M. B***

 

La Fausse Coquette

 

 

a cura di Camilla Maria Cederna

 

Biblioteca Pregoldoniana

 

lineadacqua edizioni

 

2018

 

 

 

M. B***

La Fausse Coquette

a cura di Camilla Maria Cederna

 

© 2018 Camilla Maria Cederna

© 2018 lineadacqua edizioni

 

Biblioteca Pregoldoniana, nº 18

Collana diretta da Javier Gutiérrez Carou

www.usc.es/goldoni

javier.gutierrez.carou@usc.es

Venezia - Santiago de Compostela

 

lineadacqua edizioni

san marco 3717/d

30124 Venezia

www.lineadacqua.com

 

ISBN dell’edizione completa: 978-88-95598-96-3

 

La presente edizione è risultato dalle attività svolte nell’ambito dei progetti di ricerca Ar­chivo del teatro pregoldoniano (FFI2011-23663) e Archivio del teatro pregoldoniano II: banca dati e biblioteca pregoldoniana (FFI2014-53872-P) finanziati dal Ministerio de Ciencia e Innovación spa­gnolo. Lettura, stampa e citazione (indicando nome della curatrice, titolo e sito web) con finalità scientifiche sono permesse gratuitamente. È vietata qualsiasi utilizzo o riproduzione del testo a scopo commerciale (o con qualsiasi altra finalità differente dalla ricerca e dalla diffusione culturale) senza l’esplicita autorizzazione della curatrice e del direttore della collana.

 

 

 

Biblioteca Pregoldoniana, nº 18

 

 

 

Nota al testo

Edizione di riferimento e seconda edizione de La Fausse coquette:

Le / Théâtre / Italien / de / Gherardi, / ou / Le / Recueil général / de toutes les comédies & Scènes françaises jouées par les Comédiens Italiens du roi, pendant tout le temps qu’ils ont été au service. / Enrichi d’Estampes en taille-douce à la tête de chaque Comedie, à la fin de laquelle tous les airs qu’on y a chantés se trouvent gravés notés avec leur Basse-continue chiffrée. / A Paris, / chez Jean-Baptiste Cusson et Pierre Witte, rue S. Jacques, au nom de Jésus. / M. DCC./ Avec Privilège du Roy, vol. V, pp. 36-484.

 

Frontespizio:

LA FAUSSE COQUETTE/ COMEDIE EN TROIS ACTES

Mise au Théâtre par Monsieur B**** & représentée pour la première fois par les Comédiens Italiens du Roi dans leur Hôtel de Bourgogne, le dix-huit de décembre 1694

 

Incisione:

Sul frontespizio della commedia appare la prima illustrazione relativa a quest’opera. Si tratta dell’incisione di Franz Ertinger[1] (Colmar, 1640-1710). Appare, senza numero di pagina, dopo l’occhiello e quella con la lista dei personaggi (pp. 361-362).

 È firmata Ertinger sotto il quadro dell’incisione a destra. Si riferisce alla scena I.11, l’ultima del primo atto. Vi vediamo rappresentato a destra Arlequin in veste di pittore (sotto il vestito si vedono i pantaloni di tessuto a rombi, tipico della maschera) che presenta a Octave (il principe) alcuni pannelli sui quali appare un ritratto di Colombine. A sinistra, isolato, è raffigurato M. Prudent, col braccio alzato verso il gruppo, in atteggiamento di stupore. Sotto ogni personaggio appare il nome corrispondente. Sullo sfondo in prospettiva, una porta si apre su un viale alberato.

            La commedia comincia a p. 363 e riproduce il titolo:

LA FAUSSE COQUETTE./ ACTE I./ Scène I.

 

            Alla fine della commedia si trovano 4 pagine di musica, non numerate:

 

 

            Un’edizione precedente (1697) è contenuta nella raccolta spuria:[2]

Supplément du Théâtre Italien, ou Nouveau Recueil des comédies et scènes françaises qui ont été jouées sur le Théâtre Italien par les Comédiens du Roi de l’Hôtel de Bourgogne à Paris. Tome troisième (Amsterdam, Adrian Braakman, 1697), pp. 264-364. BNF [Microfiche M-23249 (3)][3]

 

            Il testo non è preceduto da alcuna illustrazione. La lista degli attori, non paginata, è seguita dall’inizio della commedia a p. 264:

LA FAUSSE COQUETTE, COMEDIE. ACTE I. SCENE PREMIERE.

 

            All’inizio del volume è posto un avviso al lettore, “Le libraire au lecteur”, nel quale l’editore sottolinea il valore di questo terzo tomo rispetto ai precedenti, per completezza, “esprit” delle opere contenute che, malgrado le condanne da parte dei detrattori della commedia in generale, non saranno inutili a far conoscere il cuore umano e i segreti meccanismi che fanno agire gli uomini, e per svelare alla luce della verità i pretesti con cui sanno colorare le azioni più criminali.[4]

            La stessa versione di trova anche in:

Suite du théâtre italien ou Nouveau recueil de plusieurs comédies françaises, qui ont été jouées sur le Théâtre Italien de l’Hôtel de Bourgogne (1697), pp. 81-182 [BNF YF 5878].[5]

 

 

 

M. B***

La Fausse Coquette

 

 

 

LA FAUSSE COQUETTE

 

Comédie en trois actes

 

Mise au Théâtre par Monsieur B*** et représentée pour la première fois par les Comédiens Italiens du Roi dans leur Hôtel de Bourgogne, le dix-huit de décembre 1694.

 

Acteurs[6]

 

octave, prince polonais[7]

m. prudent, gouverneur du prince, Cinthio[8]

colombine, femme de M. Prudent[9]

angÉlique, nièce de M. Prudent[10]

lÉandre, amant d’Angélique[11]

arlequin, Intrigant[12]

mezzetin, valet de Léandre[13]

pierrot, domestique de M. Prudent[14]

dame françoise, domestique de M. Prudent[15]

pasquariel, valet d’Octave[16]

un tailleur,

un peintre, Arlequin

un normand,

un magicien,

[maÎtre jacques]

[un porteur des lettres]

[un porteur de chaise]

Plusieurs démons

 

La Scène est à Paris

 

 

 

                                   ACTE I

 

 

                                   SCÈNE I[17]

 

                                   Colombine en espagnolette, Angélique en Amazone, Léandre en Espagnol, qui vont au bal.

 

            colombine    Je me sens d’une humeur à me bien divertir.

 

            angélique     J’ai une grande disposition, ma chère, à te bien seconder. (à Léandre) Mais vous rêvez, Monsieur? Que vous en semble?

 

            léandre        Je ne pense qu’à vous; et le plaisir que j’ai de pouvoir librement...

 

            colombine    Oh, point de galanterie pour ce soir; pareils entretiens ne sont bons que dans un tête à tête. Je suis jalouse des plaisirs des autres, quand je n’en prends point ma part. Eh, là, là, un peu de quartier: vous aurez du temps de reste à causer, quand vous serez mariés; et Monsieur Léandre m’a l’air de se payer avec usure des moments d’interruption dont je fais souffrir sa tendresse. Quoi? Angélique rechigne? Je vois bien à ta mine que tu veux un amant qui paye comptant, et que de crainte de le perdre, tu ne laisseras pas vieillir les arrérages.[18]

 

5          angélique     Tu me fais tort de croire que je songe à autre chose qu’au plaisir de me réjouir avec toi, et d’autant plus que je m’imagine la joie que tu ressens quand tu peux t’éloigner de ton fastidieux époux. Avoue-le, c’est une épouvantable chose qu’un vieillard pour ton âge.[19]

 

            léandre        Franchement, la charge est pesante.

 

            angélique     Si j’étais à ta place, je lui ferais prendre force grains d’opium quand je voudrais me divertir.

 

            colombine    Il n’en a pas besoin; et quand je le payerais pour dormir, il ne s’en pourrait mieux acquitter. Dites tout ce que vous voudrez, un mari qui a le talent de dormir, quand sa femme a à faire ailleurs, a des prérogatives charmantes.

 

            angélique     Je l’avoue. Mais s’il se réveille par hasard, et qu’il ne te trouve point auprès de lui?

 

10        colombine    Oh! En ce cas-là, il prendra la peine de se tourner de l’autre côté et de se rendormir. Si après toutes les précautions que je prends pour lui cacher mes intrigues, une insomnie dérange tous les soins que je me suis donnés tant pis pour lui. Est-ce que je suis payée pour le bercer?[20]

 

            léandre        En effet, vous vous êtes levée sans bruit, nous avons fermé la porte fort doucement; il doit être content des mesures qu’on apporte à ne point troubler son repos.

 

            colombine    Assurément. Mais parlons un peu d’autre chose. Que pensez-vous du dessein que j’ai formé contre la liberté de ce jeune Polonais?

 

            léandre        Je ne sais quels sont les sentiments que vous avez pour lui. Mais je doute qu’il résiste aux charmes de votre personne. Il est déjà par avance fort rêveur depuis quelque temps.

 

            colombine    Je veux me justifier, et vous expliquer tout. Vous savez que mon mari en est gouverneur. Les avantages qu’il a reçus en élevant ce jeune prince l’ont si fortement attaché à sa maison qu’il les a préférés à l’espérance de posséder en France des emplois considérables. Cependant, ennuyé de mon absence, et s’étant toujours obstiné à cacher son mariage, il pallia l’impatience qu’il avait de me revoir du dessein qu’il inspira aux parents de ce prince de lui faire voir la France, où il le conduisit. Mon mari ne manqua pas de me faire valoir à son arrivée l’adresse dont il s’était servi pour se rapprocher de moi, et me défendit surtout de paraître aux yeux du Prince, comme sa femme. Cette défense fit en moi tout l’effet que j’en avais attendu. Il précipita ma curiosité dans cette occasion, pour laquelle je n’aurais eu qu’une légère impatience, si je n’avais était poussée avec plus d’ardeur par la défense qu’il m’en avait faite. J’étais dans un jardin un jour, et je rêvais aux moyens de me satisfaire, quand je fus surprise par un bruit qui m’obligea de tourner la tête. C’était justement le Prince qui y arrivait avec plusieurs autres; et comme je ne voulais être visible que pour lui, je me dérobai à sa vue avec précipitation, et je laissai tomber mon portrait, qu’il ramassa. Je sais que cette peinture a fait impression sur son esprit. C’est de quoi je veux profiter, et voir ce que valent mes yeux auprès de lui, le tout sans blesser ce que je dois à ma vertu. Je serai même bien aise que mon mari en conçoive de la jalousie; cela vaut une médecine aux vieilles gens.

 

15        léandre        J’approuve votre dessein, et je vous offre mon valet Mezzetin, dont vous tirerez assurément du secours, si vous voulez vous en servir.

 

            colombine    Cela est bien généreux; je l’accepte de tout mon cœur. Mais il est tard. Appelons Pierrot dont je veux être escortée.

 

 

                                   SCÈNE II[21]

 

                                   Colombine, Angélique, Léandre, Pierrot.

 

            colombine    (Appelant Pierrot) Pierrot? Pierrot?

 

            pierrot          (Sans paraître) Paix là.

 

            léandre        Il est encore trop matin pour lui.

 

            colombine    Il en faut bien souffrir. Pierrot? Pierrot?

 

5          pierrot          Paix donc là, vous dis-je.

 

            angélique     Tu vas le fâcher, ma petite; il est peut-être après quelques système de philosophie.

 

            colombine    Viendras-tu donc? Pierrot?

 

            pierrot          (Tout en colère) Peste soit de votre Pierrot! Vous ne croiriez pas avoir bien parlé, si vous n’aviez cousu un Pierrot au bout de chaque période. Voilà-t-il pas une belle heure pour appeler, Pierrot, Pierrot?

 

            angÉlique     (À Pierrot) Te voilà de bien méchante humeur, mon ami! Voudrais-tu qu’on t’appelât Citron?

 

10        pierrot          Dame, voyez-vous, Mademoiselle, c’est qu’avec moi il n’y a qu’un mot qui serve. Je veux dormir tout mon saoul. Nous avons tous dormi dans notre famille. Je ne fais que mes quatre repas par jour, une fois; encore faut-il bien avoir un peu de repos pendant la nuit.

 

            léandre        Eh, qu’as-tu donc tant à te plaindre?

 

            pierrot          Eh, morbleu, je n’ai pas une heure de temps dans le jour pour étudier. Aussi, je deviens tout bête depuis que je suis dans cette diable de maison. Pierrot, ai-je fait bien de la bile ce matin? Pierrot, j’ai mal à la tête. Qu’on demande à Pierrot où sont mes mules! Pierrot, combien de fois Monsieur le Chevalier a-t-il craché sous mes fenêtres? Pierrot, va-t’en entretenir les dames, pendant que je m’habille. Pierrot, va-t’en goûter le vin à la cave. Pour cela encore passe. Quand il y a de la raison à une chose, on ne se la fait pas dire deux fois.

 

            angélique     Que veux-tu? Quand on est réduit à servir, il faut passer par-dessus bien des choses; et si tu n’as que de ces chagrins-là, je te conseille de les avaler tout doucement.

 

            pierrot          Vraiment, c’est bien ma faute si je sers. Si j’en avais cru mes amis, j’aurais buté tout droit à quelque bon bénéfice. Mais j’ai toujours eu de la tendresse pour les chevaux, et je me suis jeté à corps perdu dans l’écurie, pour m’avancer plus vite.

 

15        colombine    Ne sais-tu point si mon mari dort?

 

            pierrot          Il ronfle à peindre. A propos, j’oubliais de vous dire qu’il faut faire changer de place au lit de votre mari; car comme je couche à côté de sa chambre, sa manière de ronfler ne s’accorde point du tout avec la mienne, et cela m’interrompt quand je dors.

 

            colombine    Je n’y manquerais pas. Mais allons nous-en au bal, il est déjà tard.

 

 

                                   SCÈNE III

 

                                   Arlequin, Mezzetin, l’un d’un côté du théâtre, et l’autre de l’autre.

 

            arlequin       C’est avec raison, qu’un ancien philosophe a écrit sur la différence du jour et de la nuit; car ils ne se ressemblent nullement.[22]

 

            mezzetin       Il faut que quelque parent du jour soit mort subitement, et qu’il en ait pris le deuil; car je voyais ce matin bien plus clair qu’à présent. Il fera une vilaine journée cette nuit.

 

            arlequin       Le soleil a fait la débauche hier au soir, car il est longtemps à se lever aujourd’hui. Ah! Povero Arlicchino!

 

            mezzetin       (Surpris) Come? Arlicchino è qui?

 

5          arlequin       (D’un ton ferme) Signor sì, son qui. Una cosa ben straordinaria! Ah son qui, ah son qui. Mais, tout beau, ne faisons pas le brave à contretemps; la prudenza è la virtù dei poltroni, et à gens de ma sorte notre dos est souvent le médiateur des différends.[23]

 

            mezzetin       Poichè Arlicchino è qui, voglio divertirmi di lui.

 

            arlequin       (En se promenant) Tranquilli bourgeois, che dormite tranquillamente, che la vostra sorte me doit faire envie! Il vostro sonno vi prepara momenti fortunati; et il est permis aux chats de vos gouttières...[24]

 

            mezzetin       (Contrefaisant le chat) Miaou, miaou.

 

            arlequin       Un matou! Est-ce qu’il me prend pour du mou? Vous verrez que quelque chatte de mauvaise vie aura passé par ici. Ehi voi, tenero gatto, qui échauffé par les yeux d’une chatte amoureuse, correte de ça, et de là pour tâcher de la surprendre en flagrant délit; deh! per pietà, fermate il passo, ne vous mettez point martel en tête. Anca mi son innamorato; ma la mia crudele est bien plus à blâmer: elle me préfère le fils d’un partisan. Mais pour vous, de quoi vous plaignez-vous? Si votre chatte vous trahit, ne savez-vous pas que la nuit tous les chats sont gris?[25]

 

10        mezzetin       (Contrefait le chien, le chat, l’âne, le cochon, et autres animaux).[26]

 

            arlequin       C’est ici l’assemblée de tous les animaux.

 

            mezzetin       (Avec deux couteaux s’approchant d’Arlequin) Allons, qu’on lui coupe la gorge.

 

            arlequin       La gorge! Je n’ai point de gorge à couper. Allons, il faut décamper. (Arlequin voulant fuir, Mezzetin lui tend le pied, le fait tomber, et se retire)

            arlequin       (Se relevant) Je suis tombé bien adroitement; car il n’y a que le nez qui a porté. A combien de malheurs est-on exposé la nuit! Fâcheuse condition que celle d’un valet! Le métier n’en vaut plus rien; et je trouve, pour moi, quoi qu’on en dise, que tant d’honnêtes gens qui roulent aujourd’hui en carrosse, ont bien fait de le quitter.

 

15        mezzetin       (Revenant en vendeur d’eau de vie) La vie, la vie. À mon petit cabaret, la vie, la vie.[27]

 

            arlequin       Parbleu, voilà justement mon affaire.

 

            mezzetin       Bonjour, bonjour, Monsieur. La vie, la vie.

 

            arlequin       Parlez, Monsieur la vie?

 

            mezzetin       Que souhaitez-vous de moi? Voulez-vous jouer aux dés? Aux cartes? Au Toton, au Quilles, au Palet, à la Paume, au Cheval fondu, au Trou-madame, au Qu’y met-on, au Combien, à la Coupe-tête, à Pet-en-gueule, au Plaît-il maître? Vous ne parlez pas?[28]

 

20        arlequin       Je ne veux point jouer.

 

            mezzetin       Voulez-vous que je vous parle de la petite joie de Franchon, Margoton, Alison, Salisson, Cotillon, Louison, pour boire du bon, au petit Bourbon?[29]

 

            arlequin       Je ne connais point tous ces messieurs-là.

 

            mezzetin       (Donnant la lanterne à tenir à Arlequin, et prenant une bouteille et un petit verre dedans son panier)

 

            arlequin       (Prenant la lanterne, et voyant la bouteille) Vous y êtes. Du ratafia, et du meilleur?[30]

 

25        mezzetin       (Versant du ratafia dans le verre) Comme vous voyez, il n’y a point de raillerie avec moi. J’ai versé tout plein, et... je bois de même. (il boit)

 

            arlequin       Et moi je vous éclaire.

 

            mezzetin       Il me semble que vous n’entrez pas assez dans le décorum de notre charge.[31]

 

            arlequin       A moins que je n’entre dans votre panier...

 

            mezzetin       Savez-vous que nous sommes gens nécessaires à l’État?

 

30        arlequin       C’est donc pour l’énivrer?

 

            mezzetin       Oh que non. Qui est-ce qui tient le cœur en joie? La vie. Qui est-ce qui donne du courage aux soldats? La vie. La, la, la. (il fredonne en s’en allant)

 

            arlequin       (Le rappelant) Parlez donc. Est-ce que vous savez chanter?

 

            mezzetin       Je le crois. C’est moi qui ai eu l’honneur de mettre le premier clou à l’orchestre de l’Opéra. Ecoutez ma chanson.

 

                                               Accourez tous

                                               venez chez nous

                                               rattraper la santé si l’on vous l’a ravie.

                                               La vie, la vie.

                                               Amis, buvez, chassez la maladie.

                                               Eau de vie, eau de vie.

