même air triste.

 

            l’hymen         (s’avance et chante) Je fais le malheur extrême

                                   De la plupart des humains.

                                   Mais leur bonheur suprême

                                   Est aussi dans mes mains.

                                   En ma droite je tiens l’heureuse destinée,

                                   Ma gauche livre le tourment.

                                   Celle-ci, par malheur, s’ouvre facilement,

                                   Et ma droite est toujours fermée.

 

 

                                   Scène II

 

                                   Les mal-assortis s’avancent, et se rangent en haie autour d’Arlequin.

 

                                   Un cabaretier, une cabaretière fort laide, Arlequin.

 

            un cabaretier Seigneur, puisqu’en faveur de votre mariage,

                                   On peut troquer de femme en dépit de l’usage…

 

            arlequin       Qui êtes-vous l’ami?

 

            le cabaretier  Je suis cabaretier

                                   De mon métier,

                                   Mais grâce à la laideur, j’ai bien peu de pratique.

                                   Autrefois les buveurs de clique,

                                   Les gourmets de profession,

                                   Et la bachique nation

                                   Des vieux doyens de confrérie,

                                   Vidaient mes muids jusqu’à la lie.

                                   Mais depuis que cette guenon

                                   A mis le pied dans ma maison,

                                   Chacun me chante injure,

                                   Et me prédit un très fâcheux hiver.

                                   Celui-ci dit, que ma femme est trop mure,

                                   Et celui-là, que mon vin est trop vert.[25]

 

            arlequin       On a raison. Quand on veut dans l’année

                                   Avoir des officiers la joyeuse assemblée,

                                   Il faut avoir chez soi, pour se rendre fameux,

                                   Jeune femme et vin vieux.

 

                                   Une coquette vient avec empressement, suivie d’un procureur qui est son mari.

 

5          la coquette Audience, Monsieur, audience, audience!

 

            arlequin       Patience, Madame, un peu de patience,

                                   Laissez parler Monsieur.

 

            la coquette                                                 Je vais m’évanouir

                                   Si vous ne m’écoutez. Je ne puis plus souffrir

                                   Cette chaîne

                                   Qui me gène,

                                   En m’arrêtant si près de mon époux.

 

            arlequin       C’est un grand supplice entre nous:

                                   Mais vous devez y être accoutumée.

 

            la coquette Depuis que je suis mariée,

                                   Je n’ai jamais été si longtemps qu’aujourd’hui

                                   Tête à tête avec lui.

                                   C’est un insupportable,

                                   Un jaloux incurable:

                                   Il est bourru, fourbe, avare, menteur.

 

10        arlequin       Ah, le joli portrait, n’est-il point procureur?

 

            le procureur  Fiscal, pour vous servir, et…

 

            arlequin       (au procureur) Laissez-moi l’entendre,

                                   Vous pourrez vous défendre

                                   Quand elle aura tout dit.

 

               le procureur  J’attendrai donc longtemps.

 

            la coquette Oui, oui, je parlerai, et l’on verra comment

                                   Je suis traitée.

                                   Parce qu’un contrat dit que je suis mariée,

                                   Il prétend me faire la loi,

                                   Et disposer de moi

                                   Comme un amant d’une maîtresse.

                                   Monsieur me parle de tendresse,

                                   Et veut prendre avec moi des familiarités.

 

15        arlequin       Oh, ce n’est plus la mode, et de ces libertés

                                   Les femmes du bel air ont retranché l’usage.

 

            la coquette Ce n’est pas tout, Monsieur. L’autre jour ce visage,

                                   Devant la femme d’un greffier,

                                   D’un notaire, et d’un financier,

                                   Au lieu de m’appeler Madame,

                                   Tout court, me fit l’affront de m’appeler sa femme.[26]

 

            arlequin       Il a grand tort, et je vois clairement

                                   Que vous vivez tous deux célibatiquement:

                                   Et vous nommer sa femme est une calomnie.[27]

 

            la coquette Hier au soir, je voulais en toute liberté,

                                   Régaler mes amis. Le souper apprêté,

                                   Toute la troupe en joie, on voit pour mon malheur

                                   Arriver ce benêt, comme un écornifleur,

                                   Un chercheur de franche lipée:

                                   Et sans être connu d’aucun de l’assemblée

                                   Se plante effrontément à la table avec nous.[28]

 

            Arlequin       Cette impudence est sans seconde:

                                   Et ces bourgeois époux

                                   Ne savent point leur monde.