                                               Suivez-moi, je bois Rossoli,

                                               raccabi,

                                               fenouillette,

                                               eau clairette.

                                               Piterpite et Ratafia?

                                               Laissez-là

                                               tisane et limonade,

                                               fraise, framboise, orgeade.

                                               Voici de l’or potable.

                                               Qui guérit la folie.

                                               Ma vie, la vie.

                                               À mon petit Cabaret, à mon petit Bourbon,

                                               pour boire du bon,

                                               Fanchon, Toinon, Margoton,

                                               la vie, eau de vie, eau de vie.[32]

 

            arlequin       (Le contrefaisant) À mon petit Bourbon, pour boire du bon, Fanchon, Toinon, Margoton, la vie, eau de vie, eau de vie. Cet homme-là est drôle! Je m’en vais prendre pour un sol de vie (il fouille dans ses poches). Où est donc mon argent? Ouais! Je pense que je n’en ai pas! Voyons encore.

 

35        mezzetin       (Pendant qu’Arlequin fouille dans sa poche, se change en oublieux, et crie) La joie, la joie, des petits tuileaux, laux, laux, la joie.[33]

 

            arlequin       (Regardant de tous côtés) Je pense que le vendeur d’eau de vie s’est évaporé.

 

            mezzetin       (Criant toujours) Jeanneton, Perrette, dormez-vous? M’appelez-vous, filez-vous, cousez-vous, gribouillez-vous? Faites-vous la joie? La joie, la joie, la petite joie.

 

            arlequin       La joie, la joie?

 

            mezzetin       (Se tournant de tous côtés) Qui m’appelle?

 

40        arlequin       C’est moi.

 

            mezzetin       (Courant sur Arlequin) Me voilà.

 

            arlequin       Et moi aussi (le poussant) Prenez donc garde. Voulez-vous m’écraser?

 

            mezzetin       (Se reculant et s’en allant) Puisque vous vous fâchez, Monsieur, serviteur.

 

            arlequin       Où allez-vous si vite?

 

45        mezzetin       Je m’en vais souper chez un conseiller.

 

            arlequin       Bon! Il est trop tard; vous n’arriverez tout au plus qu’au dessert. Mais puisque vous allez chez un conseiller, vous êtes donc dans le grand monde?

 

            mezzetin       Je le crois! Il n’y a point de grande maison où je ne rentre plus facilement que chez moi.

 

            arlequin       Et pourquoi cela?

 

            mezzetin       C’est que comme je couche dans un four, et que la porte est fort petite, j’ai toutes les peines du monde à y entrer.

 

50        arlequin       Ça, ça, voulez-vous jouer une main ou un pied d’oublies ensemble?[34]

 

            mezzetin       Volontiers, et par-dessus tout cela, je vais vous régaler de ma chanson.

 

                                    (Ils s’agenouillent tous deux à terre, le corbillon au milieu d’eux. Mezzetin tire un cornet et trois dés, et de temps en temps, crie: La vie, la vie; ce qui oblige Arlequin à se lever, et à chercher tout autour de lui. Après avoir fait plusieurs fois le même lazzi)[35]

 

            arlequin       (Regardant Mezzetin au visage, lui dit) N’avez-vous jamais vendu d’eau de vie?

 

            mezzetin       Non, Monsieur. Mais remettez-vous donc à votre place si vous voulez jouer.

 

                                   (Arlequin se replace à côté de Mezzetin, un genou à terre, et regarde de temps en temps dans le corbillon, pendant que Mezzetin chante)

 

            mezzetin       (Chante) Dès que la nuit étend son voile,

                                               on m’entend crier comme un fou.

                                               Ma lanterne me sert d’étoile,

                                               et mon corbillon de surtout.

                                               N’êtes-vous pas saouls

                                               de dormir tous?

                                               Que ne m’appelez-vous, hou hou,

                                               mes bonnes dames,

                                               éveillez vos jaloux.

                                               Gens mariés, la nuit on vous laisse vos femmes,

                                               et le jour elles sont pour nous.[36]

 

55        arlequin       (Ayant la bouche pleine d’oublies qu’il a prises dans le corbillon pendant que l’autre chantait, contrefait Mezzetin, et répète en bredouillant)

                                               Et le jour elles sont pour nous.

 

            mezzetin       (Surprenant Arlequin la bouche pleine) Je pense que vous mangez mes oublies?

 

            arlequin       J’ai pris la main du roi.

 

            mezzetin       Oh! Puisque vous les aimez tant, mangez encore celles-ci. (il lui jette une poignée de farine dans le nez, et s’en va)

 

            arlequin       (Se relevant et courant après) Attrape, attrape. On ne saurait manger un morceau en repos.[37]

 

 

                                   SCÈNE IV[38]

 

                                   Pierrot, avec une lanterne, Colombine, le Prince, qui les suit.

 

            pierrot          Sauvons-nous, vous dis-je, de ce mauvais lieu-là. J’ai eu besoin de toute ma vertu pour ne pas succomber.

 

            colombine    En voilà assez pour ce soir.

 

            pierrot          Vous êtes bien sobre aujourd’hui? Mais à qui en veut ce Marmouset-là? Il vous a fleuré tout le soir: retirons-nous, il a mauvaise physionomie.[39]

 

            le prince       (Abordant Colombine) Le sort m’est plus favorable que je n’osais l’espérer. Je vous retrouve enfin, Madame, et mon cœur, en vous voyant, est bien vengé de l’inquiétude que ce moment d’absence lui a causé.

 

5          pierrot          S’il la voyait aussi souvent que moi, il en serait bientôt las.

 

            colombine    Je ne croyais pas, Seigneur, que vous prissiez assez d’intérêt à ma personne, pour vous apercevoir que j’eusse disparu de l’assemblée.

 

            le prince       Ah, Madame! Mon cœur tient à vous par des charmes trop puissants, et il est trop content auprès de vous pour vous en voir éloigner tranquillement.

 

            colombine    Vous me trouveriez bien faible, si je donnais quelque croyance à des discours, que le seul hasard, ou plutôt certaine manière familière à tous les hommes, leur fait débiter.

 

            pierrot          Oh! Elle y a déjà été attrapée.

 

10        le prince       Que je suis encore loin de l’espérance dont je m’étais flatté, puisque ma sincérité vous est suspecte!

 

            colombine    Le moyen de croire que vous m’aimez, ne m’ayant jamais vue?

 

            le prince       Par quels serments faut-il vous rassurer? Mais que vous êtes injuste! Tout ne devient-il pas possible aux charmes de vos yeux? Oui, madame, c’est dans vos regards que j’ai puisé cette flamme qui me dévore. Rien n’est comparable à l’idée que je m’en suis faite; c’est l’Amour même qui a pris soin de vous dépeindre à mon cœur. Hélas! Si, malgré les soins que vous avez pris à me les cacher, mon cœur n’a pu se défendre, je m’attends à mourir de plaisir en les voyant.

 

            pierrot          Que vous faites de façons! Si j’étais à votre place, je lui aurais déjà fait voir tout ce qu’il aurait voulu.

 

            colombine    J’estime trop l’erreur dont mon masque vous a prévenu en ma faveur, pour vouloir risquer, en me découvrant, ce que mes yeux ont si heureusement commencé.

 

15        le prince       Madame, si vous êtes si obstinée à me cacher votre visage, du moins accordez-moi votre portrait.

 

            pierrot          Je lui donnerais plutôt le mien par-dessus le marché.

 

            colombine    Seigneur, je ne puis encore vous satisfaire de cela, car je le perdis dernièrement en me promenant dans un jardin.

 

            pierrot          N’est-il pas temps de vous retirer? Hélas! Si mon père et ma mère savaient que je suis dans les rues à l’heure qu’il est...

 

            le prince       Ainsi donc, Madame, je ne remporterai avec moi, pour tout fruit de mon amour, qu’une triste incertitude, et que l’inutilité d’une espérance dont je m’étais flatté trop légèrement.

 

20        colombine    Espérez, Seigneur. Je ne puis priver votre tendresse d’un bien qu’elle mérite. (apercevant son mari) Ah, ciel! (au Prince) Il faut, Seigneur, que je m’éloigne, ne me suivez point de grâce. (à Pierrot) Pierrot, voilà mon mari, je suis perdue si tu m’abandonnes.

 

            pierrot          Diable! Le bon homme a bien peur que le serein ne tombe sur l’honneur de sa femme.

 

            le prince       Eh quoi, Madame...

 

            pierrot          (Repoussant le Prince) Nous avons bien d’autre affaire que de vous écouter. (le Prince s’éloigne d’eux)

 

 

                                   SCÈNE V

 

                                   Prudent, une lanterne à la main. Les acteurs de la scène précédente.

 

            prudent         Où est donc allée ma carogne de femme?

 

            colombine    (Fait tomber la lanterne de son mari, et entre aussitôt dans la maison)

 

            pierrot          Qui va là?

 

            prudent         Est-ce toi, Pierrot? Où est ma femme?

 

5          pierrot          (Poussant Prudent dans la maison) Taisez-vous, ne parlez pas, vous ne savez pas le danger où vous êtes.

 

            prudent         Mais ma femme? Je veux savoir...

 

            pierrot          (Le faisant rentrer de force dans la maison) vous les aurez de reste une autre fois; rentrez donc, vous dis-je.

 

            le prince       (Seul) Dans quel étrange embarras son discours me jette-t-il. Mais enfin, reprenons quelque espérance. Il n’en faut point douter, c’est son portait que j’ai trouvé l’autre jour: la perte qu’elle a avoué avoir faite du sien; son esprit et mon cœur, tout est d’accord pour me persuader. Pasquariel, viens être témoin de l’excès de ma joie. J’ai enfin découvert l’original du portrait qui m’avait donné tant d’inquiétude.[40]

 

 

                                   SCÈNE VI[41]

 

                                   Octave, Pasquariel.

 

                                   C’est une scène toute italienne. Pasquariel vient avec un flambeau allumé, suivi d’un de ses amis, qui tient une bouteille et un verre. Et comme toute l’attention de Pasquariel est tournée du côté de la bouteille, il ne songe qu’à la vider, sans prendre garde à ce que son maître lui dit; ce qui fait qu’il ne répond jamais juste aux demandes du Prince qui, las de ses impertinences, l’observe attentivement et, le surprenant avec un verre à la main, lui donne un coup de pied dans le ventre, et s’en va. Pasquariel tombe en arrière, fait la culbute sans renverser le verre de vin, se lève, le boit; et voulant s’en aller, il s’arrête voyant venir Arlequin habillé en femme.

 

 

                                   SCÈNE VII

 

                                   Pasquariel, Arlequin, déguisé en femme.

 

            pasquariel    Gran sventura di servire un giovane senza cervello! Ma che vedo? Una ninfa tardiva, che sorte sola dal ballo!

 

            arlequin       Je viens, comme cela du bal, où tout le monde m’a pris pour une femme. J’y ai fait des conquêtes à foison. Mais voici Pasquariel; je ne veux pas qu’il me reconnaisse (il se promène devant Pasquariel, son manchon devant son visage). En vérité le serein est incommode dans une assemblée de nuit!

 

            pasquariel    (Amoureusement) Buonasera a vossignoria, Mademoiselle.

 

            arlequin       Ah, fi donc, Monsieur, fi donc! Vous me faites rougir.

 

5          pasquariel    Ne craignez rien, Madame, je ne suis ici que pour vous servir. Que vous êtes charmante!

 

            arlequin       Eh bien, ne l’avais-je pas bien dit? Dame, arrêtez-vous donc. Vous me regardez avec de certains yeux languissants; je sens que cela dérange toutes mes parties nobles.

 

            pasquariel    Qui êtes-vous, Madame?

 

            arlequin       Moi, Monsieur?

 

            pasquariel    Oui. Êtes-vous fille?

 

10        arlequin       (En niaisant) Bon, bon!

 

            pasquariel    Êtes-vous femme?

 

            arlequin       Point du tout.

 

            pasquariel    Vous êtes donc veuve?

 

            arlequin       Oh, pour veuve, je l’ai été trois fois, sans le tour de bâton, et le savoir-faire.[42]

 

15        pasquariel    È una gran fortuna la mia, d’avervi ritrovata. Demeurez-vous loin?

 

            arlequin       Moi, Monsieur? Je n’ai point de demeure assurée, et je loge où je me trouve.

 

            pasquariel    Mais qui êtes-vous?

 

            arlequin       Je suis une pièce d’étoffe qui n’a point encore été déroulée.[43]

 

            pasquariel    (À part) La belle brunette, la belle brunette! (haut) Cette étoffe-là sera toujours du goût de tout le monde. Et combien l’aune, s’il vous plaît?[44]

 

20        arlequin       Oh, pour cela, Monsieur, on ne me mesure pas à l’aune. Mais pour peu que cela vous fasse plaisir, je vous en ferai bonne composition.

 

 

                                   SCÈNE VIII

 

                                   Mezzetin, Arlequin, Pasquariel.

 

            mezzetin       È possibile che non potrò trovar il mio patron? Ma non è quello Pasquariello, con una bella figlia? Oh, j’en aurai ma part, ou je m’engorge. Bonsoir, Pasquariel. Qui est cette jolie fille?[45]

 

            arlequin       (Bas en riant) Il ne me connaît pas, divertissons-nous.

 

            pasquariel    Cette jolie fille? Non la conosco.

 

            mezzetin       (À Arlequin) Vous êtes bien tard dans les rues, Mademoiselle?

 

5          arlequin       (D’un ton embarrassé) C’est que j’attends s’il ne passerait pas quelque vendeur d’eau de vie, pour me rafraîchir un peu. Je sors de ce bal, si altérée, si altérée, qu’à peine ai-je la force de cracher.

 

            mezzetin       (Bas) C’est du gibier. (haut) Il me semble pourtant que dans ce bal on donnait de la limonade aux dames.[46]

 

            arlequin       Cela est vrai; et de l’air dont je suis faite, vous pouvez bien juger qu’on ne m’en a pas offert la dernière. Il y avait un grand fripon de laquais bien fait (on dit que c’est le laquais de la dame du logis), le pendard, il avait un empressement étrange pour m’en faire boire; je n’ai jamais vu un garçon plus pressant. Mais à parler franchement, j’ai trouvé la limonade trop froide; j’aime beaucoup mieux une bouteille de vin de Champagne, cela rappelle mieux son buveur.

 

            mezzetin       Mais, délicate comme vous êtes, le vin doit vous incommoder.

 

            arlequin       Oh, ne vous y trompez pas, il n’y a point de grenadier qui porte mieux son vin que moi.

 

10        mezzetin       Cela étant, je vous offre bouteille au premier cabaret.

 

            pasquariel    Tout beau, Monsieur Mezzetin, tout beau: Sono il primo, e devo aver la preferenza.

 

            arlequin       Oh, point de querelle entre vous, s’il vous plaît; je vais vous mettre d’accord. Vous m’en donnerez chacun une bouteille, et je les boirai toutes deux.[47]

 

            pasquariel    Allez, vous êtes une insolente, Madame.

 

            arlequin       Ah, le fripon, qui me dit des injures à ma barbe!

 

15        mezzetin       C’est un faquin que j’aurais déjà assommé, si...

 

            arlequin       Je n’aime pas le bruit; mais vous me feriez plaisir de le houspiller un peu.

 

 

                                   SCÈNE IX

 

                                   Angélique en amazone, les acteurs de la scène précédente.

 

            angélique     (Vers la cantonade) Adieu, Chevalier, adieu, Marquis, serviteur, Monsieur l’Abbé! Je crois, par ma foi, que toute la friperie s’était donné rendez-vous dans ce bal-là. Mais il est temps que je me retire. Holà, eh, quelqu’un de mes gens? Champagne? La Fleur? Où diable sont-ils donc? (à Mezzetin) Ah, mon enfant, n’as-tu point vu un carrosse avec des chevaux blancs, des laquais rouges, des galons d’or aux manches, des plumets, et des écharpes?[48]

 

            mezzetin       Non, en vérité, je n’ai rencontré que la charrette d’un boulanger de Gonesse. Si vous en avez besoin, je l’appellerai.[49]

 

            angélique     (À Pasquariel) Mon enfant, n’as-tu point vu un carrosse plein de masques?

 

            pasquariel    Non, je n’ai point rencontré aujourd’hui d’autres masques que vous!

 

5          angélique     (Apercevant Arlequin) Ah, parbleu, Madame, je crois que vous vous moquez de moi! Il y a deux heures que je vous cherche. Vous me donnez rendez-vous dans ce bal, et vous sortez sans rien dire.

 

            arlequin       (D’un air dédaigneux) Oh, vraiment, vraiment, s’il fallait que je tinsse parole à tous ceux à qui j’ai donné rendez-vous, j’aurais plus de trente galefretiers à mes trousses.[50]

 

            angélique     (Embrassant Arlequin) Ah, Madame, quel plaisir...

 

            mezzetin       (Repoussant Angélique) Monsieur, vous vous trompez, ce n’est pas ce que vous pensez, et cette fille-là est à nous; nous l’avons prise à fond perdu, mon camarade et moi, pour danser à deux ou trois bals de nos amis.

 

            pasquariel    Cela est vrai, et j’ai couru toute la nuit, pour lui trouver un corps, une jupe et une chemise.

 

10        angélique     (À Arlequin) Quoi, Madame, vous...

 

            arlequin       Une belle affaire! C’est que j’avais donné mon corps et ma jupe à la blanchisseuse.

 

            angélique     Vous empruntez une chemise? Ah, ah, ah!

 

            arlequin       Pourquoi non? Comme on est bien aise de n’être pas reconnue dans un bal, j’ai emprunté une chemise blanche pour mieux me déguiser.

 

            angélique     Le déguisement est nouveau.

 

15        pasquariel    (À Angélique, prenant Arlequin par la main) On vous donne le bonsoir, Monsieur.

 

            angélique     Qu’appelez-vous bonsoir? (elle prend Arlequin par la main) Allons, Madame, venez-vous-en avec moi.

 

            arlequin       En vérité, Monsieur, je ne puis pas. Je suis louée pour toute la nuit, en conscience. Demandez, demandez.

 

            mezzetin       Cela est vrai. Nous en avons payé la première heure d’avance.

 

            angélique     Oh, morbleu, louée ou non, je ne vous quitte pas. (vers Pasquariel et Mezzetin) Allons, Messieurs, lâchez cette fille-là; ou par le sang bleu...[51]

 

20        pasquariel    Oh, ne faites point de gasconnade, car je vous donnerai de mon flambeau par le nez.[52]

 

            angélique     Comment, maraud?

 

            mezzetin       Je décampe. (il s’en va)

 

            angélique     Tu perds ainsi le respect à une personne comme moi? (elle lui tire un coup de pistolet sans l’attraper, et s’en va)

 

            arlequin       Ah, je suis morte. Je n’en reviendrai jamais.

 

25        pasquariel    Êtes-vous blessée?

 

            arlequin       Non, mais je ne porterai jamais mon fruit à terme. Je suis grosse de quatorze mois.

 

 

                                   SCÈNE X[53]

 

                                    Le théâtre représente la chambre du Prince.

 

                                   Le Prince, regardant le portrait de Colombine qu’il a au bras, Prudent qui survient.

 

            le prince       (Seul) Ah! Que mes yeux goûtent avidement à leur premier éveil un objet si charmant!

 

                                    Quand, malgré mon sommeil, un doux élan de flamme,

                                   de tendres visions a su remplir mon âme,

                                   et qu’un songe flatteur m’a, par des traits nouveaux,

                                   de ses charmes puissants tracé mille tableaux!

                                   Hélas! D’une si douce, et si charmante idée,

                                   mon âme à tout moment se trouve possédée.

                                   Que veut dire ceci, mon cœur?

                                   Tu te flattes. Tu crois que de tous ces mensonges,

                                   comme ils ne sont causés la nuit que par des songes,

                                   il ne t’en restera jamais que la vapeur.

                                   Mais consulte-toi mieux toi-même.

                                   Voir cet objet la nuit, le chercher tout le jour,

                                   si ce n’est pas là comme on aime

                                   apprends-moi, faible cœur, à connaître l’amour.

 

                                    Ah, vous voilà, Monsieur Prudent? Vous venez bien tard aujourd’hui.

 

            prudent         Comme je savais que vous deviez passer une partie de la nuit au bal, j’ai cru que vous ne seriez pas encore éveillé.

 

            le prince       Depuis quelques jours mon sommeil est interrompu.

 

            prudent         Je me rendrai une autre fois plus exact. Mais, Seigneur, j’ai une grâce à vous demander. Un de mes amis, ayant fait ici mal ses affaires, est contraint de se retirer, et voudrait passer en Pologne; je vous demande pour lui l’honneur de votre protection, et quelques lettres de faveur.

 

5          le prince       Vous pouvez compter sur moi, pour vous et pour vos amis. Faites expédier les lettres par mon secrétaire comme vous le souhaitez, et je les signerai.

 

            prudent         Que je vous ai d’obligation! (il baise la main du Prince, et apercevait le portrait de sa femme, à part) Mais que vois-je? Le portrait de ma femme au bras du Prince! Puis-je bien être encore le maître de mes transports?

 

            le prince       Qu’avez-vous donc, Monsieur? Vous changez de couleur.

 

            prudent         (À part) Dissimulons. (haut) Quelques vapeurs, dont j’ai été frappé comme d’un coup de foudre, ont causé la surprise que vous avez remarquée.

 

            pasquariel    (Arrivant) Monsieur, voilà cette chose que vous voulez avoir.

 

10        le prince       Que veux-tu dire?

 

            pasquariel    C’est cet homme, vous dis-je, qui a des petits morceaux de bois qui ont de la barbe au bout; cela est fait comme de petits balais, et d’un seul coup de cette affaire-là il vous défigure le visage.

 

            le prince       C’est du peintre dont il veut parler. Fais-le entrer.

 

            pasquariel    Entrez, entrez, Monsieur.

 

 

                                   SCÈNE XI[54]

 

                                   Arlequin, en peintre, le Prince, Prudent, Pasquariel.

 

            arlequin       On m’a dit, Monsieur, que vous cherchiez un peintre; et comme sans vanité je le suis, je viens vous offrir tout ce qui dépend de mes couleurs et de mes pinceaux.

 

            le prince       Je suis ravi de vous voir.

 

            arlequin       Tel que vous me voyez, Monsieur, je suis un original, mais le plus original de tous les originaux. On voit renaître dans mes ouvrages les Titien, les Paul Veronese, les Carache, les Michelange, les... Arlequin; et dans mille ans d’ici, si je vis encore, ce sera quelque chose de beau de me voir.[55]

 

            le prince       Si vous poussez l’excellence de la peinture jusqu’à ces temps-là, vous y découvrirez bien des beautés, et je souhaite en être le témoin.

 

5          arlequin       Nous tenons de la nature certaines inclinations nécessaires pour exceller dans un art, et je puis dire qu’elle me les a toutes prodiguées. Car j’aime le vin, le jeu, et les femmes; je suis gueux et capricieux en diable: voilà ce que raisonnablement on peut demander dans un peintre accompli, et ce que sans me flatter je possède au suprême degré; mais aussi, je n’ai point d’autres défauts considérables.

 

            le prince       Vous voulez vous divertir.

 

            arlequin       Je suis surtout le peintre des femmes. Il n’y en a pas une que je ne rajeunisse de dix années. J’attrape si bien l’air du visage, que, tac, je donne un soufflet à la nature; et s’il manque quelque chose à leur ressemblance, c’est leur flux de bouche perpétuel où je n’ai pu encore atteindre avec mon application.

 

            le prince       Ce n’est pas aussi une chose fort facile. Mais ne nous ferez-vous point voir quelqu’un de vos ouvrages?

 

            arlequin       Il y en a un qui paraît assez souvent aux yeux de tous les hommes; mais le beau temps lui est contraire.

 

10        le prince       Qu’est-il donc?

 

            arlequin       L’arc-en-ciel![56]

 

            le prince       L’arc-en-ciel?

 

            arlequin       Oui, vraiment, c’est moi qui l’ai peint en détrempe. Voilà ce qu’on appelle un morceau bien hardi, et d’un beau coloris!

 

            le prince       Vous moquez-vous?

 

15        arlequin       Bon! Ce n’est qu’une bagatelle. Je peignis l’autre jour une oppression de poitrine qu’avait une dame, si bien et si au naturel, qu’un médecin même qui la vit dans la rue, comme mon valet la portait, en fut si fort frappé d’imagination qu’il voulait à toute force faire saigner et purger mon tableau; mais vertu de ma vie, je m’y opposai fortement.

 

            le prince       Eh pourquoi cela?

 

            arlequin       La malepeste! Si les médecins s’étaient mêlés une fois de traiter les tableaux, il ne nous resterait non plus de morceaux de l’Antiquité que des malades dont ils prennent soin.

 

            le prince       Venons au fait, Monsieur; car avant de travailler pour moi, je veux voir de vos ouvrages.

 

            arlequin       Volontiers, Monsieur. Je vais vous faire voir un paravent que je portais chez une personne de qualité. Allons vite, que l’on apporte le paravent.

 

                                    (Deux laquais apportent un paravent. Arlequin l’ouvre. On voit dans la première feuille un cavalier qui se peigne devant un miroir)

 

20        arlequin       (Au Prince) Eh, Monsieur, que dites-vous de ce cavalier-là?

 

            le prince       Il est assez bien. Mais cette main-là, la main du peigne me paraît un peu contrainte et engourdie.

 

            arlequin       Engourdie? Cela est vrai. Vous y êtes, Monsieur, c’est que je l’ai peinte pendant l’hiver.[57]

 

            pasquariel    (Approchant sa main de la poche du cavalier peint) Monsieur le peintre, ce cavalier-là n’a rien dans sa poche?

 

            arlequin       C’est que c’est une poche à la mode. Dans les poches d’à présent il n’y a rien. (au Prince) Mais, Monsieur, je vais vous faire voir une feuille qui vous charmera. (Arlequin fait voir une autre feuille du paravent, où Colombine paraît avec un cavalier à ses genoux) Eh bien, que dites-vous de cette feuille-là?[58]

 

25        le prince       (Tout étonné) Ah, ciel! Que vois-je? Quel charme pour mon cœur! (regardant le portrait qu’il a au bras, et celui du tableau) C’est elle assurément.[59]

 

            arlequin       (Au Prince) Cette feuille-là est-elle de votre goût?

 

            le prince       Oh, Monsieur, je suis tout hors de moi. Cette feuille me charme. (à Prudent) Qu’en dites-vous, Monsieur Prudent?

 

            prudent         (À part voyant sa femme) Où s’est donc fourré ma carogne de femme? (il veut s’approcher du paravent)

 

            arlequin       (Repoussant Prudent) Ôtez-vous de là. Votre haleine gâterait tout. (au Prince) Voilà une feuille qui vous occupe trop; je vais vous en faire voir une autre qui ne vous plaira pas moins.

 

                                   (On ouvre une autre feuille du paravent. Colombine y paraît assise)

 

30        le prince       Une seconde fois?

 

            prudent         Encore?

 

            arlequin       (À Prudent, en lui montrant la tête de sa femme) Avouez, Monsieur Prudent, que voilà une bonne tête.

 

            le prince       C’est tout ce qu’il y a de plus beau au monde, et je vous prie de me laisser ces paravents-là.

 

            arlequin       Je le veux bien; j’en ferai d’autres à la dame qui me les avait commandés. Mais, Monsieur, ils seront chers.

 

35        le prince       Combien?

 

            arlequin       Deux mille écus.

 

            le prince       (En s’en allant) Monsieur Prudent, ayez soin de faire donner deux-mille écus à Monsieur (à Pasquariel) Pasquariel, fais apporter tout à l’heure ces paravents-là dans ma chambre.

 

            arlequin       (Courant après le Prince) Deux mille écus neufs, au moins. Neufs.

 

            le prince       Qu’on lui donne tout ce qu’il demande, il n’est point d’argent qui puisse payer ce que je viens de voir (il rentre)

 

40        arlequin       Je suis fâché de ne lui avoir pas demandé dix-mille francs (à Prudent). Ça, Monsieur Prudent, de l’argent?

 

            prudent         Mais, Monsieur le peintre, c’est n’avoir point de conscience! Deux mille écus un barbouillage? Fi!

 

            arlequin       Qu’appelez-vous un barbouillage? Mais écoutez, ne nous brouillons point, Monsieur Prudent, je sais comme on en doit agir. N’empêchez pas Monsieur le Prince de prendre mes paravents; et pour reconnaissance, je vous peindrai gratis dans un pot de chambre.

 

            prudent         Je vous prie, Monsieur, que je revoie encore une fois ces paravents avant qu’on les emporte; c’est toute la récompense que je vous demande.

 

            arlequin       Ne voulez-vous que cela? Vous allez être bientôt content. Allons, qu’on lève encore ces paravents.

 

                                    (On dresse les paravents de haut en bas, et l’on y voit une servante avec une botte de raves à la main)

 

45        prudent         (Étonné du changement) Qu’est-ce que cela?

 

            arlequin       C’est Madame Simone quand elle ratisse les navets. Mais je veux vous faire voir quelque chose de plus joli. (il déploie une autre feuille de paravent où est Mezzetin en flamand, fumant une pipe, avec un autre Flamand qui tient une flûte d’Allemagne à la bouche)[60]

 

            prudent         Voilà qui est fort drôle.

 

            arlequin       Oh, cela n’est rien. Mes figures s’animent quand je veux. Ecoutez.

 

            mezzetin       (Chante, et l’autre l’accompagne de la flûte)

                                               A Fanchon l’autre jour,

                                               voyant la peau si blanche e e e,

                                               je glissai, plein d’amour,

                                               ma main dedans la manche e e e,

                                               mais la Coquine

                                               dit, en faisant la froide mine,

                                               ah, fripon,

                                               cessez donc;

                                               c’est bien là qu’on badine e e e!

 

50        arlequin       (À Prudent) Avec ces paravents-là, on a quand on veut de la musique qui ne coûte rien.

 

            prudent         Rien au monde n’est plus surprenant.

 

            arlequin       Voyez celui-ci.[61]

 

                                    (On ouvre une autre feuille du paravent qui représente un voleur demandant la bourse à un abbé, le pistolet à la gorge)

 

            prudent         Voilà qui est terrible! Un homme qui en veut tuer un autre! (Prudent s’approche du paravent pour le voir de plus près. Dans le même temps, celui qui y est représenté le pistolet à la main saisit Prudent par la cravate, en lui demandant la bourse. Prudent crie, l’autre tire son pistolet, et finit le premier acte)

 

 

 

                  ACTE II

 

 

                                    SCÈNE I[62]

 

                                    Pasquariel, Mezzetin, Arlequin qui survient.

 

            pasquariel    (Pleurant) Ah, ah, ah, malheur, ah!

 

            mezzetin       Qu’as-tu donc tant à pleurer?

 

            pasquariel    Ah, mon pauvre Mezzetin, tu vois un homme bien affligé.

 

            mezzetin       Quand tu m’auras dit de quoi, je te consolerai.

 

5          pasquariel    Je suis inconsolable. Je n’avais crédit que dans un cabaret et le maître vient de mourir.

 

            mezzetin       Quoi? La mort d’un cabaretier te fait pleurer? Fi! Eh, tant mieux, morbleu, tant mieux. Ces coquins-là empoisonnent le vin tous les jours. Tant mieux, vous dis-je, tant mieux.

 

            pasquariel    (Toujours pleurant) Eh, mon ami, il y a cabaretier et cabaretier.

 

            mezzetin       J’avoue qu’il y a d’honnêtes gens dans toutes sortes de métiers, mais cela est rare; et d’ailleurs depuis, un certain temps ces messieurs-là se donnent des airs, ils portent des manteaux rouges. Tant mieux, morbleu, tant mieux.

 

            pasquariel    Quoi? Vous ne pleurerez pas?

 

10        mezzetin       Moi, pleurer? Ma foi, non; ma mère m’a fait en riant. Ah, ah, ah! (il rit)

 

            pasquariel    Et savez-vous bien qui est-ce qui est mort?

 

            mezzetin       Non, et je ne me soucie guère de le savoir. Ah, ah. (il continue de rire)

 

            pasquariel    Pourtant quand vous saurez que c’est Maître André...

 

            mezzetin       Quoi? Maître André, le pauvre Maître André est parti? Hi, hi! (il pleure)

 

15        pasquariel    Oui, il est parti, et je lui dois cent francs.

 

            mezzetin       Il faudra les payer.

 

            pasquariel    Assurément. Je les payerai à son retour. Mais ce qui me chagrine le plus, c’est que la pauvre femme est grosse.

 

            mezzetin       Grosse? Et de combien?

 

            pasquariel    De quatre enfants.

 

20        mezzetin       Tu veux dire de quatre mois. Mais comment est-il mort? Car j’ai bu ce matin avec lui. Lui aurait-on donné quelque coup d’épée, de pistolet, de canon, de couleuvrine?

 

            pasquariel    Hélas, non! Il est mort de sa belle mort, le verre à la main.

 

            mezzetin       Il est mort en galant homme.

 

            arlequin       (Entre en chantant et dansant, et se retrouvant au milieu de Pasquariel et de Mezzetin qui pleurent, après les avoir bien considérés, il pleure comme eux)

 

            mezzetin       (À Arlequin qui pleure) De quoi pleurez-vous, mon ami?

 

25        arlequin       Je vous le demande. Je pleure par conversation.

 

            pasquariel    (À Arlequin) Il est mort, et tu ne boiras plus.

 

            arlequin       Comment? Je ne boirai plus? Est-ce que le vin est mort? Eh bien, je boirai de l’eau de vie.

 

            mezzetin       Eh non, le vin n’est pas mort, mais un de tes meilleurs amis et des nôtres.

 

            arlequin       La mort de mon meilleur ami ne me fera pas boire une goutte de moins. Je me console des maux sans remède, moi. La mort est un mal sans remède, ergo je me console de la mort.

 

30        pasquariel    Oui, mais quand vous saurez que celui qui est mort s’appelle Maître André...

 

            arlequin       Hoimé! Quel coup de foudre! Maître André est mort? Hélas! Mes enfants, vous avez raison de pleurer la mort d’un si galant homme. Pleurons tous trois de compagnie, hi, hi, hi! (ils pleurent tous trois) Mais est-il enterré?

 

            mezzetin       Non, pas encore.

 

            arlequin       Il est mort, et il n’est pas enterré? (après avoir rêvé) Tout à l’heure je suis à vous. (il s’en va avec précipitation)

 

            mezzetin       La bouteille a bien perdu à cet homme-là; car il la buvait d’une haleine.

 

35        pasquariel    (Toujours pleurant) En mourant il disait: Adieu, Adieu, Mezzetin; adieu, Pasquariel.

 

            mezzetin       Oh! Cet homme-là avait du cœur comme un Cicéron, et il était vaillant comme un Démosthène. A-t-il laissé du vin dans la cave?

 

            pasquariel    Il en a laissé huit pièces.

 

            mezzetin       Il faudra aller les boire à sa santé.

 

            arlequin       (Revient, ayant trois manteaux noirs sur ses épaules, trois chapeaux noirs pointus sur sa tête, avec des crêpes trainant jusqu’à terre. Dans cet équipage il passe devant Mezzetin et Pasquariel en marchant gravement et, après avoir fait le tour du théâtre sans rien dire, il se campe au milieu d’eux, et leur faisant signe du doigt de garder le silence, il ôte son premier manteau qui est le plus long, et le met sur les épaules de Pasquariel, puis lui ôte sa toque et lui met à la place un des trois chapeaux noirs. Il fait la même chose à Mezzetin, de manière qu’après cela ils paraissent tous trois avec chacun un manteau noir, et un chapeau pointu sur la tête. Dans cet équipage, Arlequin tire trois papiers de sa poche, et en donne un à Pasquariel, un à Mezzetin, et garde le troisième pour lui)

 

40        pasquariel    (En prenant le papier) Qu’est-ce que cela?

 

            arlequin       (D’un ton dolent) C’est un tombeau.

 

            pasquariel    Que vous avez fait?

 

            arlequin       Oui. Sur la mort de Maître André.

 

            pasquariel    Et sur quelle clef l’avez-vous fait?

 

45        arlequin       Sur la clef de la cave. (à Pasquariel) Vous ferez la basse. (à Mezzetin) Vous la haute-contre; et moi je ferai le dessus.

 

            arlequin       (Chante sur le ton du deuil d’Alceste) Hélas, hélas, hélas! (après quoi il contrefait la flûte avec sa gorge sur le même ton. Ensuite tous trois ensemble reprennent) Hélas, hélas, hélas! (et ils s’accompagnent après, Arlequin en contrefaisant toujours la flûte, Mezzetin le théorbe et Pasquariel la basse; ce qui fait le plus plaisant et le plus comique de tous les concerts. Quand ils ont fini, Arlequin reprend seul) Hélas, hélas, hélas! Maître André ne vit plus. (ils l’accompagnent comme dessus, et après cet accompagnement, Arlequin continue de chanter) Il est mort, il est mort, et crédit pour nous trois est perdu.[63]

 

            tous trois     (Ensemble) Hélas, hélas, hélas! Maître André ne vit plus. (ils reprennent l’accompagnement et s’en vont en marchand l’un après l’autre, Arlequin à la tête)

 

 

                                    SCÈNE II

 

                                   Prudent, Pierrot.

 

            prudent         Viens ça, maraud, viens ça que je t’assomme.

 

            pierrot          Oh, parbleu, Monsieur, si vous voulez me battre, attendez donc que je n’y sois pas.

 

            prudent         Tu fais encore l’insolent?

 

            pierrot          Il vaudrait mieux vraiment se laisser manger la laine sur le dos! Oh, parbleu, Monsieur, si vous êtes mon maître, je suis votre valet, une fois. Je boirai et mangerai chez vous tant qu’il vous plaira, mais gare les coups; car je ne demande pas mieux que de me brouiller avec vous.

 

5          prudent         Je vois bien que je n’en aurai raison que par la douceur. Or sus, Pierrot, je ne veux plus gronder. Je suis malade, mon cher ami, mais d’un mal que tu peux seul guérir.

 

            pierrot          Ma foi, Monsieur, je suis assez ignorant sans être médecin. Point d’injure. Je vise pourtant assez droit quand je donne un lavement à mes chevaux. S’il ne faut que cela pour vous guérir, je vous aime encore assez pour en faire la dépense.