                                   Un mari de qualité

                                   N’aurait jamais commis cette incivilité.

 

20        la coquette Cet avare vilain se plaint de ma parure.

                                   Cependant cette chamarrure

                                   Ne revient qu’à cinq cents écus.

                                   Et si c’est un argent que j’ai pris sur mon compte!

 

            arlequin       Fi! Votre époux doit mourir de honte,

                                   De vous voir un habit qui ne lui coute rien.

 

            la coquette Les marchands sont contents, je les paie du mien.

 

            arlequin       Quand la femme fournit à de telles dépenses,

                                   Ce n’est pas aux marchands qu’elle fait les avances.

 

            la coquette Si vous saviez…

 

25        arlequin       J’en sais plus qu’il n’en faut.

                                   (au procureur) Et vous maître nigaud,

                                   Qui semblez mépriser l’aiguillon qui vous pique,

                                   Ma foi, vous tenez plus du bœuf que du stoïque,

                                   Si vous ne répondez à ces piquants discours.[29]

 

            le procureur  Bon! je les entends tous les jours,

                                   Et je crois après tout ma femme raisonnable.

                                   Je l’aime trop pour la donner au diable:

                                   Faites-moi le plaisir de la prendre pour vous.

 

            arlequin       Je vais lui donner un époux,

                                   Qui du diable n’a pas tout à fait la figure,

                                   Mais qui dans peu de jours en aura la coiffure.

                                   C’est vous que je destine… (au cabaretier)

 

            la coquette À moi, Monsieur, à moi,

                                   Un mari de si bas aloi,

                                   A moi qui d’un sergent suis l’unique héritière!

 

            le cabaretier (à la coquette) Franchement, je ne connais guère

                                   Ni votre père, ni le mien,

                                   Mais je crois que je vous veux bien.

 

30        la coquette Vraiment, il serait beau me voir cabaretière,

                                   Et d’un empoisonneur l’épouse gargotière![30]

 

            arlequin       À vos mordants discours mettez un caveçon.

                                   Quoique son vin soit plein de colle de poisson,

                                   Il est moins frelaté qu’une franche coquette,

                                   Car, sans parler de sa toilette,

                                   Tous ses regards confits au vinaigre et au miel,

                                   Le désordre artificiel

                                   Des mouvements de son visage,

                                   Et ce tendre patelinage

                                   Qui remplit son discours d’une fade douceur:

                                   Tout cela, franchement, fait plus de mal au cœur

                                   Que le vin qu’il apprête

                                   Ne fait mal à la tête.[31]

 

            le cabaretier (à la coquette) Je sais quelque secret pour éclaircir le vin:

                                   Mais pour éclaircir votre teint,

                                   N’usez-vous point de fourberie?

 

            la coquette Mes roses et mes lys sont sans supercherie.

 

            le cabaretier Je crois que vous prenez vos roses et vos lys

                                   Chez le même épicier où je prends mes rubis.

                                   Ce teint n’est point clair-net.[32]

35        la coquette Si son effronterie…

 

            arlequin       Ou taisez-vous, ou je vous remarie

                                   Au procureur. C’est ainsi que je veux

                                   Que vous troquiez tous deux.

 

            le procureur  Monsieur…

 

            arlequin       Vous êtes trop heureux

                                   D’avoir une femme qui vous convienne.

 

            le procureur  Je l’aime encore mieux que la mienne

                                   Toute laide qu’elle est.