 

            prudent         Ce n’est pas les remèdes dont j’ai besoin. Ouf! De quel biais m’y prendre pour lui découvrir mon inquiétude?

 

            pierrot          En ami, n’auriez-vous point quelque javart encorné? Ce ne serait pas mal aux dents? Car, par le dernier compte que nous en avons arrêté ensemble, il ne vous en restait que cinq; encore vous fîtes-vous grâce d’une, qui menaçait ruine.

 

            prudent         Regarde-moi, Pierrot, et tâche à pénétrer...

 

10        pierrot          Franchement, je ne vois rien de trop bon dans votre personne. Mais comme tout y est mauvais, je ne sais quelle est la partie la plus affligée.

 

            prudent         Comment se porte ma femme?

 

            pierrot          Bon! Elle en enterrerait une douzaine comme vous.

 

            prudent         Que pense-t-elle de moi?

 

            pierrot          Eh, cousì, cousì.

 

15        prudent         Je ne t’entends pas.

 

            pierrot          Mais cousì, cousì veut dire: là, là.

 

            prudent         Je t’entends un peu moins que je ne faisais.

 

            pierrot          Quoi? A votre âge vous n’entendez pas que cousì, cousì, et làlà, veulent dire: hem, hem?

 

            prudent         Oh, pour ce dernier terme, je ne l’entends point du tout. Mais parlons d’autre chose. Je suis jaloux, Pierrot.

 

20        pierrot          Vous êtes pourtant assez vilain sans cela.

 

            prudent         Où est allée ma femme cette nuit?

 

            pierrot          Pas bien loin, Monsieur.

 

            prudent         La longueur du chemin ne fait rien à la chose, et l’on n’est pas moins cocu pour ne l’avoir été fait qu’à la porte.

 

            pierrot          Comme vous en parlez, il semble que vous n’ayez été autre chose toute votre vie.

 

25        prudent         Mais encore, où a-t-elle été?

 

            pierrot          Elle a été au bal, où était le jeune Prince, et elle y a dansé la mariée.

 

            prudent         Comment donc? La mariée devant tout le monde?

 

            pierrot          Dame! Je ne sais pas comme vous l’entendez, mais tenez: on se prend d’abord par les mains, après on se tourne le dos, on se rapproche, on court l’un après l’autre, on se balance ici, on se tourne de ce côté-là. (il le fait danser, et le pousse à terre) Tenez, demandez-lui, la voilà qui vient.

 

 

                                   SCENE III[64]

 

                                   Prudent, Colombine, Pierrot.

 

            prudent         Ah, vous voilà! C’est une chose pour moi si nouvelle que de vous voir, qu’il m’est permis de me récrier, quand je suis assez heureux, au bout de trois semaines, de vous rencontrer dans la maison. Mais où alliez-vous? Je gage que vous ne me cherchiez pas?

 

            colombine    Il est vrai que j’étais si peu inquiète de vous voir que, cherchant un remède à ma migraine, j’évitais tous les objets qui pouvaient l’entretenir.

 

            pierrot          Dame! Voilà ce qui s’appelle être de bonne foi, cela!

 

            prudent         Vous êtes bien piquante aujourd’hui, et vous mériteriez... Suffit. Je commence à m’ennuyer, et vos brusqueries ne me divertissent point.

 

5          colombine    Est-ce que je prends quelquefois soin de vous divertir? En vérité, vous n’y songez pas. Si vous voulez, pourtant, je vous dirai que je suis bien aise de vous voir.

 

            pierrot          (À Prudent) Courage, Monsieur, courage.

 

            prudent         Ouais! Je joue un mauvais personnage. Petite mignonne, ma mie, ne m’échauffez pas la bile. Je pourrais m’emporter à des violences dont vous auriez tout le loisir de vous repentir.

 

            pierrot          (À Prudent) Bon! Vous commencez à devenir vigoureux. Courage, Monsieur, courage.

            colombine    En vérité, vous me faites pitié, et je fais si peu de cas de vos menaces, que je n’ai pas seulement la force d’y répondre.

 

10        prudent         J’aurai celle de vous faire connaître qui je suis.

 

            colombine    Attendez-donc que je prenne une chaise pour vous écouter. Pierrot, un fauteuil!

 

            pierrot          Morbleu, qu’elle a d’esprit! (à Prudent) Vous avez beau dire, Monsieur, avec votre permission, vous ne ferez jamais qu’une bête au prix d’elle.

 

            prudent         C’est apparemment pour vous délaisser des fatigues de cette nuit...

 

            colombine    Je ne crois pas que nous nous soyons assez nécessaires l’un à l’autre pour m’assujettir à me rendre chez vous à l’heure que vous vous y rendez; et d’ailleurs, c’est que j’aime à prendre l’air et que celui de la maison me fait mal.

 

15        prudent         À force de prendre l’air, vous devenez bien éventée, et je ne suis pas content...

 

            colombine    Eh bien, qui vous prie de l’être? Me voyez-vous travailler à mériter vos applaudissements? Je ne vois rien de plus inutile ni di plus fastidieux qu’un mari, quand il veut entrer dans le petit détail de sa femme.

 

            pierrot          En effet, un mari ne doit se mêler que du gros du ménage, c’est à dire de faire venir l’argent à la maison, et la femme de le dépenser.

 

            prudent         S’il n’y allait que de votre réputation, je laisserais volontiers flotter la barque. Mais, vertu de ma vie, c’est mon honneur que vous jouez quand vous effleurez le vôtre, et vous ne sauriez si peu y toucher qu’il ne paraisse au mien.

 

            colombine    Vous vous moquez, Monsieur, vous vous moquez. Et qui voudrait, je vous prie, me tenir jeu, si je n’avais que votre honneur à risquer? C’est une pièce qui n’est pas de poids, quoi que bien trébuchante.[65]

 

20        prudent         Mais ne savez-vous pas que la liaison étroite qu’il y a entre l’homme et la femme...

 

            colombine    Mais ne savez-vous pas qu’un homme qui se mêle de contrôler joue un fort mauvais personnage auprès d’une femme, et qu’on ne saurait si peu lui échauffer la tête qu’il ne paraisse à celle du mari?

 

            pierrot          Ah! Vous voilà dedans. Ma foi, Monsieur, vous méritez bien ce que vous devez être.

 

            prudent         Ah, petite tigresse, que vous profitez bien de la faiblesse que j’ai pour vous! Allons, n’en parlons plus. Mets là ta main, faisons la paix, caresse un peu ton petit mari.

            colombine    Mais de quoi vous plaignez vous? Je ne connais pas de femme plus réglée que moi. Je joue, je vais au bal, aux comédies, aux promenades: bienheureux les maris dont les femmes s’en tiennent à l’innocence de ces plaisirs-là! Je vous aime véritablement, non pas à la vérité avec ces emportements de jeunesse qui ne peuvent être un moment absents de l’objet aimé; car je demeurerais fort bien un an, et deux, sans vous voir; mais mon amitié est de la bonne trempe, c’est à dire comme les gens qui, quoi qu’ils aiment le vin, ne laissent pas d’y mettre un peu d’eau. Enfin, Monsieur, je vous aime comme les vieilles médailles, dont les curieux enrichissent leurs cabinets. Adieu, mon petit mari. (elle s’en va)

 

25        prudent         Ah! Maudite vieillesse! À quoi m’exposes-tu? Mais que nous veut ce facteur?

 

            un porteur

            de lettres    (Présentant une lettre à M. Prudent) Ça, trois sols.

 

            prudent         (Donnant trois sols, et prenant la lettre) Tenez (le porteur s’en va) C’est une lettre de mon gendre, Monsieur de Pommenville, que j’attends aujourd’hui. Il vient pour épouser ma fille. Voyons. (il lit)

 

                                    «Monsieur mon beau-père (car ne vous en déplaise il faut que vous le soyez), je prends la commodité des chasse-marées pour vous aller voir promptement et embrasser, chemin faisant, ma future épouse. Je ne sais pas encore si je pourrai l’aimer, car on dit qu’elle vous ressemble; et comme vous êtes très laid, j’aurais là un fort vilain magot de femme. Mais comme j’ai un singe plus laid que vous, que j’aime cependant beaucoup, je ne désespère pas qu’elle ne me plaise autant que lui. Ne manquez pas de me faire trouver du vin prêt à mon arrivée, car je suis toujours fort altéré, surtout depuis que je sais que vous en avez de bon en cave, et que votre fille en a la clef. Sans un mal de ventre qui m’oblige de temps en temps à quitter cette lettre, je vous en écrirais davantage; je souhaite qu’ainsi soit de vous. Je suis, Monsieur mon beau-père, votre gendre,

                                   Pommenville»[66]

 

            prudent         Je m’en vais porter cette nouvelle-là à ma fille. (il s’en va)

 

 

                                    SCÈNE IV

 

                                   Pierrot, Pasquariel.

 

            pierrot          Ah, te voilà, Pasquariel! Eh bien, que dis-tu du petit régal que je t’ai donné? Quand Pierrot traite ses amis, comment en agit-il?

 

            pasquariel    A merveille, et je te suis obligé autant qu’un bon déjeuner peut obliger un homme comme moi. Comment diable vous régalez!

 

            pierrot          Eh! Que dites-vous de ce vin?

 

            pasquariel    Eh, je le garantis véritable vin de Côte Rôtie.[67]

 

5          pierrot          Bon! Je vous le livre, moi, pour véritable vin de Côte Bouillie.[68]

 

            pasquariel    Parbleu, que j’ai le plaisir de prendre demain ma revanche. J’ai un saucisson de Boulogne de cette taille (il mesure son bras) et jamais vous n’en avez mangé de si fin. Je vous arrête à déjeuner demain.

 

            pierrot          Demain? Je ne le puis, car il est jour de dépêche.[69]

 

            pasquariel    Comment? Est-ce que vous servez tout à la fois de suisse et de secrétaire?[70]

 

            pierrot          Oui, j’ai un commis qui écrit les lettres, et moi je les porte à la poste. C’est que je suis un peu brouillé avec l’alphabet.

 

10        pasquariel    Je vous entends. Mais à propos de lettres, en voici une qu’il faut que tu fasses passer entre les mains de ta maîtresse Angélique.

 

            pierrot          Qui est-ce qui lui écrit?

 

            pasquariel    C’est Léandre. Je crois qu’elle est remplie de sentiments bien sensitifs; car depuis que je l’ai dans ma poche, elle ne fait que me chatouiller la cuisse. Aussi ne fait-il que soupirer et pleurer.

 

            pierrot          (Prenant la lettre) Donne. Va, je te promets qu’elle l’aura. Morbleu, qu’elle va pétiller! Elle l’aime, oui. Et pourquoi ma petite ne m’aime-t-elle pas de même? Que je serais aise!

 

            pasquariel    Est-ce que tu as une maîtresse aussi, toi?

 

15        pierrot          Je le crois! Mais elle est diablement rétive.[71]

 

            pasquariel    Rétive? Tu es donc amoureux de quelque vieille mule?

 

            pierrot          Oh non; c’est qu’elle ne veut pas tout ce que je veux. Mais je lui ai fait écrire une lettre par mon commis pour la faire gourmandiller.[72]

 

            pasquariel    Tu as bien fait. Or sus, songe à parler à Mademoiselle Angélique. Adieu. Mais la voici.

 

 

                                   SCÈNE V

 

                                   Angélique, Pasquariel, Pierrot.

 

            angélique     Ah, Ah, Pasquariel! Quel bon vent t’amène ici?

 

            pasquariel    Hélas, Mademoiselle, c’est un vent du levant, qui tire au couchant.[73]

 

            angélique     (À Pierrot) Que veut-il dire? Je ne l’entends point.

 

            pierrot          Quoi, mademoiselle, vous n’entendez pas les termes venteux?

 

5          angélique     Non, je t’assure.

 

            pierrot          Moi qui ai été sur la mer à Corbeil, je vais vous les expliquer. Le vent du levant qui va droit au couchant, c’est ce qui fait tout d’abord enfler les voiles, et le vent du couchant, c’est ce qui les fait désenfler. Or, quand le vent d’Aquilon vient à la traverse, les tourbillons s’élèvent, l’orage commence... le... savez-vous ce que c’est que le vent d’Aquilon?[74]

 

            angélique     Non, encore une fois, je ne connais aucun vent.

 

            pierrot          Tant mieux, vous les allez connaître tout à l’heure. Le vent d’Aquilon, c’est un vent qui est tout comme votre père, un vieillard cassé, qui ne cherche qu’à traverser le levant et le couchant, le... tant y a que je m’entends bien. Mais voici la carte marine qui vous dira de quel côté vient le vent. (il lui donne la lettre)

 

            angélique     Il faut que je sois bien bonne pour écouter toutes tes folies! Voyons. (elle prend la lettre)

 

10        pasquariel    C’est une lettre de Monsieur Léandre.

 

            angélique     Une lettre de Léandre? De celui que j’aime plus que ma vie? Que je suis heureuse! Et Pasquariel en est le courrier?

 

            pasquariel    Oui, Mademoiselle, je suis le postillon, et Pierrot est le cheval.[75]

 

            angélique     (Donnant un diamant à Pasquariel) Tiens, voilà pour le postillon.

 

            pierrot          Et le cheval n’aura-t-il rien? (il hennit)

 

15        pasquariel    Que fais-tu là, coquin?

 

            pierrot          C’est que je sens mon avoine.

 

            angélique     Tais-toi, Pierrot, ce que je te garde te fera plaisir; voyons ce que me mande mon cher Léandre. (elle lit)

 

                                   «Je vous écris ces mots pour vous dire que je ne vous aime point, et que je vous abandonne pour toujours» (vers Pasquariel) Qui t’a donné cette lettre?

 

            pasquariel    Léandre.

 

            angélique     Léandre? (elle continue de lire) «Quand je feignais de vous aimer, ce n’était pas le cœur qui parlait». Ah, ciel! Le traître! (vers Pasquariel) Et tu m’assures que cette lettre vient de Léandre?

 

 

                                   SCÈNE VI

 

                                   Léandre, les acteurs de la scène précédente.

 

            léandre        (Une lettre à la main) Oui, Madame, la lettre que j’ai commise à la fidélité de Pasquariel est une copie de celle que je vous apporte moi-même et que je n’ai osé vous envoyer, parce que si Monsieur votre père l’avait surprise, connaissant mon caractère, il aurait aisément deviné qu’elle venait de moi. En voici l’original. (il présente une lettre à Angélique)

 

            angélique     Et tu me l’oses dire en face, perfide? Tiens, voilà pour l’original. (elle lui donne un soufflet et s’en va, en lui jetant sa lettre au nez)

 

            léandre        (Étonné) Qu’est-ce que cela?

 

            pasquariel    C’est un soufflet original, et rien plus.

 

5          léandre        (Vers la cantonade) Un soufflet à qui t’adore? Que veut donc dire ceci?[76]

 

            pierrot          Cela veut dire, Monsieur, qu’après le soufflet, gare les coups de bâton.

 

            léandre        Mais voyons un peu. (il ramasse la lettre, et lit) «Je vous écris ces mots pour vous dire que je ne vous aime point, et que je vous abandonne pour toujours.» Cruelle! Tu m’abandonnes? C’est donc ainsi que tu reconnais les tendres sentiments avec lesquels je t’ai tant de fois expliqué mon amour? (il continue de lire) «Quand je feignais de vous aimer, ce n’était point le cœur qui parlait.» Ce n’était point le cœur qui parlait?

 

            pasquariel    Cela se peut. C’était peut-être la fressure.[77]

 

            léandre        Elle me trompait donc, la cruelle? Et son cœur était d’intelligence avec sa bouche pour me rendre le plus malheureux de tous les hommes? Mais quelle est sa pensée? Croit-elle que je laisserai mon rival tranquille possesseur d’un bien qui n’est dû qu’à la sincérité de mon amour? Non, non, perfide! (il tire l’épée) Ce fer me vengera bientôt de ton infidélité, et ton perfide amant ne triomphera pas longtemps de ton cœur.

 

10        pierrot et

            pasquariel    (En riant) Il se va battre contre la porte. Ah, ah, ah!

 

            léandre        Quoi, insolents, vous riez de mon malheur? Ah, je vous apprendrai...

 

            pierrot          Miséricorde! Ce n’est pas moi.

 

            pasquariel    Ni moi non plus, Monsieur. Prenez garde de percer mon bonnet.

 

            léandre        Mais où m’emporte une aveugle colère? Poursuivons. (il lit le reste de la lettre) «Quand je feignais de vous aimer, ce n’était pas le cœur qui parlait, mais j’aimais vos fricassées de poulet.» Oh, oh! Voilà un style qui me surprend.

 

15        pasquariel    (D’un ton fâché) Est-ce que je t’ai donné des fricassées de poulet, moi? Sauvons-nous. (il s’enfuit)

 

            pierrot          (Fouillant dans ses poches) Eh non, non, écoute. Ah, malheureux! Qu’ai-je fait?

 

            léandre        (Toujours lisant) «Je vous quitte donc pour une charcutière. Il est vrai qu’elle n’a que cent francs en mariage, mais on ne peut pas avoir une plus belle main pour saler un cochon, et faire du boudin et des andouilles. C’est pourquoi je l’ai jugée digne de mon amour, et je suis, ou la peste vous crève, tout à vous, Pierrot, dit L’Emporté[78]

 

            pierrot          (À genoux) Monsieur, j’ai fait un qui pro cro. J’ai donné ma lettre pour la vôtre.[79]

 

20        léandre        Coquin! Tiens, voilà pour t’apprendre... (il lui donne un soufflet)

 

            pierrot          (Après avoir reçu le soufflet, s’en va en disant) Cela est juste.

 

 

                                   SCÉNE VII

 

                                    Le théâtre représente un bois, et un gros rocher au milieu.

 

                                    Le Prince, Pasquariel, Arlequin caché derrière le rocher, faisant l’écho.

 

            le prince       Oui, sans doute, le sort s’obstine à me cacher

                                    cet objet qu’en tous lieux mon amour va chercher.

                                   Quelquefois, ennuyé d’une recherche vaine,

                                   le dépit vient s’offrir pour soulager ma peine,

                                   et d’un bizarre amour veut condamner l’erreur,

                                   par les secrètes voix qu’il élève en mon cœur.

 

            pasquariel    Monsieur...

 

            le prince       Etrange état d’un cœur dont l’amour se rend maître!

                                   À peine en mes transports ose-je me connaître;

                                   tu triomphes enfin, Amour, et de tes traits,

                                   pour faire sur un cœur une épreuve cruelle,

                                   tu ne pouvais choisir jamais

                                   une victime moins rebelle.

 

            pasquariel    Monsieur...

 

5          le prince       Je sais qu’en tes projets rien ne peut t’échapper,

                                   ni se parer des coups dont tu veux nous frapper,

                                   mais au moins tu devrais ménager ta victoire,

                                   et ne te pas d’abord épuiser sur un cœur

                                   qui sans peine se rend facile à ton ardeur.

                                   Un triomphe en amour perd beaucoup de sa gloire,

                                   quand il est acheté si peu par le vainqueur.[80]

 

            pasquariel    Je voudrais donc vous dire, Monsieur...

 

            le prince       Ah! C’est toi mon pauvre Pasquariel! Mais laisse-moi rêver un moment à l’objet que j’adore.

 

            pasquariel    Quoi donc? C’est tout de bon que vous êtes amoureux? Hélas! Je crois l’être aussi.

 

            le prince       En vain pour flatter ma faiblesse,

                                   je me persuade à mon tour,

                                   que de tout ce qui voit le jour

                                   rien ne peut être exempt de l’ardeur qui me presse

                                   oui, si le sort un jour faisait venir ici,

                                   cette aimable beauté dont je tiens la peinture,

                                   insensibles témoins du tourment que j’endure,

                                   bois, prés, fontaines, fleurs, vous aimeriez aussi.

                                   Comment finir cette aventure?

                                   Quel parti prendre en ces moments?

                                   Qui peut me consoler? La raison ou le temps?[81]

 

10        arlequin       (Dans la grotte, faisant l’écho, répète)          Temps.

 

            pasquariel    Je crois que l’écho se mêle ici de vos affaires! Il faut qu’à mon tour je l’interroge. (il se tourne vers le rocher)

                                   Pour soulager l’amour dont mon jabot déborde,

                                   Quel prix dois-je espérer que ma Philis m’accorde,[82]

 

            arlequin                                                                   La corde

 

            pasquariel    La corde? Voilà un méchant meuble pour se mettre en ménage!

 

            le prince       Je le connais trop bien, tout est sourd à mes vœux;

                                   l’écho refuse encore de répondre à mes feux,

                                   et ne trouvant plus rien qui ne me soit contraire

                                   du bonheur que j’attends mon amour désespère.

 

15        arlequin                                                                  Espère.

 

            pasquariel    Voilà pourtant quelque chose d’assez bon. Voyons un peu s’il se rendra plus traitable pour moi. (à l’écho)

                                    Cet amour qui saisit ma raison au collet,

                                    doit-il à la fin me mener?

 

            arlequin                               Au gibet.

 

            pasquariel    Voilà un fils de putain d’écho qui enrage de parler.

 

            le prince       Parmi tant de transports dont mon âme est émue,

                                   comment pourrais-je voir cette belle inconnue?

 

20        arlequin                                                                  Nue.

 

            pasquariel    Parbleu, Monsieur, nous n’aurons pas la peine de la déshabiller. Mais vous ne savez peut-être pas où vous êtes? Ce bois est gardé par une Pépie.

 

            le prince       Que veux-tu dire avec ta Pépie? Une Pythie, peut-être.

 

            pasquariel    Pythie ou Pépie, c’est la même chose. Mais auparavant, je vais vous faire parler à un magicien. Voyez-vous ce rocher? C’est ce qui défend l’entrée à la grotte.

 

            le prince       Mais que me dira-t-il?

 

25        pasquariel    Il vous fera voir ce que vous aimez et vous dira votre bonne aventure.

 

            le prince       Si cela est, Pasquariel, je te devrai la vie. Par où faut-il aller?

 

            pasquariel    Avant d’aller nulle part, sachons s’il est dans la grotte. Je m’en vais l’appeler.

 

            le prince       Tu me feras plaisir.

 

            pasquariel    (Frappant à la grotte) Holà, ho, ho?

 

30        arlequin       (Mettant la tête hors du rocher) Farfadet? Belzebuth? N’y a-t-il point là quelque diable oisif pour emporter ces messieurs-là?[83]

 

            pasquariel    Eh, Monsieur, il n’est pas nécessaire. Nous voudrions bien vous parler.

 

            arlequin       (Sortant habillé en magicien, une baguette à la main) Qui est le mortel audacieux qui vient troubler ici les mystères ténébreux de la Triple Hécate? (à part) Mezzetin m’a dit qu’avec cette baguette je ferais venir tous les diables. J’ai une peur que je n’en puis plus.[84]

 

            pasquariel    Signor mago?

 

            arlequin       Ah, Magot vous-même. Je ne sais qui me tient que je ne te change en une cruche.[85]

 

35        le prince       Vous me voyez ici, Seigneur...

 

            arlequin       Je voudrais que vous fussiez déjà bien loin. Vous m’avez fait répandre un demi-muid de philtre amoureux, et vous êtes cause que la femme d’un procureur ne payera de l’année un jeune Mousquetaire qu’elle aime à la folie.[86]

 

            pasquariel    Monsieur, nous voulons savoir de vous, en conscience, si vous êtes aussi diable que vous êtes noir.[87]

 

            arlequin       Comment, morbleu, si je suis habile homme? Je suis un abrégé et un compendium de la plus fine diablerie; je lis à livre ouvert dans le passé, je connais le présent, et je ne sais rien de l’avenir.

 

            pasquariel    Et moi aussi.

 

40        arlequin       Je suis petit-fils de Médée, frère de Circé, cousin germain d’Urgande, et oncle à la mode de Bretagne, d’Armide et de la Jobin.[88]

 

            pasquariel    Diable! Belle parenté!

 

            arlequin       Je sais l’usage de toutes les divinations, prédictions, évocations, invocations, imprécations et indigestions.

 

            le prince       Je suis persuadé...

 

            arlequin       Je conjure en cent manières les démons, les larves, les farfadets, les lutins, les follets, les fées, les salamandres, et les petits collets.[89]

 

45        le prince       J’en ai beaucoup de joie, mais...

 

            arlequin       Je compose les talismans, les anneaux magiques, la pistole volante, la main de gloire et la baguette de Vulcain, si utile aux comédiens italiens.[90]

 

            le prince       Ecoutez-moi...

 

            arlequin       Je vois le destin de l’homme à sa physionomie; je regarde dans la main, sur le front, au pied et dans la poche.

 

            pasquariel    Mais finissez donc.

 

50        arlequin       Enfin, je suis le président du sabbat, le conseiller du diable, l’avocat des sorciers, le procureur des magiciens; je suis le centre et la circonférence, le commencement et la fin, la partie et le tout, le simple et le composé, le verbe et l’adverbe, le substantif et l’adjectif, et la moutarde après-diner.

 

            le prince       Enfin, Monsieur, voulez-vous bien nous donner le loisir de vous parler?

 

            arlequin       Très volontiers. Voulez-vous vous faire aimer du sexe? J’ai un secret merveilleux pour cela.

 

            le prince       Apparemment que vous en avez fait l’épreuve?

 

            arlequin       Belle demande! Tel que vous me voyez, j’ai usé quarante-six femmes, mais usé, que les cordes y paraissent; et je suis après à expédier la quarante-septième. Mais parlons d’autre chose. Vous êtes amoureux, sans doute, et je m’aperçois que vous avez de l’inquiétude de ne point découvrir celle que vous aimez? Vous jouez assurément de malheur, car rien n’est aujourd’hui de moins rare ni à plus juste prix qu’une femme.

 

55        le prince       Ah! Puisque vous avez découvert la raison qui m’amène, de grâce travaillez à me rendre heureux.

 

            arlequin       Oh! Il y a plus d’affaires que vous ne pensez. Mais pour en venir au bout, je vais invoquer un diable de mes amis avec qui je vais faire le diable à quatre. N’ayez point peur au moins.

 

            le prince       Je ne crains que le malheur de n’être point aimé.

 

            pasquariel    (Tremblant) Ah, Monsieur, ne l’appelez pas, j’ai peur.

 

            arlequin       (Tremblant aussi) N’ayez pas peur, si vous voulez. Un grand nigaud comme vous avoir peur! Fi!

 

60        le prince       (À Arlequin) Mais, Monsieur, il me semble que vous tremblez?

 

            arlequin       Cela est vrai, mais je tremble de froid, moi.

 

            pasquariel    (Effrayé) Ah Monsieur! Le Diable, derrière vous. Hoimé!

 

            arlequin       (Tout effrayé, tournant autour de lui) Ah! Je suis mort! Miséricorde! Y est-il encore? Le voyez-vous?

 

            pasquariel    (Prenant la queue du manteau d’Arlequin) Ah, ce n’est rien, Monsieur, ce n’est rien. C’est la queue de votre manteau.

 

65        arlequin       (Rassuré) L’animal, qui a peur d’une queue! Ça je m’en vais commencer la congélation. (il fait plusieurs cercles en courant tout autour du théâtre, et puis s’arrêtant au milieu, il dit)

                                   Démons, rôtis-brules, traînés parmi la cendre,

                                   Quittez vos grils et vos réchauds,

                                   Et venez promptement m’entendre;

                                   Vous humerez ici des zéphires bien moins chauds.

 

                                   (À Pasquariel) Voyez-vous quelque chose?

 

            pasquariel    Non, Monsieur.

 

            arlequin       Tant mieux. (il continue)

 

                                   Accourez à ma voix, vous que, mal à votre aise,

                                   On voit fumer comme un jambon...

 

            pasquariel    Des jambons? Ah que cela est bon! Appelez, appelez du jambon, je l’aime, moi.

 

            arlequin       Et dont Messire Pluton

                                    Fait des grillades sur sa braise

 

70        pasquariel    Des grillades? Ah! La bonne chose! (il ouvre sa bouche toute grande)

 

            arlequin       Quelle gueule! Il avalerait le gril avec les grillades. Si tu m’interromps encore une fois, je te mettrai six diables dans le ventre. (il continue)

 

                                   Pour toi, Dieu des enfers, noir comme un ramoneur,

                                   je te demanderais volontiers ta présence.

                                   Mais si, dans tes états, le diable suborneur

                                   sait des pauvres maris mettre à profit l’absence,

                                   aussi bien qu’il le fait en France,

                                   je ne répondrais pas, ma foi, de ton honneur.

 

                                   (Il frappe de sa baguette, et il sort des ailes du théâtre quatre démons dansants et un démon qui chante)

 

            arlequin       (Les voyant, se recule en tremblant) Hoimé! Mezzetin m’a trompé.

 

            le dÉmon       (Chantant, vers Arlequin)

                                                Jusqu’au fond des enfers, ta voix s’est fait entendre,

                                               il répond à tex vœux, tu peux tout entreprendre.

 

            le prince       (À Arlequin) Seigneur, puisque l’enfer vous favorise, découvrez-moi mon aimable maîtresse.

 

75        arlequin       (Un peu rassuré) Démon, par le pouvoir que j’ai sur toi (si tant y a que je n’aie, car je n’en sais rien), je t’ordonne de découvrir à ce gentilhomme ce qui s’oppose à ses desseins.

 

            le démon       (Chante s’adressant à Octave)

                                               La belle qui t’engage

                                               Est au pillage;

                                               Un époux en fait ses choux gras.

                                               Mais ne perds point courage,

                                               Car d’un si charmant avantage

                                               L’époux toujours ne jouit pas.

 

            le prince       Que je suis affligé de ce que je viens d’entendre! Ma maîtresse est donc mariée?

 

            arlequin       Oui, mais c’est quand il y fait bon. Une femme mariée est comme une maison dont le propriétaire n’occupe que le plus petit appartement, et où cependant toutes les grosses réparations se font sur son compte.

 

            le prince       Mais, Monsieur, ne pourrais-je pas la voir?

 

80        arlequin       Volontiers. Allons, Esprits, qu’on m’obéisse. Comment? Tout est sourd à mes commandements? Le Diable a bien de la peine à venir à bout de l’esprit d’une femme!

 

            le prince       Mais, Monsieur, que faudrait-il faire pour cela?

 

            arlequin       Il faudra que votre bourse fasse les frais de votre curiosité: il faut de la pécune, il faut de l’huile.

 

            le prince       Oh, qu’à cela ne tienne, voilà ma bourse, où vous trouverez cent pistoles.

 

            arlequin       Et voilà votre maîtresse. Admirez comme ce métal agit promptement. (le rocher s’enfonce, et on voit Colombine nonchalamment couchée sur un lit de gazon)

 

85        le prince       Ah, ciel! La voilà! Je la reconnais au trouble que sa présence excite dans mon cœur.

 

            arlequin       Dépêchez-vous de la voir, car elle a à faire; il faut qu’elle aille rendre une médecine.

 

            le prince       (S’approchant de Colombine) Serais-je assez heureux pour... (le rocher remonte et cache Colombine) Mais que vois-je? Elle est déjà disparue?

 

            arlequin       Dame! Voilà tout ce que vous pouviez espérer pour vos cent pistoles.

 

            le prince       Faites-moi connaître du moins le sort que doit avoir mon amour.

 

90        arlequin       Oh, ce n’est pas là mon affaire: il faut que chacun se mêle se son métier. Mais je m’en vais vous faire consulter une Pythie.

 

            pasquariel    Qu’est-ce que c’est, Monsieur, qu’une Pipie?

 

            arlequin       La Pythie? La Pythie n’est autre chose... que... Mais je vous trouve bien insolent de m’interroger!

 

            le prince       Monsieur, ne prenez pas garde à ce que dit mon valet, c’est un balourd, et je vous fais excuse pour lui.

 

            arlequin       Ce n’est pas que je ne sache fort bien que la Pythie est la parente d’Apollon, mais...

 

95        pasquariel    Le poêlon? Parente du poêlon?

 

            arlequin       Parente du diable qui t’emporte. Apollon, et non pas un poêlon.

 

            pasquariel    Ah, Ah! Et qu’est-ce que c’est, Monsieur, qu’Apollon?

 

            arlequin       (D’un ton fâché) Apollon est le frère de la sœur, qui avait épousé le cousin du beau-frère de la tante, dont l’oncle... Apollon est Apollon. Que diantre venez-vous me lanterner les oreilles? J’ai d’autres choses à penser qu’à la géographie d’Apollon. Ecoutez, je m’en vais l’évoquer. (après avoir fait plusieurs tours sur le théâtre et quantité de postures plaisantes, il dit)

 

                                   Puissant Dieu de ménestriers,

                                   Dieu de la gent mâche-lauriers,

                                   gent chez qui Madame Indigence

                                   fait ordinaire résidence,

                                   qui souvent, pour ne rien avoir,

                                   déjeune à huit heures du soir;

                                   grand papa de la médecine,

                                   Dieu de l’art qui nous assassine,

                                   père du serpent forcené

                                   qui mit en vogue le séné,

                                   franc goyer de neuf jouvencelles,

                                   toi qui, dans ce siècle pervers,

                                   grades les uniques pucelles

                                   qui soient peut-être en l’univers,

                                   viens apprendre à ta prophétesse,

                                   (la Pythie sort de dessous le théâtre)

                                   qui dessus son trépied se dresse,

                                   ce que tu as lu ce matin

                                   dans le grimoire du destin.

                                   (à la Pythie) Et toi, vieille et laide carcasse,

                                   chez qui le grand dieu du Parnasse

                                   s’insinue je ne sais comment,

                                   et te cause plus de colique

                                   que ne ferait un lavement

                                   avec douze grains d’émétique,

                                   réponds-moi pour ce jouvenceau,

                                   qui pleure d’amour comme un veau,

                                   à quoi le destin le destine,

                                   et si cet amoureux transi

                                   peut espérer de Colombine

                                   le don d’amoureuse merci?[91]

 

            le prince       Mais, Seigneur, elle ne répond rien?

 

100      arlequiin      Je connais l’enclouure. N’auriez-vous point encore quelque bourse?[92]

 

            le prince       Non, mais peut-être mon valet... (à Pasquariel)

 

            pasquariel    Oui, Monsieur. (il fouille dans toutes ses poches) Voilà une petite pièce.

 

            arlequin       Maraud! Est-ce là une femme à petites pièces? Garde-la pour acheter des tripes.

 

            le prince       Seigneur, excusez la sottise de mon valet.

 

105      arlequin       Vous êtes trop galant homme; et à cause de votre bon naturel, je m’en vais la faire parler gratis. (aussitôt on entend un bruit de trompettes et de tambours, et la Pythie, descendant de dessus son trépied, chante)

 

                                               Renonce à ta folle envie,

                                               un autre est allé devant,

                                               mon enfant.

                                               Quant aux pieds de ta Sylvie

                                               tu passerais cinquante ans,

                                               par la vertu, tu, tu, tu, de ma vie,

                                               tu n’en casserais que d’une dent.[93]

 

            pasquariel    (Imitant l’air de la Pythie)

                                               Io vorrei ben, Madama,

                                               esposar Olivetta, ta, ta, ta.

                                               Ma quando sarà ma fama,

                                               sarà-t-ella coquetta?

                                               Par la merci, ci, ci, ci, de mon amor

                                               je lui casserai bien la testa

 

            la pythie       (À Pasquariel)

                                   Tu fais l’homme d’importance,

                                   et tu n’es qu’un grand coquin, faquin.

                                   Prends garde qu’une potence

                                   ne finisse ton destin,

                                   et qu’un bâton, ton, ton, ne te relance,

                                   et n’époussette ici ton casaquin.[94]

 

                                    (Les trompettes et les tambours reprennent le même air. La Pythie danse et finit le second acte)

 

 

 

                                    ACTE III

 

 

                                    SCÈNE I

 

                                   Le Prince, Prudent.

 

            le prince       Oui, le dessein est pris, il faut enfin que mon amour éclate, et je veux l’avouer moi-même à mon gouverneur. Le voici fort à propos. (il se promène à grands pas, en disant:) Hélas!

 

            prudent         Voici le Prince. Qui peut l’agiter ainsi?

 

            le prince       (Prend Prudent par la manche, et puis le repousse) Non, il vaut mieux mourir que de faire un tel aveu.

 

            prudent         Donnez-vous en bien de garde, il vaut mieux parler que de mourir. Je gage que vous êtes amoureux?

 

5          le prince       A quoi voyez-vous cela?

 

            prudent         Bon! Il n’y a rien de plus facile à connaître.

 

            le prince       Oui, je le suis, et plus que vous ne sauriez penser. Rien n’égale ma passion; et par un charme inévitable, que je n’ai pas la force de repousser, je me sens emporté loin de moi.

 

            prudent         Ces empressements ne dureront pas. L’amour des jeunes gens est comme un vapeur de vin qui trouble d’abord la raison et qu’une heure de sommeil dissipe.

 

            le prince       Ah, ne vous y trompez pas, je l’aimerai toute ma vie. Mais un point m’embarrasse. On la dit mariée, et je crains que sa vertu...

 

10        prudent         Bon! Voilà de bonnes raisons! La vertu dans ce siècle est un monstre que les femmes n’osent regarder de peur que leur fruit n’en soit marqué. Mais dites-moi qui elle est, que j’aille la chercher.

 

            le prince       Vous n’irez pas bien loin. La voici (il lui montre le portrait de Colombine)

 

            prudent         (À part) A, Ciel! C’est le portrait de ma femme. Je m’en doutais bien. Mais n’importe, dissimulons.

 

            le prince       Avouez, mon cher Monsieur, que vous n’avez jamais rien vu de plus beau.

 

            prudent         (À part) Ni de plus méchant.

 

15        le prince       (Baisant le portrait) Que ne puis-je t’animer par mes soupirs!

 

            prudent         Eh, fi, fi! A quoi vous amusez-vous-là? (à part) La carogne!

 

            le prince       Que je l’aimerai, Monsieur Prudent!

 

            prudent         (À part) Ah, ma pauvre tête! Mais n’importe, il faut le désabuser, et faire ici une épreuve de la vertu de ma femme (haut) Combien de temps me donnez-vous pour vous la faire voir?

 

            le prince       Vous la connaissez donc?