 

40        arlequin       (au procureur) Apprenez aujourd’hui,

                                   Qu’un procureur ne doit avoir chez lui

                                   Que pain moisi, vin détestable,

                                   Et femme laide comme un diable,

                                   Et le tout à cause des clercs.

                                   (au cabaretier) Vous, dont les berceaux sont déserts,

                                   Si vous voulez avoir chez vous bonne pratique,

                                   De ce joli bouchon parez votre pratique.[33]

 

            le cabaretier (chante) Si l’on troquait de femme et de mari

                                   Chez Dautel, et chez Fagnany,

                                   Je leur conseillerais de fermer leurs boutiques,

                                   Et de louer, pour loger leurs pratiques,

                                   Toute la plaine Saint-Denis.

 

            l’hymen         (chante) Ô l’heureux ménage,

                                   D’une coquette, et d’un cabaretier,

                                   Qui savent leur métier!

                                   Qu’ils vont mettre tous deux de talents en usage!

                                   L’un par son tripotage

                                   Sait rajeunir le vin;

                                   Et l’autre, avec le blanc et le carmin,

                                   Rajeunit le visage.

 

 

                                   Scène III

 

                                   Arlequin, un jeune homme qui se cure les dents, une vieille qui tient une bourse vide, un jardinier, et une jardinière qui est grosse.

 

            arlequin       Une vieille, dont la bourse est vide, et un jeune homme qui se cure les dents! Cette scène muette parle toute seule. (au jeune homme) Vous voulez vous démarier, parce que vous voyez le fond de la bourse? Vous avez raison. (à la vieille) Vous, vous vous plaignez apparemment qu’il ne vous a pas donné l’emploi de vos deniers? Vous avez tort. Une vieille qui achète la tendresse d’un jeune homme, doit s’attendre, que dès le lendemain du marché, il portera chez sa voisine l’argent et la marchandise. Voyons, si nous trouverons ici de quoi vous assortir.

 

            le jardinier  (à sa femme) Ah! Il y a longtemps que j’attends ce jour bienheureux.

 

            arlequin       De quelle vacation êtes-vous?

 

            le jardinier  Jardinier, pour vous servir.

 

5          arlequin       Je m’en suis douté, en voyant la rondeur de la jardinière: car la terre d’un jardinier est toujours plus fertile qu’une autre.

 

            le jardinier  Vous me faites plus honneur qu’il ne m’en est dû. Mais vous voyez ce jeune homme (il montre le mari de la vieille)

 

            arlequin       En est-ce à lui l’honneur?

 

            le jardinier  Je ne dis pas cela, mais je suis son jardinier, et il y a quelque temps qu’il vint me trouver, et qu’il me dit: maître Ambroise, en récompense de tes services, je te veux faire un présent… Ah, Monsieur… Oui, maître Ambroise, je te donne en mariage la fille de mon concierge… Oh! comme il n’avait pas accoutumé de me faire de si grands présents, je me doutais de sa ruse, et je dis en moi-même: je l’attraperai.

 

            arlequin       C’est-à-dire que vous ne voulûtes pas l’épouser.

 

10        le jardinier  Oh que si! Je l’épousai, pour mieux découvrir la vérité, mais sitôt que nous fumes mariés, je pris la poste, et je fis un voyage de six mois.

 

            arlequin       Je vous entends. C’est-à-dire que vous voulûtes voir, si malgré votre absence…

 

            le jardinier  Vous l’avez dit.

 

            la jardinière  Oh, l’absence ou la présence ne fait rien à la chose, et le mariage va toujours son train.

 

            le jardinier  Il n’y a que quinze jours que je suis de retour, et vous voyez.

 

15        arlequin       Cela ne vous doit point surprendre. Vous qui êtes jardinier, vous devez savoir que les fruits semés sur couche, viennent souvent avant la saison.

 

            le jardinier  Oh, cela n’est pas naturel.

 

            arlequin       Oh que si! Votre femme est peut-être une femme précoce.

 

            la jardinière   Monsieur, il dit qu’il n’y a que quinze jours qu’il est de retour, mais il faut qu’il y ait davantage, car le temps m’a bien duré.