 

20        prudent         (À part) Que trop pour mon malheur!

 

            le prince       Hélas! Tous les moments dont vous différez de me la faire voir sont autant de redoublements de douleur pour moi.

 

            prudent         Laissez-moi faire, vous serez satisfait.

 

            le prince       (Revenant sur ses pas) Que je l’embrasserai, Monsieur Prudent!

 

            prudent         Cela n’est pas nécessaire (le Prince sort) Ouf! Voilà un vilain petit garçon! Encore deux tours de boule et me voilà sur le but. Ah, petit serpent, que j’ai moi-même élevé pour ma vergogne! Mais il n’y a rien encore d’effleuré à ma réputation; tâchons de pénétrer les sentiments de ma femme. Mais, auparavant, je veux mettre tous mes domestiques dehors. Je suis averti qu’ils me volent. Voyons. Pierre? Jacques? Françoise?

 

 

                                    SCÈNE II

 

                                   Dame Françoise, Maître Jacques, ivre, Prudent.

 

            d. françoise Me voilà, Monsieur. Que me voulez-vous?

 

            prudent         Où est Maître Jacques, le cuisinier?

 

            m. jacques      (Bredouillant) Me voilà, me voilà.

 

            prudent         J’ai une bonne nouvelle à vous donner, enfants.

 

5          m. jacques      Comment? Est-ce que vous êtes malade?

 

            prudent         Non, mais c’est que je suis bien aise de compter avec vous. Je suis convaincu que vous me volez. Ainsi, voyons un peu nos affaires. Combien y-a-t-il encore de vin dans ma cave?

 

            m. jacques      Demande-le à Madame Françoise, elle y a été la dernière.

 

            d. françoise Eh, mais, il y a cinq demi-muids de bu, et l’autre qui est bien avancé au-dessous de la barre.

 

            prudent         Plaît-il? Et les six demi-muids que j’ai fait encaver il n’y a pas longtemps, que sont-ils devenus?

 

10        m. jacques      Ce qu’ils sont devenus? Ils ne sont pas encore bus; mais patience.

 

            prudent         Fort bien. Rendez-moi compte des bouteilles qu’on en a tirées, et de toutes celles qu’on en a bues.

 

            m. jacques      Volontiers. Secondement...

 

            prudent         Bon, secondement! Premièrement.

 

            m. jacques      Eh bien, premièrement, si vous voulez; qu’est-ce que cela me fait, à moi? Premièrement, donc, votre vin est bu. Tenez, je suis homme d’honneur et de réputation; j’aime à boire.

 

15        prudent         Mais comment bu? Venons au détail.

 

            m. jacques      Patience. Premièrement... oui, premièrement, huit bouteilles pour laver les jambes à vos chevaux.

 

            prudent         Comment, maraud, vous employez huit bouteilles de mon meilleur vin à laver les jambes de mes chevaux?

 

            m. jacques      Je ne vous dis pas cela, moi. Le vin n’a pas servi à laver les jambes aux chevaux, mais nous les buvions en les lavant. Vous voyez bien que je ne prêche que dans la contrition du discours. Plus, portées à la maison de campagne, trente-six bouteilles.

 

            d. françoise Cela est vrai, je les ai vu emporter.

 

20        prudent         Oui, mais il me souvient qu’on en rapporta douze.

 

            m. jacques      Qu’est-ce que cela me fait, à moi? Elles ont toujours été portées, et à Paris on punit les volontés. Ainsi quand le vin est tiré, il faut le boire.

 

            d. françoise Oh, Dame! Cela est vrai à la lettre.

 

            prudent         Passe. Après.

 

            m. jacques      Plus, pour avoir donné un bouquet à Dame Françoise. Nous rîmes bien, toujours.

 

25        d. françoise Hélas, oui! Le pauvre garçon entra dans ma chambre à minuit, mais nous ne bûmes que six bouteilles à nous deux.

 

            m. jacques      Comment six? Et celles que nous bûmes sur le tonneau? Hem?

 

            d. françoise A propos, je l’avais oublié. (à Prudent) Ah, Monsieur, qu’il compte bien!

 

            prudent         Je trouve qu’il compte fort mal. Après?

 

            m. jacques      Plus, pour avoir fait revenir Mademoiselle Angélique de son évanouissement, huit bouteilles.

 

30        prudent         (En colère) Oh, ma foi, je perds patience. Coquin...

 

            m. jacques      Quoi? Vous vous fâchez?

 

            prudent         Oui, maraud, je me fâche, et...

 

            m. jacques      Tant pis pour vous. Voilà le mémoire de votre vin. Il est bu...

 

            prudent         Il est bu? Je vous ferai pendre...

 

35        m. jacques      (En s’en allant) Archibu.

 

            prudent         Sortez de chez moi tous deux, vous êtes des voleurs.

 

            m. jacques      Peritapetibu, contrarchibu. (ils sortent)

 

            prudent         (Seul) Mais voici ma femme. Tâchons de savoir ses sentiments, et conduisons-la chez le Prince.

 

 

                                   SCÈNE III

 

                                   Prudent, Colombine.

 

            prudent         Je vous trouve fort à propos. Où allez-vous, ma mie?

 

            colombine    J’allais chez Araminte où l’on m’attend pour jouer.

 

            prudent         Vous y passerez le reste du jour?

 

            colombine    Si la partie me fait plaisir.

 

5          prudent         Fort bien. Mais un mari, à votre compte, est donc un émétique que les femmes ne doivent prendre qu’à l’extrémité?

 

            colombine    Je crois pour moi, que le plaisir est réciproque, quand l’on trouve le secret de se passer l’un de l’autre. Le fastidieux personnage que l’on joue tête à tête, à la lueur du flambeau de l’hymen, et surtout quand, à force d’avoir brûlé, on le voit s’éteindre de jour en jour!

 

            prudent         Que c’est un beau champ pour vous que ma vieillesse! Ne semble-t-il pas, à vous entendre parler, que trente années de plus ou de moins défigurent le mérite du mariage? Vraiment, c’est un beau couple, à votre avis, que deux jeunes cervelles, qu’un jeune Godelureau qui... et fi, morbleu, fi! Cela s’appelle manger son blé en herbe.[95]

 

            colombine    Je l’avoue, mais quand il vieillit trop longtemps dans le grenier, il sent la poussière.

 

            prudent         C’est perdre du temps que de raisonner avec vous. Dites-moi, que pensez-vous du Prince?

 

10        colombine    Il a tout le mérite d’un joli homme.

 

            prudent         Une femme qui en serait aimée, vous paraîtrait-elle pas heureuse?

 

            colombine    Sans doute.

 

            prudent         Il est bien fait, et jeune, qui plus est.

 

            colombine    Que voulez-vous dire par là?

 

15        prudent         Je veux dire qu’il vous aime, et qu’il m’en a fait confidence.

 

            colombine    Et vous ne vous êtes pas efforcé de chasser de son cœur une passion qui vous déshonore? Allez, indigne époux, vous mériteriez...

 

            prudent         Bon! Il ne sait pas que tu es ma femme, et je veux que nous l’allions voir ensemble.

 

            colombine    Quoi? Vous avez la lâcheté de me proposer...

 

            prudent         Je n’y entends pas de finesse.

 

20        colombine    Non? Eh bien, j’irai; mais pour lui dire que vous êtes le plus indigne de tous les hommes. Ah! Je me trouve mal.

 

            prudent         Holà, ho! Ma femme? Ah! Maudite complaisance! Mais elle revient; ce ne sont que vapeurs de vertu qui passent.

 

            colombine    Laissez-moi m’en aller.

 

            prudent         (À genoux) Permets, je t’en conjure, que je te ramène chez lui.

 

            colombine    Non, jamais... y a-t-il bien loin?

 

25        prudent         Tout ici près.

 

            colombine    Je n’y consentirai jamais... Quel âge dites-vous qu’il a?

 

            prudent         Vingt ans, ou environs.

 

            colombine    Quand il en aurait encore moins... M’aime-t-il beaucoup?

 

            prudent         À la fureur.

 

30        colombine    Il faut bien aimer un mari, pour avoir cette complaisance! Et quand irons-nous?

 

            prudent         De ce pas.

 

            colombine    Hélas! Vous faites de moi tout ce que vous voulez. (à part) Rira bien de nous deux qui rira le dernier.

 

 

                                   SCÈNE IV

 

                                   Léandre, en tailleur, Pierrot, Angélique.

 

            léandre        (Seul) La crainte est toujours le partage des cœurs infidèles. Angélique m’aime, et elle est sûre de ma tendresse; mais une femme change aisément. Voyons si, à la faveur de ces habits, je pourrai découvrir ses véritables sentiments. Holà, quelqu’un?

 

            pierrot          Tout beau, Monsieur, ne frappez pas si fort. Et parbleu, vous rompez cette porte.

 

            léandre        Je n’y ai pas encore touché.

 

            pierrot          Oh, oh, c’est qu’elle sent les voleurs de loin.

 

5          léandre        Hélas! Si vous me connaissiez, vous parleriez d’une autre sorte: je suis tailleur de ma profession, et je viens prendre la mesure à Mademoiselle Angélique pour ses habits de noces.

 

            pierrot          Et que ne parlez-vous? Je suis homme d’accommodement. Tenez, pourvu que vous me fassiez un habit de rognures, je vous laisserai couper à la pièce.[96]

 

            léandre        Je suis fâché de ne pouvoir pas faire votre affaire. Je ne travaille point pour hommes, je ne travaille que pour femmes.

 

            pierrot          Si cela est, on n’a que faire de vous ici; car je travaille en femmes aussi bien que personne.

 

            léandre        Oblige-moi d’appeler ta maîtresse.

 

10        pierrot          Tenez, la voilà. (il l’appelle) Mademoiselle Angélique?

 

            angélique     Que veux-tu, Pierrot?

 

            pierrot          (Montrant Léandre) C’est ce Monsieur qui vient pour vous tailler.[97]

 

            léandre        Oui, Mademoiselle, c’est moi qui viens vous prendre la mesure de vos habits de noces de la part de Monsieur de Pommenville, gentilhomme veuf, et normand, fils d’un huissier à Verge...[98]

 

            pierrot          Belle généalogie!

 

15        angélique     Cela serait dépense perdue, je ne veux point de Monsieur de Pommenville, et je mourrai mille fois plutôt que de manquer à la foi que j’ai promise à mon cher Léandre.

 

            léandre        (Ôtant sa fausse barbe) Ah, ma chère Angélique, que je vous ai d’obligation! (il se jette à ses genoux)

 

            pierrot          Comment, Monsieur? Et que faites-vous-là?

 

            léandre        (Se relevant) Je prends la mesure.

 

            pierrot          Malepeste! Vous prenez la mesure bien bas. Ah, ah, c’est Monsieur Léandre! Voilà le véritable tailleur pour les jupons de noces.

 

20        angélique     Quelqu’un entre, remettez votre barbe.

 

 

                                   SCÈNE V

 

                                   Arlequin, en tailleur, suivi d’un garçon tailleur, et des mêmes.

 

            arlequin       (Après les avoir regardé) Qui est Mademoiselle Angélique de vous trois?

 

            pierrot          (Riant) C’est moi. Le drôle de corps! Ah, ah!

 

            angélique     Que lui voulez-vous, Monsieur? C’est moi.

 

            arlequin       C’est que je suis tailleur, en grand, en petit, en menu, en long et en large, et je viens de la part de Monsieur de Pommenville pour vous agrandir, élargir, rétrécir; enfin pour vous mettre toute telle que vous voudrez paraître.

 

5          angélique     Vous avez fait trop peu de diligence, et Monsieur vous a prévenu.

 

            pierrot          Oui, Monsieur a pris les devants.

 

            arlequin       Oh, il y a toujours quelque chose à refaire autour d’une femme; et pour peu que je vous accommode, je trouverai assez de besogne.

 

            léandre        (Vers Arlequin) Voilà un homme bien tourné, pour travailler pour Mademoiselle!

 

            arlequin       Parbleu, en voilà bien d’une autre! (à Angélique) Mademoiselle, ne vous fiez pas à cet homme-là, il ne serait bon tout au plus qu’à enfiler des aiguilles.

 

10        léandre        Et toi, à faire de robes de chambre aux quinze-vingts.[99]

 

            arlequin       Et toi, à habiller un sac de blé.

 

            angélique     Pour bien juger de l’adresse de l’un et de l’autre, il faudrait que j’eusse vu de vos ouvrages. (à Arlequin) Oh ça, Monsieur le tailleur, voyons comme vous y prendrez. Que dites-vous de ma taille?

 

            arlequin       (Après l’avoir examinée) Je dis que jamais receveur de tailles n’a eu une taille si bien taillée que votre taille. Je la trouve un peu ensellée. Mais que cela ne vous mette pas en peine, je la rembourrerai comme il faut. Je vais vous montrer le modèle sur lequel nous nous règlerons. (vers le garçon tailleur) Eh? Montrez ce corps de jupe à Mademoiselle.[100]

 

            angélique     Qui est cet homme-là?

 

15        arlequin       C’est un de mes garçons: le premier homme du monde pour les gourgandines. Tenez, Mademoiselle (il fait voir à Angélique un corps de jupe à une grandeur extraordinaire, chargé de plusieurs bourrelets).[101]

 

            angélique     Ah, ciel! L’horrible chose! Si toutes les femmes étaient faites ainsi, personne ne les regarderait.

 

            arlequin       Oh, que cela ne vous étonne pas, il vous ira comme une peinture; et en tout cas, s’il se trouve trop étroit, nous l’élargirons, le faiseur n’est pas mort.

 

            angélique     Mais je serais curieuse de savoir en détail l’usage de toutes ces fausses pièces dont votre corps est chargé?

 

            arlequin       Je vais vous expliquer. Avez-vous, par exemple, une épaule plus haute que l’autre? Voici de quoi l’égaler. N’avez-vous point de gorge? Voici de quoi vous en fournir. Êtes-vous déhanchée? Et voilà de quoi vous faire des hanches; et si vous n’êtes pas contente de votre croupe, je viens d’en livrer une à la veuve d’un élu, à qui il ne manquait que la parole.

 

20        angélique     Grâces au ciel, je n’ai que faire de tout cela. Monsieur, votre manière d’habiller ne me convient pas; c’est pourquoi je me tiendrai à mon premier tailleur.

 

            arlequin       Vous n’y songez pas, Mademoiselle. Savez-vous que c’est moi qui ai habillé la nourrice de Romulus et Remus? Dame, elle avait de la gorge, celle-là!

 

            léandre        Insolent, si tu ne te retires, je te ferai donner cent coups de bâton.

 

            arlequin       Des coups de bâton à un homme de ma qualité? Par la jarnibleu, si je prends mes ciseaux, je lui couperai... (à Angélique) Ôtez-vous, Madame. Je lui couperai les oreilles, à ce coquin-là.[102]

 

            angélique     Allez, vous êtes un impertinent. Retirez-vous, et au plus vite.

 

25        arlequin       Que je me retire? Je ne me retirerai pas qu’il ne m’ait fait réparation des coups de bâton qu’il veut me donner.

 

            léandre        (S’avançant sur Arlequin) Tu crois peut-être avoir à faire à un maraud comme toi. Tiens, coquin, me connais-tu à présent? (il ôte sa fausse barbe)

 

            arlequin       (D’un ton ferme) Oui, morbleu, je vous connais: vous êtes Monsieur Léandre, c’est-à-dire un fripon; et pour vous faire voir que je ne vous cède en rien, je suis Arlequin, un fripon comme vous. (il ôte aussi sa fausse barbe)

 

            léandre        Hé, c’est toi, mon cher Arlequin!

 

            arlequin       Moi-même; je suis venu ici pour vos intérêts, afin d’avertir Mademoiselle Angélique que je viendrai bientôt, déguisé en Monsieur de Pommenville et que je l’enlèverai dans une chaise.

 

30        angélique     Il me semble que j’entends mon père.

 

            arlequin       Et vite, sauvons-nous; et vite, et vite. (ils sortent)

 

 

                                   SCÈNE VI

 

                                   Le théâtre représente l’appartement du Prince.

 

                                   Prudent, Colombine, Le Prince.

 

            prudent         Seigneur, je suis de parole, et voilà ce que vous m’avez demandé.

 

            le prince       Que je vous ai d’obligation!

 

            prudent         (Bas à Colombine) Prends bien garde à ce que tu vas dire.

 

            le prince       Ah, Madame, qu’on exprime mal une joie qui se fait trop sentir! Si l’amour n’avait pris soin de préparer mon cœur à soutenir le pouvoir de vos yeux, je désespérerais que vous sussiez jamais jusqu’à quel point je vous aime.

 

5          prudent         (À part) Quelle croquignole pour mon honneur! Je ne lui ai pourtant jamais appris cela.[103]

 

            colombine    Après une si belle idée d’un portrait comme celui que vous vous étiez fait, il fallait éviter de voir l’original.

 

            prudent         (À Colombine) C’est fort bien répondu. Courage, ma fille.

 

            le prince       Ah, Madame! Faites-vous vous-même plus de justice, et examinez s’il est possible de vous voir, sans ressentir pour vous tout ce que vous m’avez inspiré. Que manquerait-il à mes transports pour vous le persuader? Je me suis peut-être fait mal entendre, mais ne faites point souffrir à mon cœur le défaut de mes expressions. Ou trouver des termes proportionnés à la violence de ma passion? Et puisque l’esprit a peine à le concevoir, que peut-il produire pour le persuader?

 

            colombine    Vous ne vous expliquez que trop bien, Seigneur, et je crains de vous trop entendre.

 

10        prudent         (À part) Il y a quelque chose, là, qui choque mon imagination. (à Colombine) N’approche pas si près de lui, lâche-lui un peu la mesure.[104]

 

            le prince       Que craignez-vous, Madame? Vous ne me répondez point? Mon cœur ne vous paraît-il assez tendre?

 

            colombine    On croit facilement ce qui fait plaisir; mais, Seigneur, quelle preuve ai-je de votre constance?

 

            prudent         (À Colombine) Eh, ne lui en demande pas, je n’y trouverais pas mon compte.

 

            le prince       Ah! S’il faut garantir cette constance par un serment dont je frémis moi-même, puissé-je ne voir jamais vos yeux, mes uniques dieux, mon unique espérance, si mes discours ne sont les sincères interprètes de l’amour dont je brûle pour vous; enfin, puissiez-vous me haïr autant que je vous aime. De quels maux plus affreux pourrait être accablé un parjure!

 

15        colombine    (En soupirant) Hélas!

 

            prudent         (À part) Ouf! Elle a pris son haleine là bien mal à propos.

 

            le prince       En croirais-je ce soupir? Vous ne répondez point?

 

            colombine    Je vous regarde, je me trouble, que puis-je vous dire de plus?

 

            prudent         (À part) Tu n’en dis que trop, double masque.

 

20        le prince       Mais vous détournez les yeux. Ah, cruelle, vous me haïssez.

 

            colombine    De quoi me servirait de vous haïr? La haine qu’on affecte pour ce qui plaît, est une espèce de ruine, qui marque l’endroit de l’embrasement.

 

            prudent         (À Colombine) Allons, ma fille, donne-lui le bonsoir, et allons-nous-en.

 

            le prince       Par vos genoux que j’embrasse...