 

            le jardinier  Oh, tu as beau dire, le juge sera de mon côté, car il est homme comme moi.

 

20        la jardinière   Il a intérêt de me justifier, car il a peut-être une femme comme moi.

 

            arlequin       Écoutez, la faute de votre femme est une faute d’ignorance, car si elle avait su calculer, comme vous, les jours et les mois, elle aurait si bien pris ses mesures, que vous ne vous seriez aperçu de rien, et il ne faut pas déshonorer une femme, parce qu’elle ne sait pas l’arithmétique.

 

            le jardinier  Si vous voulez que je garde ma femme, défendez donc à Monsieur de venir chez moi.

 

               la jardinière   Gardez-vous en bien, c’est un homme de qualité qui trouverait fort mauvais qu’on lui fit ce compliment-là.

 

            arlequin       Ce serait manquer de politesse que de vous opposer à l’honneur que Monsieur veut bien vous faire.

 

25        le jardinier  Oh, qu’il me laisse l’honneur que j’ai, et je le quitte de celui qu’il veut me faire.

 

            l’hymen         (s’avance et chante) Heureux qui par son labourage,

                                   Met à profit

                                   L’arbre fourchu du mariage!

                                   La femme a l’avantage

                                   D’être la branche à fruit.

                                   Mais un mari discret et sage

                                   Par son bois se met en crédit.

 

            arlequin       D’un arbre roturier dont la tige est jolie,

                                   On voit souvent sortir un noble rejeton:

                                   Et par hasard aussi sur la branche anoblie

                                   Un jardinier pourrait greffer un sauvageon.

                                    Ce troc-ci est bien aisé à faire. (au jeune homme) Monsieur, vous savez mieux que moi l’hypothèque que vous avez sur cette jeune femme. Je vous l’adjuge, tâchez de regagner avec elle, ce que vous avez dépensé à la vieille. (au jardinier) Et vous, mon ami, pour vous punir de la folie que vous avez faite, je vous ordonne d’épouser la bonne femme. C’est aux jardiniers qu’il faut donner les terres en friche, et une vieille ne doit point vous embarrasser. Vous trouverez le secret de la rajeunir, comme un vieux poirier, en lui coupant la tête: aussi bien une vieille sans argent, n’a plus que faire du monde.

 

 

                                   Scène IV

 

                                   Isabelle voilée, Arlequin.

 

            isabelle         Monsieur, en faveur de la fête,

                                   Je viens présenter ma requête.

 

            arlequin       C’est pour troquer d’époux que vous venez ici;

                                   Mais, Madame, pourquoi vous déguiser ainsi?

 

            Isabelle        Vraiment, Monsieur, si j’étais refusée,

                                   Et que mon mari sût…

 

            arlequin       La petite rusée:

                                   Que j’ai de curiosité

                                   De voir…

 

5          isabelle         Oh, n’usez point de votre autorité.

 

            arlequin       Découvrez-moi votre visage.

 

            isabelle         Ne me pressez pas davantage.

                                   Je ne puis apporter trop de précaution

                                   Pour ne point troubler l’union

                                   Qui règne dans notre ménage:

                                   Elle est charmante.

 

            arlequin       Oh, le plaisant langage!

                                   Ma foi, je crois que vous êtes unis

                                   Comme le loup et la brebis.

                                   Son discours sent un peu le déclin de la lune.

                                   Dites-moi vos raisons.

 

            Isabelle        Hélas! Je n’en ai qu’une.

                                   En aimant mon mari, six mois sont écoulés,

                                   Et je trouve que c’est assez.

 

10        arlequin       Hon! Ce n’est point cela qui vous rend malheureuse.

                                   Vous ne dites pas tout. Ne soyez point honteuse.

                                   Apprenez-moi le hic de cet aimable époux.

                                   Est-il brutal, est-il jaloux,

                                   A-t-il chez le voisin quelque second ménage?

 

            isabelle         Non, mais six mois de mariage.

 

            arlequin       D’accord, mais il me faut expliquer mieux le cas.

                                   Dites-moi tout bas.

                                   Vous a-t-il refusé quelque habit magnifique?

 

            isabelle         Six mois, Monsieur, six mois.

 

            arlequin       La chose est sans réplique,

                                   Cependant il faudrait savoir de votre époux,

                                   S’il est aussi las d’être à vous.

 

15        isabelle         Ah! Si vous l’écoutez, Monsieur, je suis perdue.

                                   Il consentira qu’on le tue,

                                   Plutôt que de rompre des nœuds

                                   Qui font son bonheur.

 

            arlequin       Il est bien malheureux

                                   D’aimer une ingrate.

                                   Madame, votre affaire est un peu délicate,

                                   J’y veux rêver.

 

 

                                   Scène V

 

                                   Léandre avec un manteau sur le nez, Arlequin.

 

            léandre        Monsieur.

 

            arlequin       Autre déguisement.

                                   Que voulez-vous de moi?

 

            léandre        Je viens secrètement

                                   Vous faire un franc aveu de ma bizarrerie.

                                   Mon épouse est jeune et jolie,

                                   Et je pourrais faire serment

                                   Qu’elle m’aime fidèlement.

                                   Cependant, puisqu’il faut avouer ma faiblesse

                                   Je ne puis supporter l’excès de sa tendresse,

                                   Et je viens vous prier

                                   De me démarier.

 

            arlequin       Je ne m’attendais pas à ce sujet de plainte.

                                   Il est nouveau. Mais parlez-moi sans feinte,

                                   N’avez-vous point, pour briser ce lien,

                                   Quelque grief plus fort?

 

5          léandre        Comptez-vous donc pour rien

                                   D’être obligé par complaisance

                                   D’adorer une femme au moins en apparence,

                                   D’épouser son caprice, et de remplir ses vœux,

                                   De suivre pas à pas ses transports amoureux,

                                   Enfin d’être auprès d’elle

                                   Nuit et jour?

 

            arlequin       Je sais bien qu’une épouse fidèle

                                   Fait voir plus de pays à l’époux complaisant,

                                   Qu’une maîtresse à son amant.

                                   Mais après tout, il faut prendre courage

                                   Vingt ou trente ans de mariage

                                   La mettront sur le pied

                                   D’une bonne amitié.[34]

 

            léandre        Je n’en crois rien, Monsieur; la froideur conjugale

                                   Ne sera jamais de son goût

                                   Et son ardeur toujours égale

                                   Depuis six mois a mis ma patience à bout.

 

            arlequin       Depuis six mois qu’il est à la torture.

                                   Depuis six mois aussi… (regardant la femme) La plaisante aventure

                                   De votre cher époux peut-on savoir le nom?

 

            Isabelle        C’est Léandre, Monsieur.

 

10        Arlequin       (à l’homme) Comment vous nomme-t-on?

 

            Léandre        Léandre

 

            Arlequin       Justement. La chose est avérée,

                                   C’est le mari de la voilée.

                                   Je veux m’en divertir. Écoutez-moi tous deux.

                                   Je vais d’un seul arrêt satisfaire vos vœux.

                                   Vous qui cherchez une femme inconstante,

                                   Croyez que celle-ci remplira votre attente;

                                   Jamais son trop d’amour ne vous fatiguera,

                                   Et du moment qu’elle vous connaîtra,

                                   Je vous réponds de son indifférence.

                                   Pour vous, (à la femme) dont la volage instance

                                   A pour but de changer pour changer seulement,

                                   Vous consentirez aisément

                                   A l’hymen que je vous propose:

                                   Mais il n’est point de bail sans clause,

                                   Et je veux absolument

                                   Que sans résister un moment,

                                   Vous vous preniez tous deux.

 

            isabelle         Quoi donc sans se connaître?

 

            arlequin       Vous aimez mieux, peut-être,

                                   Garder l’époux que vous avez?