 

            prudent         (À Colombine) Notre souper est tout prêt. Viens-t’ en donc.

 

25        colombine    Ah, Seigneur, on nous écoute. Dérobez ma faiblesse à la honte que j’aurais si elle avait d’autres témoins.

 

            le prince       Qu’on fasse sortir tout le monde, ou plutôt, Madame, entrons dans le jardin. (à Prudent) Monsieur Prudent, demeurez.

 

            colombine    J’y consens. (à part) Je me doute bien que Mezzetin ne me laissera pas seule longtemps. (le Prince et Colombine rentrent)

 

            prudent         (Après avoir fait quelques mouvements pour l’arrêter) Elle s’en va! Au voleur, au voleur, au feu, à l’aide? Hélas! Quel parti prendre? Mon esprit se trouble déjà par avance. (à Pierrot qui survient) Ah! Mon pauvre Pierrot, tu me vois au désespoir.

 

            pierrot          Qu’avez-vous donc? Vous alarmez tout le voisinage. Je gage que vous avez fait quelque sottise.

 

30        prudent         Ma femme, ma femme... Ouf!

 

            pierrot          Que lui est-il donc arrivé? Vous ouvrez la bouche comme s’il y avait quelque pièce de four à y mettre.

 

            prudent         Hélas! On vient de me l’enlever.

 

            pierrot          Voilà ce que c’est que de me l’ôter! Tant que je l’ai eue, il ne lui manquait pas un fer, je vous l’ai rendue nette comme l’œil; et je ne vous l’ai pas plutôt laissée, que vous l’avez perdue.

 

            prudent         C’est la plus noire trahison qu’on ait vu, et c’est le Prince qui me l’enlève.

 

35        pierrot          Ah! Si ce n’est que lui, je ne suis plus si fâché. Elle ne sort presque pas de la famille; il vaut mieux avoir obligation à ses amis qu’aux autres.

 

            prudent         Ne raille point, Pierrot, je ne prends point goût à tes plaisanteries.

 

            pierrot          Et bien, faites-le assigner pour qu’il vous la rende. Peu de gens se laissent contraindre pour acquitter de pareilles dettes.

 

            prudent         Ah, Pierrot, si tu savais ce que c’est qu’une femme, et combien notre honneur y est attaché!

 

            pierrot          Je m’en doute à peu près. Mais venez avec moi. Ne pleurez donc pas, vous me faites peur. Mezzetin nous attend, et vous verrez que vous n’êtes pas si à plaindre. Allons donc vite, car je crois que la chose presse. (il s’en va)

 

40        prudent         Allons, mon pauvre Pierrot; tu es le plus honnête homme que je connaisse.

 

 

                                   SCÈNE VII[105]

 

                                   Prudent, Arlequin, dans une chaise à porteurs.

 

            un porteur   (Arrêtant Prudent) Monsieur, enseignez-moi où demeure Monsieur Pruneau?

 

            prudent         Je ne le connais pas, mon enfant. (il veut s’en aller)

 

            le porteur    (L’arrêtant toujours) C’est un qui s’appelle... Impudent, Pudent... Imprudent.

 

            prudent         Si c’est Prudent, c’est moi; sinon, serviteur.

 

5          le porteur    Prudent, oui Monsieur. C’est Monsieur de Pommenville, votre gendre, que je vous apporte.

 

            prudent         Monsieur de Pommenville? Ah! Que j’aie le plaisir de le voir?

 

            arlequin       (Sortant de la chaise) Quoi? C’est vous, Monsieur Prudent? Eh, parbleu, beau-père, et où diable vous fourrez-vous? J’ai feuilleté toute la halle pour vous trouver. (il l’embrasse)

 

            prudent         Si j’avais su votre arrivée, je vous aurais prévenu avec empressement.

 

            arlequin       Si votre fille est au même degré de chaleur, je tiens déjà la chose bien avancée; et sans que je prisse la peine de la venir chercher moi-même, elle aurait payé à vue à mon ordre.

 

10        prudent         Vous la trouverez toute disposée à m’obéir.

 

            arlequin       Quoi? Se jeter ainsi à corps perdu dans les bras d’un homme à la première semonce d’un père? Diable! Une fille est une machine bien prompte à faire mouvoir sur le fait du mariage!

 

            prudent         Ah, Monsieur, ma fille est vertueuse.

 

            arlequin       Vraiment, c’est comme il me la faut; car je ne m’accommoderais pas d’une femme qui, auparavant d’avoir tâté du mariage en original, en aurait tiré maintes copies par devers elle.

 

            prudent         Vous n’aurez pas sujet de vous en plaindre. Mais que dites-vous de Paris?

 

15        arlequin       Eh fi, Monsieur! Les rues sont trop longues et trop larges de la moitié. Ma foi, notre ville de Dieppe est bien plus ramassée que cela. Et fi! On n’y est point poli. Vraiment, nous avons bien un autre air que vos badauds. Ce sont de vrais lourdauds, ils n’ont jamais vu un quartier de froment en face et, sans nous, les poulets d’Inde seraient des monstres inconnus pour eux. Mais à propos, beau-père, il me semble que vous ne parlez pas de souper. Ne vous y trompez pas au moins; je ne verrai votre fille qu’après un ample repaissance.[106]

 

            prudent         Ce n’est point ici la cuisine, et je sais trop bien vivre pour vous y recevoir.

 

            arlequin       Quelle façon! Quel abus que d’affecter de certains appartements pour une cuisine! Je veux que tout soit en cuisine, chez moi, jusqu’au grenier. Et mort de ma vie, où trouvez-vous de plus beau meuble qu’une broche, qu’une lèchefrite? J’en ai une bibliothèque chez moi qui vaut bien le code.[107]

 

            prudent         Dans un moment, si vous voulez, on va nous servir la collation, en attendant le souper.

 

            arlequin       Puisque cela est ainsi, faites-moi la meilleure chère que vous pourrez, et n’allez pas vous excuser en disant que vous me traitez en ami. Ces sortes de civilités-là sont des vrais coupe-gorges pour mon appétit. Il faut que vos assiettes soient revues, corrigées et augmentées. Mais voyons votre fille, je me restreins aujourd’hui en sa faveur; car, pour l’ordinaire, je ne me sers d’une femme que comme d’un cure-dent, après le repas.

 

20        prudent         Tenez, Monsieur, la voici. (à Angélique) Angélique, saluez votre futur, Monsieur de Pommenville.

 

            angélique     (Bas) Monsieur de Pommenville? Ah, ah! (elle rit) C’est Arlequin.

 

            arlequin       (Après avoir regardé Angélique) Comment Diable? Je ne vous croyais pas si belle de la moitié. Voilà des yeux qui seront d’un terrible revenu pour le futur, et ils doivent faire un furieux ravage quand vous leur lâchez la bride sur le cou.

 

            angélique     De quelle manière qu’ils vous paraissent, leurs regards se fixeront toujours sur vous.

 

            arlequin       Ah, morbleu, beau-père, quel monstre d’esprit vous avez là! Il faut que vous renonciez aux prétentions que vous avez sur pareille géniture; jamais telle farine n’est sortie de votre sac, et vous l’avez trouvée toute blutée dans votre Aristote.

 

25        angélique     Tout de bon, me trouvez-vous de l’esprit?

 

            arlequin       Je vous en trouve tant, que je crains qu’il ne regorge. Mais comme je ne veux tromper personne, avant de rien conclure, trouvez bon que je vous fasse part d’une petite maxime que j’ai faite pour servir de règle à celle qui tombera sous ma coupe. Cela n’est pas long, c’est un quatrain en six vers. Ecoutez.

 

                                   «Il faut veiller toi-même au soin de ton ménage,

                                   pour voir si de tes biens on fait un bon usage.

                                   On se repose en vain dessus la bonne foi

                                   des gens que l’on commet à cette économie:

                                   à d’autres de ce soin malheureux qui se fie!

                                   Bats ta femme et ton blé, tout ira bien chez toi[108]

 

            prudent         Mais, Monsieur, vous aller effrayer ma fille.

 

            arlequin       (Vers Angélique) Cela ne doit point vous dégoûter de mes manières. Je vous aimerai beaucoup et je vous rosserai de même.

 

            prudent         Allons, mon gendre, entrez, le souper est tout prêt.

 

30        arlequin       Tant mieux, car votre physionomie commençait à m’altérer. Vous voyez que je suis ingénu. Vous voulez bien qu’avec la même ingénuité je vous demande une grâce.

 

            prudent         Vous n’avez qu’à parler.

 

            arlequin       Prêtez-moi votre fille pour un moment.

 

            prudent         Comment donc?

 

            arlequin       Et oui, c’est que je veux lui faire présent de quelques petits bijoux, et afin qu’elle les choisisse à sa fantaisie, je vais la faire mener chez l’orfèvre dans ma chaise.

 

35        prudent         Oh, pour cela, je le veux bien. Allez avec Monsieur, ma fille, allez.

 

            arlequin       (Ouvrant la chaise) Entrez, Mademoiselle. Pour moi, je m’en vais toujours devant. Adieu, beau-père. Ah, ah! (il rit) Quel nigaud! Ah, ah! (il s’en va)

 

            prudent         Ouais! Il me semble que Monsieur de Pommenville riait en s’en allant. Ne serait-ce point ici quelque tour de Maître Gonin? Voyons. (aux porteurs) Attendez un peu, vous autres, je veux dire un mot à ma fille avant qu’elle parte.[109]

 

            un porteur   À moins que mon maître ne soit là, Monsieur, je n’ouvre ma chaise à personne.

 

            prudent         Faquin, je te la ferai bien ouvrir de force. Holà, quelqu’un de mes gens? Pierrot, Maître Jacques, Picard, assommez-moi ces coquins de porteurs. (les domestiques de Prudent sortent armés de broches, de balais, de pelles, de pincettes, et d’autres choses semblables. La chaise à porteurs s’ouvre, et représente une forteresse, d’où après avoir tiré des grenades sur les domestiques de Prudent, on fait une sortie, et on les chasse à coups de bâton)

 

 

                                   SCÈNE VIII

 

                                   Le théâtre représente le jardin du Prince.

 

                                   Colombine, Le Prince, Arlequin, en magicien, qui survient.

 

            colombine    (Seule) Je suis étonnée du peu de diligence de Mezzetin. Il m’avait promis de me tirer dans peu des mains du Prince. Mais hélas! Le voici.

 

            le prince       Enfin, Madame, me voilà débarrassé de mes fâcheux, et je viens auprès de vous expier un crime dont mon cœur n’a déjà que trop souffert. Comptez, Madame, que ce n’est pas sans violence que j’ai pu me résoudre à m’éloigner de vous.

 

            colombine    Il ne faut pas que l’amour vous fasse négliger le soin de vos affaires. Mais, Seigneur, j’ai une grâce à vous demander.

 

            le prince       Vous n’avez qu’à commander, Madame.

 

5          colombine    Permettez que je vous quitte.

 

            le prince       Permettre que vous me quittiez? Ah, Madame, demandez-moi toute autre chose que celle-là.

 

            colombine    (D’un ton ferme) Et que prétendez-vous encore?

 

            le prince       Vous voir, vous aimer, et vous le dire à tout moment.

 

            colombine    Vous n’êtes pas encore où vous pensez, Seigneur, j’ai des secours invisibles. (elle veut s’en aller)

 

10        le prince       Et moi, je m’opposerai à tous les secours dont vous vous flattez. (il la suit)

 

            colombine    (Se retournant) Arrêtez, Seigneur, ou la mort la plus violente me délivrera de vos poursuites. (elle s’enfuit)

 

            le prince       Non, non, n’espérez pas...

 

            arlequin       (En magicien) Fermati, temerario. (il l’empêche d’avancer)

 

            le prince       Qui es-tu, toi qui prétends m’empêcher de suivre l’objet que j’aime?

 

15        arlequin       Qui je suis? Tremblez à mon aspect. Je suis le procureur fiscal du village de Pluton, et celui qui paraphe l’honneur des femmes ne varietur.[110]

 

            le prince       Quand tu serais tout l’enfer ensemble, il faut que tu périsses. (il met la cimeterre à la main, et lui en voulant décharger un coup sur la tête, Arlequin le touche de sa baguette, et le rend immobile)[111]

 

            arlequin       (Baissant sa baguette) Ah, ma chère baguette, que je t’ai d’obligation! Sans toi, j’étais fricassé. Mais il faut que je le rende témoin de ma puissance. (il le désenchante) Tiens, vois jusqu’où s’étend mon pouvoir. Je fais avancer les montagnes; (il frappe la terre, et la montagne s’avance) et, pour peu que tu t’obstines à me chagriner, je te ferai cesser d’être homme pour tout le reste de ta vie.

 

            le prince       (Tout effrayé) Ah Seigneur, puisque vous êtes si puissant, faites-moi voir ma maîtresse.

 

            arlequin       Volontiers. Mais auparavant rengainez; renguenate. (le Prince met la cimeterre dans le fourreau) A présent qu’il n’y a plus rien à craindre pour moi, je vais travailler à vous rendre heureux, en vous faisant voir l’objet que vous aimez.

 

20        le prince       Ah, de grâce, faites-moi voir le feu de ses beaux yeux.

 

            arlequin       Oui, vous verrez le feu de ses beaux yeux; mais il sera si loin du bassinet que la poudre n’y prendra pas. (il tourne autour du Prince en faisant beaucoup de postures plaisantes avec sa baguette, et après plusieurs lazzi de cette nature, il dit) Démon, par le pouvoir que j’ai sur toi, que cette montagne se change en palais magnifique. (aussitôt la montagne change. On voit à la place un palais magnifique, et Prudent et Colombine à une fenêtre du palais)[112]

 

            le prince       Que vois-je? Ma maîtresse avec mon gouverneur?

 

            prudent         Oui, Seigneur, c’est ma femme.

 

            arlequin       (Au Prince) Cela est vrai, et peu s’en est fallu qu’elle n’ait été la vôtre. Vous vouliez gouverner la femme du Gouverneur, vous!

 

25        le prince       Quoi, Madame, Monsieur Prudent est votre époux?

 

            colombine    Oui, Seigneur.

 

            le prince       Qui l’aurait cru? Je suis tout hors de moi. (à Arlequin) Quel parti prendre?

 

            arlequin       Vous consoler, ou vous pendre.

 

            le prince       Oh! Je connais qu’il faut céder. Oui, Monsieur Prudent, vous avez triomphé. Je renonce au penchant de mon cœur et je me rends à la vertu de Madame votre femme.

 

30        arlequin       (À part) Voilà une action qui sent bien son étranger. Un Français n’en serait pas demeuré là. (haut) Mais ce n’est pas le tout. (à Prudent) Ecoutez, bon homme, après vous avoir fait retrouver votre femme fidèle, si vous ne donnez votre fille Angélique à Léandre, je m’en vais tout à l’heure vous métamorphoser en une forme de fromage de Milan.

 

            prudent         Je vous ai trop d’obligation pour vous refuser quelque chose. Je consens que ma fille Angélique épouse Léandre.

 

            arlequin       Et moi pour célébrer un si heureux jour, je m’en vais vous faire voir un échantillon de ma puissance, et vous donner un divertissement de ma façon. (il frappe le palais de sa baguette. Le palais se change aussitôt en un jardin très agréable, rempli de jets d’eau et de berceaux. Bacchus, suivi de plusieurs satyres, s’avance en dansant, et après qu’on a dansé)

 

            bacchus         (Chante)

                                               Vive, vive le dieu de la tonne.

                                               Avalons le vin qu’il nous donne.

                                   (Il boit, et verse du vin à tous les satyres)[113]

 

            le chœur                   Vive, vive, etc.

 

35        bacchus                     Enfants de Bacchus,

                                               ne vous plaignez plus

                                               de mes faveurs,

                                               cette année a tari vos pleurs

 

            le chœur                   Vive, vive, etc.

 

            bacchus                     Venez tous boire à tasse pleine

                                               de ce jus délicieux

                                               quand Bacchus remplit sa bedaine

                                               Venus ne s’en trouve que mieux

 

                                    (Il leur verse encore à boire, et ils s’en vont en chantant)

 

                                               Vive, vive le dieu de la tonne.

                                               Avalons le vin qu’il nous donne

 

                                   Fin de la comédie.

 

 

 

Apparato

Rispetto all’edizione Braakman del 1697, l’edizione Gherardi del 1700 presenta numerosissime varianti, che ci permettono di osservare l’entità del lavoro editoriale svolto da Gherardi nei confronti delle edizioni precedenti al momento della pubblicazione. La stessa operazione di riscrittura e in taluni casi di rifacimento avviene per altri testi come Les Bains de la Porte Saint-Bernard, di M. Boisfranc, che nella sua edizione del 1700 Gherardi pubblica con notevoli modifiche rispetto alla versione pubblicata nel 1698, in particolare per quanto riguarda le scene in cui compare Arlequin.[114] Gherardi intervenne sui testi al momento della sua ultima edizione per diversi motivi: da un lato, per elevare lo stile delle commedie e avvicinarlo a quello delle commedie letterarie francesi, e quindi conferire una dignità di solito negata al teatro italiano; dall’altro, per rendere chiara e comprensibile al lettore la recitazione all’italiana.[115] A quest’ultimo obiettivo si ricollega per esempio l’accuratezza delle didascalie, nel caso de La Fausse Coquette, molto ridotte invece nell’edizione del 1697. Questi interventi così radicali di Gherardi si possono spiegare anche in base al modo in cui gli spettacoli venivano allestiti alla Comédie-Italienne, dove in molti casi il ruolo dell’autore passava in secondo piano rispetto alla realizzazione finale da parte della compagnia.

           Qui di seguito, offriamo qualche esempio delle principali varianti tra le due versioni, in particolare per quanto riguarda personaggi, scene, assenza/presenza di battute, didascalie, lingua. Indicheremo il testo dell’edizione Gherardi (1700) con la sigla TI 1700, e l’edizione spuria Braakman (1697) con la sigla SupTI 1697.

 

Titolo e attori

In TI 1700 il titolo precede la lista degli attori, mentre in SupTI 1697 la lista degli attori precede il titolo che non menziona il numero degli atti, né la data della messa in scena, ma semplicemente: La Fausse Coquette, comédie. Assente anche l’indicazione di luogo: La Scène est à Paris.

            Il numero dei personaggi e l’ordine sono diversi. In SupTI 1697 mancano tutte le specificazioni delle parti, i travestimenti e le parti di Arlequin (un tailleur, un peintre, un normand, un magicien). L’indicazione Quelques Diables chantant et dansant, è sostituita da Plusieurs démons in TI 1700. Importante notare che in SupTI 1697 è presente Scaramouche, che invece è sostituito da Pasquariel in TI 1700.

acteurs

               angÉlique

               colombine

               léandre

               pierrot

               arlequin

               mezetin

               octave

               scaramouche

               prudent

               mad: françoise

               un garçon tailleur

               Quelques Diables chantant et dansant.