 

15        isabelle         Que vous m’embarrassez!

 

            arlequin       Épouser au hasard, c’est la bonne méthode,

                                   Rien n’est plus à la mode,

                                   Et tous les jours on unit mille époux,

                                   Qui se connaissent moins que vous.

                                   Allons, allons, de peur que ce mari; dont vous êtes lasse, et que cette femme qui vous aime si tendrement, ne viennent s’opposer au troc, il faut vous marier promptement. Allons, donnez-vous la main, je vous dispense d’attendre l’ordre de la cérémonie, et je vous marie dès à présent.

 

                                   Léandre et Isabelle s’épousent, puis se découvrent. Le gouverneur qui reconnaît qu’il a été trompé, et que c’est sa femme qu’il vient de marier à Léandre, après les premiers emportements, consent d’en épouser une autre, ratifie leur mariage, et ordonne la fête qui suit.

 

            arlequin       (s’adressant à l’hymen qui est au même poste où il était avant la cérémonie) Hymen, pour aujourd’hui faites cesser les plaintes,

                                   Fermez bien cette main si pleine de malheurs;

                                   Rallumez vos flammes éteintes

                                   Et changez vos chaînes en fleurs.

                                   (aux nouveaux mariés) Ô troupe moins mal assorti[e],

                                   Pour vous bien réjouir, songez combien d’époux

                                   Vont vous porter envie,

                                   Et voudraient, comme vous,

                                   Goûter en un seul jour les charmes du veuvage,

                                   Et les plaisirs d’un nouveau mariage.

 

            l’hymen         (chante) Craignez le premier feu du flambeau de l’hyménée,

                                   Il brille autant que celui de l’amour:

                                   Mais bien souvent, en moins d’un jour,

                                   Sa flamme se change en fumée.

 

                                   Les violons jouent un menuet, et tous les époux moins mal assortis passent en dansant deux à deux, et l’Hymen les marie.

 

            l’hymen         (chante) Tu dis qu’en troquant de femme,

                                   Tu trompes ton compagnon;

                                   Toi, tu le penses dans l’âme:

                                   Vous avez tous deux raison.

                                   Mais avant que le coq chante,

                                   Je crains bien que le plus fin

                                   Du marché ne se repente,

                                   En regrettant sa catin.[35]

 

20        arlequin       (reprend) Car toujours la plus charmante

                                   C’est la femme du voisin.

 

            le cabaretier  (dont la femme laide a épousé le procureur) Le seul défaut de ta laide,

                                   C’est qu’elle achète un amant:

                                   Aussi cher que quand tu plaides,

                                   Tu paies un témoin Normand.[36]

 

            le procureur  (dont la femme coquette a épousé le cabaretier, répond) Si jamais la tienne attrape

                                   La clef du coffre au magot,

                                   Que de plumets par étape

                                   Te grugeront comme un sot![37]

 

            arlequin       (reprend) Quand la femme met la nappe,

                                   Le mari paie l’écot.

 

            la jardinière  (qui a épousé le jeune homme) Quitter le compère Ambroise

                                   Pour un jeune damoiseau,

                                   C’est bien troquer en matoise

                                   Sa miche pour du gâteau.[38]

 

25        le jardinier  (répond) Mais la fille de village

                                   Se lasse de pain au lait.

                                   Le chat revient au fromage,

                                   Et la servante au valet.

 

            arlequin       (reprend) Le pain bis pour le ménage

                                   Vaut bien mieux que le pain mollet.

                                   (on continue à danser)

 

            arlequin       (au parterre) En faveur de notre fête,

                                   Combien d’époux à l’envi,

                                   Sans me présenter requête,

                                   Vont changer de femme aussi!

                                   Mais tel qui sans privilège

                                   Cherche à rire chez autrui,

                                   Retrouve après ce manège,

                                   Le voisin qui rit chez lui.[39]

 

 

 

Bibliografia

 

 

Attinger, Gustave, L’esprit de la commedia dell’arte dans le théâtre français, Genève, Slatkine, 1993.

 

de Luca, Emanuele, Il repertorio della Comédie-Italienne di Parigi (1716-1762), Paris, IRPMF, 2011 (https://sharedocs.huma-num.fr/wl/?id=tpqei2P6t4tNouWWd0dEekHg4S4Yupnf&path=Repertorio.pdf).

 

Guardenti, Renzo, Gli Italiani a Parigi. La Comédie Italienne (1660-1697). Storia, pratica scenica, iconografia, Roma, Bulzoni, 1990.

 

Miglierina, Stéphane Metateatralità e legittimazione comica nelle commedia di Dufresny per la Comédie-Italienne, in Goldoni «avant la lettre»: esperienze teatrali pregoldoniane (1650-1750), a cura di Javier Gutiérrez Carou, Venezia, lineadacqua, 2015, pp. 159-170.

 

Moureau, François, Dufresny auteur dramatique (1657-1724), Paris, Klincksieck, 1979.

 

            Per i commenti lessicali usiamo i dizionari di riferimento citati in Emanuele De Luca e Lucie Comparini, Le Théâtre italien di Evaristo Gherardi, in Anne Moduit de Fatouville, La précaution inutile, a cura di Lucie Comparini, Biblioteca Pregoldoniana, Venezia - Santiago de Compostela, lineadacqua, 2014, pp. 9-27 (http://www.usc.es/goldoni): Trésor de la Langue Française, Littré, Furetière.

 

 

 



[1] Riprodotta in Guardenti, Gli Italiani a Parigi, cit., vol. II, p. 52.

[2] L’allusione è qui licenziosa, si riferisce alla dubbia verginità delle ragazze presenti (cfr. la prefazione al testo).

[3] hon: esclamazione di sorpresa, di dubbio e di scontento.

[4] douaire: lascito di un marito alla moglie in caso di vedovanza.

[5] ouais: esclamazione di sorpresa comune nel Seicento.

[6] Punta ironica da parte di Arlequin che si inserisce nella satira della civetteria femminile cara a Dufresny: mentre è già notte, i preparativi delle signorine non sono ancora finiti.

[7] attifer. Fam., vestire. Il termine non ha ancora il senso spregiativo moderno.

[8] caparaçonnées: metafora ippica applicata alle donne. I caparaçons sono le casacche prottetive e ornamentali dei cavalli nei giorni di festa. La valenza iperbolica dell’immagine rafforza l’ironia della descrizione.

[9] réseau: retina per contenere i capelli.

[10] dans les affiches: negli annunci dei periodici.

[11] Tutta la battuta, oltre che come una ridicolizzazione dell primo innamorato, può anche essere letta come un’allusione alle qualità fisiche e recitative dell’attore (giovane, bello, ecc.).

[12] je l’aimerai toute seule sans qu’il y soit: allusione comica poco velata a pratiche masturbatorie da parte di Isabelle.

[13] Opposizione filosofica tra piacere e virtù: il piacere non può essere innocente. Continuazione dell’allusione all’onanismo.

[14] La chèvre et les choux: in un esempio di finta erudizione, Pierrot mescola qui un proverbio popolare di incerta origine (ménager la chèvre et le choux, cioè cercare di conciliare due esigenze contrarie), che d’altronde non ha un rapporto chiaro con il contesto in cui viene usato qui, e una citazione non di Cicerone ma di Terenzio «ovem lupo committere» (Eunuchus, v. 832: affidare la capra al lupo). Sull’uso delle finte citazioni in Dufresny, cfr. Moureau, Dufresny, cit., p. 223.

[15] lasser un corps: allacciare un corsetto.

[16] brimborions: piccoli oggetti senza valore, ma anche testicoli. Doppio senso comico in presenza di uomini travestiti.

[17] aiguillière: letteralmente rete da pesca, ma qui nel senso più ampio di reticella.

[18] licol: forma antica di licou, briglie.

[19] je ne la boirai pas: non la sopporterò.

[20] raboteuse: che presenta irregolarità e imperfezioni. Qui, sgradevole.

[21] eau de la reine de Hongrie: famoso e pregiato profumo a base di rosmarino.

[22] Hippocrate dit que summum gaudium muliere dilatando occidit: citazione probabilmente apocrifa, con comicità sessuale, letteralmente significa: «Hipocrate dice che il troppo gioire uccide le donne dilatandole». L’intera scena è intrisa di riferimenti pseudo-medici con effetto comico: l’incontro tra discorsi falsamente razionali e clichés sulla disperazione dell’amore crea un dislivello comico tra le batutte di Arlequin e Colombine (in modo simile a quelle di Pierrot e Colombine prima).

[23] bichon: cagnolino.

[24] Come spiegato nella Prefazione al testo, il secondo atto è in gran parte in versi. Si tratta di alessandrini (con qualche caso di versi ipermetri o ipometri) e decasillabi con alternanza di senari e ottonari, e qualche caso isolato di quaternario e persino di trisillabi. Frequenti le dieresi. Le rime sono baciate o alternate. L’alternanza di versi lunghi e brevi deve essere interpretata come una volontà di mantenere un ritmo veloce alle battute, provocando con la brevità di alcuni versi la sorpresa e il sorriso del pubblico (ad esempio, II.2.7: la coquette usa improvvisamente due trisillabi, «Cette chaine / Qui me gène», tra un alessandrino e un decasillabo creando un effetto comico di rottura del ritmo). Alcuni schemi regolari di lunghezza di versi ci permettono di supporre l’esistenza di parti cantate anche non indicate dalle didascalie: ad esempio II.2.31 dove la battuta di Arlequin, composta di alessandrini e ottonari viene conclusa da un distico di senari, probabilmente un segno di punteggiatura musicale. Oltre alle partiture segnalate e a queste ipotesi ritmiche, non abbiamo purtroppo altre informazioni sul rapporto tra recitazione parlata e cantata nel secondo atto.

[25] muids: antica misura di capacità dei liquidi il cui valore è variabile secondo le regioni ma che rappresenta tuttavia una grande quantità.

[26] ce visage: qui, spreggiativo, persona di cui si ha poca stima.

[27] célibatiquement: neologismo di Dufresny per creare un alessandrino. Però la ragione non è soltanto metrica: l’allungamento della parola e la creazione dell’avverbio permettono di insistere sul soggetto centrale della commedia, il rapporto all’istituto del matrimonio. Il passaggio da prosa a verso diventa quindi anche una fonte di comicità. Sui neologismi e le contaminazioni linguistiche di Dufresny cfr. Moureau, Dufresny, cit., p. 224 e seguenti.

[28] franche lipée: buon pasto che non costa niente.

[29] aiguillon: dardo, con doppio senso sessuale.

[30] gargotière: oste di un cabaret economico.

[31] caveçon: altro termine dell’ippica. Anello di metallo nel naso dei cavalli. ♦ Patelinage: modi artificiosi e furbi.

[32] n’est point clair-net: non è del tutto onesto o, qui, naturale.

[33] Dautel, Fagnagny: mercanti di curiosità del quai de la Mégisserie e del quai des Écoles (per elementi bibliografici sulle due botteghe cfr. Moureau, Dufresny, cit., p. 172n).

[34] la mettront sur le pied d’une bonne amitié: la faranno diventare uguale a una vera amicizia.

[35] catin: moglie campagnola, ma con doppio senso di prostituta.

[36] un témoin Normand: un testimone inaffidabile. I normanni erano noti per il loro carattere cavilloso (cfr. Fatouville, La précaution inutile, a cura di Lucie Comparini, cit.).

[37] plumets: soldati. ♦ gruger: rubare.

[38] en matoise: con l’astuzia e la furbizia di una volpe.

[39] In questa ultima battuta, rivolta allo spettatore, la morale è quindi quella dello status quo matrimoniale, ma soprattutto della necessità di ridere di ogni situazione e anche delle proprie sfortune.