 

Poiché sappiamo che l’attore Tiberio Fiorilli, il celebre Scaramouche della compagnia, era morto qualche giorno prima della rappresentazione della commedia (7 dicembre 1694), potremmo interpretare anche questa variante nel senso della maggiore precisione dal punto di vista storico, ricostruttivo, dell’edizione Gherardi rispetto alla versione dell’edizione 1697. Infatti, Fiorilli venne sostituito da Tortoriti, appunto nella parte di Pasquariel:[116]

 

 

Scene

In SupTI 1697 c’è un maggiore numero di scene più brevi, dovuto a più cambiamenti di scena. Così l’atto I presenta 11 scene in TI 1700, mentre nel SupTI 1697 arriva a 14; l’atto II 7 scene in TI 1700, nel SupTI 1697 11 scene; e l’atto III 8 scene in TI 1700 e nel SupTI 1697 12 scene.

            Nel primo atto, nella scena I.4, l’incontro tra Colombine e Octave provoca un cambiamento di scena (I.5, p. 279); come anche l’arrivo di Prudent (I.6, p. 281) e il breve monologo di Octave (I.7, p. 282). L’ultima scena dei paraventi è divisa in tre scene (12-14) corrispondenti a: 12. Arrivo di Arlequin travestito da pittore (p. 290); 13. Entrata di due Laquais che portano i paraventi (p. 293); e 14. Uscita di Octave di scena (p. 295).

            Nel secondo atto, nella prima scena, l’arrivo di Arlequin è segnalato con un cambiamento di scena (scena 2, p. 399). Anche nella scena 4, l’arrivo del postino segnala una nuova scena (5, p. 308). Nella scena II.8 dello scambio di lettera, alla spiegazione dell’equivoco è riservata una nuova scena (II.9, p. 316). L’ultima scena del secondo atto è anch’essa divisa in due scene: la seconda riservata all’entrata di Arlequin (9, p. 318).

            Nel terzo atto, nella scena 4, l’arrivo di Angélique provoca un cambiamento di scena (5, p. 341), come anche nella scena 7 l’allontanamento di Prudent (che si lamenta con Pierrot) in seguito all’entrata nel giardino di Colombine e del principe (8, p. 349). Un altro cambiamento coincide con l’arrivo di Angélique chiamata da Prudent per incontrare Pommenville (10, p. 354), e l’ultimo con l’entrata di Arlequin nella scena finale (12, p. 359).

 

L’edizione Gherardi: un testo molto più elaborato e dettagliato

Rivolgendosi a un pubblico di lettori, Gherardi vuole trascrivere più precisamente l’andamento del dialogo. Per esempio anche annotando i versi fatti da Mezzetin a imitazione del gatto (mezzetin (Contrefaisant le chat) Miaou, miaou; I.3.7-10):

arlequin             (En se promenant) Tranquilli bourgeois, che dormite tranquillamente, che la vostra sorte me doit faire envie! Il vostro sonno vi prepara momenti fortunati; et il est permis aux chats de vos gouttières...

mezzetin            (Contrefaisant le chat) Miaou, miaou.

arlequin             Un matou! Est-ce qu’il me prend pour du mou? Vous verrez que quelque chatte de mauvaise vie aura passé par ici. Ehi voi, tenero gatto, qui échauffé par les yeux d’une chatte amoureuse, correte de ça, et de là pour tâcher de la surprendre en flagrant délit; deh! per pietà, fermate il passo, ne vous mettez point martel en tête. Anca mi son innamorato; ma la mia crudele est bien plus à blâmer; elle me préfère le fils d’un partisan. Mais pour vous, de quoi vous plaignez-vous? Si votre chatte vous trahit, ne savez vous pas que la nuit tous les chats sont gris?

mezzetin            (Contrefait le chien, le chat, l’âne, le cochon, et autres animaux)

 

            In SupTI 1697 questi versi sono invece appena indicati e lasciati all’improvvisazione (Mezetin fait le chat; I.3, p. 271):

arlequin             Tranquile bourgeois, qui dormez en repos, que cela me doit donner d’envie, car le sort vous prépare mille et mille fortunes. Mezetin fait le chat. Au chat, au chat, est-ce qu’il me prend pour du mou? Et vous chat intéressé qui échauffé par les yeux d’une chatte amoureuse courez de ça et de là pour tâcher de la surprendre, en flagrant délit par pitié. Fermez les yeux, et devenez amoureux comme elle. Hélas! Ma cruelle est bien plus à blâmer; car elle me préfère le fils d’un partisan: mais si votre chatte vous fait quelqu’infidélité, ne savez vous pas que la nuit tous chats sont gris... Mezetin fait l’âne, le coq, et le chien. Tire, tire, tire, je crois que c’est ici l’assemblée de tous les animaux.

 

            In SupTI 1697, più avanti nella stessa scena, le battute sono brevissime e si alternano rapidamente (pp. 272-273):

mezetin                             Qui m’appelle? Ah, ah, Monsieur, voulez vous jouer?

arlequin             Non.

mezetin                             Quoi, à la paume?

arlequin             Non.

mezetin                             Au billard?

arlequin             Non.

mezetin                             Aux des?

arlequin             Non.

mezetin                             A la boule?

arlequin             Non.

mezetin                             Au totou?

arlequin             Non.

mezetin                             Au corbillon?

arlequin             Non.

mezetin                             Aux cartes?

arlequin             Non.

mezetin                             A petanguele?

arlequin             Non.

mezetin                             Eh, mais vous ne parlez pas.

arlequin             Eh! Mais c’est que je ne veux pas jouer.

 

            Rispetto a questa versione, Gherardi svolge un’operazione di condensazione, più rivolta al lettore che all’attore (I.3.19-22):

mezzetin            Que souhaitez-vous de moi? Voulez-vous jouer aux dès? Aux cartes? Au Toton, au Quilles, au Palet, à la Paume, au Cheval fondu, au Trou-madame, au Qui met-on, au Combien, à la Coupe tête, à Pet en gueule, au Plaît-il maître? Vous ne parlez pas?

arlequin            Je ne veux point jouer.

 

            La maggiore accuratezza dell’espressione nell’edizione Gherardi emerge anche dalle battute seguenti, di cui propongo le due versioni. L’edizione TI 1700 è seguita, dopo la parentesi quadra, dall’edizione SupTI 1697:

le prince (Abordant Colombine) Le sort m’est plus favorable que je n’osais l’espérer. Je vous retrouve enfin, Madame, et mon cœur, en vous voyant, est bien vengé de l’inquiétude que ce moment d’absence lui a causé (I.4.4) ] octave Enfin, Madame, je vous retrouve ici, et je viens vous marquer le chagrin que votre absence m’avait causé. (I.5, p. 279)

 

le prince (Seul) Dans quel étrange embarras son discours me jette-t-il. Mais enfin, reprenons quelque espérance. Il n’en faut point douter, c’est son portrait que j’ai trouvé l’autre jour: la perte qu’elle a avoué avoir fait du sien; son esprit et mon cœur, tout est d’accord pour me persuader. Pasquariel, viens être témoin de l’excès de ma joie. J’ai enfin découvert l’original du portrait qui m’avait donné tant d’inquiétude (I.5.8) ] octave (seul) Dans quel étrange embarras son départ me jette-t’il? Mais n’importe, reprenons toujours quelqu’espérance. Il n’en faut point douter, c’est son portait que j’ai trouvé dernièrement dans un jardin. Son esprit et mon cœur tantôt d’accord pour me le persuader. (I.7, p. 282)

 

le prince Que veux-tu dire? (I.10.10 ) ] octave Qui est ce chose? (I.11, p. 289)

 

le prince Il est assez bien. Mais cette main-là, la main du peigne me paraît un peu contrainte et engourdie (I.11.21) ] octave Il est assez joli, mais sa main paraît toute engourdie (I.11, p. 293)

 

Arlequin Engourdie? Cela est vrai. Vous y êtes, Monsieur, c’est que je l’ai peinte pendant l’hiver. (I.11.22) ] Arlequin C’est une main peinte dans le froid (I.11, p. 293)

 

            Anche il francese è a volte scorretto, a volte scritto secondo la pronuncia:

mezzetin (pendant qu’Arlequin fouille dans sa poche, se change en oublieux, et crie) La joie, la joie, des petits tuileaux, laux, laux, la joie (I.3.35) ] Mezetin (en oublieux) La joie, la joie. Des petits toüillo Lo, lo. La joie. (I.3, p. 276)

 

Rafforzamento della componente patetico-sentimentale

Le scene col principe risultano molto più sviluppate in TI 1700 rispetto alla versione SupTI 1697, dalla quale sono assenti quasi tutti i monologhi in versi di questo personaggio. Per esempio nella scena del primo incontro tra il principe e Colombine (I.4), sono aggiunte alcune battute tra i due protagonisti, che fanno emergere un raffinato gioco di seduzione, tra vedere, svelare, rivelare, gli occhi, gli sguardi, dietro la maschera:

colombine          Vous me trouveriez bien faible, si je donnais quelque croyance à des discours, que le seul hasard, ou plutôt certaine manière familière à tous les hommes leur fait débiter (8).

[...]

le prince             Que je suis encore loin de l’espérance dont je m’étais flatté, puisque ma sincérité vous est suspecte! (10)

[...]

le prince             Par quels serments faut-il vous rassurer? Mais que vous êtes injuste! Tout ne devient-il pas possible aux charmes de vos yeux? Oui, Madame, c’est dans vos regards que j’ai puisé cette flamme qui me dévore. Rien n’est comparable à l’idée que je m’en suis faite; c’est l’Amour même qui a pris soin de vous dépeindre à mon cœur. Hélas! Si, malgré les soins que vous avez pris à me les cacher, mon cœur n’a pu se défendre, je m’attends à mourir de plaisir en les voyant. (12)

[...]

colombine          J’estime trop l’erreur dont mon masque vous a prévenu en ma faveur, pour vouloir risquer, en me découvrant, ce que mes yeux ont si heureusement commencé. (14)

 

            Anche nella scena I.10 di TI 1700 è aggiunto il monologo poetico in alessandrini nel quale il principe si rivolge al ritratto dichiarandogli il suo amore e chiedendosi se ciò che ha visto la notte è frutto di un sogno, di una menzogna, confidando nella speranza che il giorno gli porti conferma. Sono assenti da SupTI 1697 (I.11) anche tutte le battute tra Prudent e il principe, attraverso le quali Prudent si accorge del ritratto di sua moglie in possesso del giovane e viene preso da vapori. Mancano anche il monologo e lo scambio di battute tra i due personaggi che introducono la scena seguente, l’ultima del primo atto, nella quale appunto Arlequin-pittore, opera il miracolo, facendo apparire l’amata Colombine al principe su alcuni paraventi da lui dipinti. Anche il lungo monologo poetico-patetico in versi del principe nell’ultima scena del secondo atto è assente da SupTI 1697, che comincia direttamente con la battuta di Scaramouche che scuote il principe dalla sua rêverie (II.10, p. 317).

            La prima scena del terzo atto di SupTI 1697, è molto scarna, ridotta a un semplice scambio di informazioni tra i due personaggi per far avanzare l’intreccio. Prudent si rivolge al principe chiedendogli perché non smette di piangere, e afferma di conoscere la causa del suo dolore. Inoltre, a parte dice di sapere che è innamorato di sua moglie: «Je sais qu’il est amoureux de ma femme, j’en ai vu le portrait. Mais il faut dissimuler» (III.1, p. 331). Il dialogo è condensato, e soprattutto viene a mancare non solo il contrasto tra le personalità dei due personaggi, sottolineato invece da TI 1700, attraverso il diverso stile delle battute, ma anche il loro profilo psicologico appare semplificato. Infatti, nella versione Gherardi il principe si esprime con toni patetico-romantici e appassionati, comunicando a Prudent la sua disperazione poiché ha saputo che l’amata è sposata. Prudent lo consola con considerazioni realistiche sulla natura estrema dei sentimenti giovanili, destinati a spegnersi ben presto (III.1.8) e con una frase satirica sulla virtù delle donne («La vertu dans ce siècle est un monstre, que les femmes n’osent regarder, de peur que leur fruit n’en soit marqué», III.1.10). D’altra parte, il ritratto di Colombine che il principe esibisce nello scopo di rivelare l’identità della donna amata, suscita una forte emozione in Prudent, il quale, vedendo il proprio onore in pericolo, esprime a parte il suo rancore contro la moglie. Tuttavia, promette al principe di fargliela incontrare, per soddisfare il suo desiderio, ma anche per metterne alla prova la virtù.

            Cosa possiamo concludere? L’inserimento, da parte di Gherardi, di battute in versi pronunciate dal principe svolge un ruolo in un certo senso paradossale. Da un lato svolge una funzione parodica nei confronti della Comédie-Française, producendo al tempo stesso un effetto comico, nato dal contrasto tra i due registri, basso (Prudent) e alto (principe), il tutto probabilmente affidato all’improvvisazione nello spettacolo iniziale. Dall’altro contribuisce a quell’effetto di letterarietà che caratterizza tutta l’impresa editoriale di Gherardi.

 

Rafforzamento della componente comico-satirica

Anche la componente comico-satirica è rafforzata o cumunque maggiormente esplicitata in TI 1700. Per esempio attraverso alcune battute assenti in SupTI 1697, in cui in contrasto con le dichiarazioni d’amore enfatiche del principe, Pierrot e Prudent esprimono il loro commento negativo su Colombine, e Arlequin sulle donne in genere:

pierrot                S’il la voyait aussi souvent que moi, il en serait bientôt las. (I.4.5)

 

prudent              Où est donc allée ma carogne de femme?

colombine          (Fait tomber la lanterne de son mari, et entre aussitôt dans la maison). (I.5.12)

 

arlequin             Je suis surtout le peintre des femmes. Il n’y en a pas une que je ne rajeunisse de dix années. J’attrape si bien l’air du visage, que, tac, je donne un soufflet à la nature; et s’il manque quelque chose à leur ressemblance, c’est leur flux de bouche perpétuel où je n’ai pu encore atteindre avec mon application. (I.11.7)

 

            Anche nelle scene dell’incontro tra Pasquariel e Arlequin travestito da donna possiamo osservare un elaborato dialogo intessuto di doppi sensi osceni, grazie al termine louée, ‘affittata’, che evoca uno scambio di denaro tramite il quale i due uomini avrebbero ottenuto i favori di Arlequin:

arlequin            En vérité, Monsieur, je ne puis pas. Je suis louée pour toute la nuit, en conscience. Demandez, demandez.

mezzetin            Cela est vrai. Nous en avons payé la première heure d’avance.

angelique          Oh morbleu, louée ou non, je ne vous quitte pas. (vers Pasquariel et Mezzetin) Allons, Messieurs, lâchez cette fille-là; ou par le sang bleu... (TI 1700, I.9.17-19)

 

Mentre in SupTI 1697 (I.8-10) tutto lo scambio è ridotto, pur mantenendo il rinvio alla prostituzione, reso da Arlequin che afferma essere retenue, ‘riservata’:

arlequin            Je suis retenue pour toute la nuit, en conscience.

angelique          Arlequin) Je ne vous quitterai pas, (à Scaramouche). Allons, Monsieur, lâchez cette fille-là, ou par le sang bleu (I.10, p. 288)

E nella scena del secondo atto, tra Prudent e Pierrot, mancano diverse battute tra i due personaggi a proposito della gelosia di Prudent, che va subito al dunque: «Dis-moi comment se porte ma femme?» e «Ou elle a été cette nuit?» (SupTI 1697, II.3, p. 303). Meno elaborato è anche il dialogo tra Colombine e Prudent nella scena successiva (II.4):

prudent              Vous êtes bien piquante aujourd’hui, je ne suis guère content de vos manières (SupTI 1697, II.4, p. 304).

 

prudent              Vous êtes bien piquante aujourd’hui, et vous mériteriez... Suffit. Je commence à m’ennuyer, et vos brusqueries ne me divertissent point (IT 1700, II.3.4).

 

mentre in TI 1700 (II.3) sono aggiunte alcune battute (18-19) che mostrano più nel dettaglio la personalità dei due coniugi: debole e patetico dietro le minacce e il comportamento autoritario, Prudent si preoccupa del proprio onore messo in pericolo dalla moglie, la quale gli risponde con insolenza e insofferenza, prendendosi gioco di lui:

prudent              S’il n’y allait que de votre réputation, je laisserais volontiers flotter la barque. Mais, vertu de ma vie, c’est mon honneur que vous jouez quand vous effleurez le vôtre, et vous ne sauriez si peu y toucher, qu’il ne paraisse au mien.

colombine          Vous vous moquez, Monsieur, vous vous moquez. Et qui voudrait, je vous prie, me tenir jeu, si je n’avais que votre honneur à risquer? C’est une pièce qui n’est pas de poids, quoi que bien trébuchante.

 

            Anche il testo della lettera di Pommenville in SupTI 1697 è più breve, privo di didascalie e senza separazione tra il testo della lettera e le osservazioni di Prudent, tra le quali un apprezzamento circa l’umore del fututo genero (assente in TI 1700):

le porteur         Ca, trois sols.

prudent              Va on te les donnera. (il ouvre la lettre) Pommenville. Ah! C’est mon genre. (il lit) beau-père; car ne vous en déplaise, il faut que vous le soyez malgré vous. Je prends la commodité des chasse-marées pour vous aller voir promptement, ne manquez pas de me faire trouver du vin prêt à mon arrivée; car je vous avertis, que je suis terriblement altéré. Je vous en dirais davantage, sans un mal de ventre qui m’oblige de temps en temps à quitter cette lettre. Je vous laisse sur la bonne bouche, et je suis votre gendre Pommenville. Voilà un drôle de gendre; mais je suis bien aise qu’il soit d’une humeur gaie et joviale, il me divertira pensant mes vieux jours. Je vais tout préparer (II.5, p. 308).

 

Molto più sviluppato in TI 1700, lo stile più ironico e sarcastico mette in rilievo la volgarità del normanno che rivolge metafore e insulti al futuro suocero e a Colombine (II.4.27):

un porteur

de lettres          (Présentant une lettre à M. Prudent) Ça, trois sols?

prudent              (Donnant trois sols, et prenant la lettre) Tenez (le porteur s’en va) C’est une lettre de mon gendre Monsieur de Pommenville que j’attends aujourd’hui. Il vient pour épouser ma fille. Voyons (il lit).

                              Monsieur mon beau-père (car ne vous en déplaise il faut que vous le soyez), je prends la commodité des chasse-marées pour vous aller voir promptement, et embrasser, chemin faisant, ma future épouse. Je ne sais pas encore si je pourrai l’aimer, car on dit qu’elle vous ressemble; et comme vous êtes très laid, j’aurais là un fort vilain magot de femme. Mais comme j’ai un singe plus laid que vous, que j’aime cependant beaucoup, je ne désespère pas qu’elle ne me plaise autant que lui. Ne manquez pas de me faire trouver du vin prêt à mon arrivée, car je suis toujours fort altéré, surtout depuis que je sais que vous en avez de bon en cave, et que votre fille en a la clef. Sans un mal de ventre qui m’oblige de temps en temps à quitter cette lettre, je vous en écrirais davantage; je souhaite qu’ainsi soit de vous. Je suis, Monsieur mon beau-père, votre genre,

                              pommenville

 

Anche nell’ultima scena del secondo atto nel bosco, gli scambi di battute tra il principe e Arlequin-mago sono molto ridotti in SupTI 1697:

arlequin            Mais! Parlons d’autres choses. Vous êtes amoureux, sans doute, et vous êtes dans l’inquiétude de découvrir ce que vous aimez. Vous jouez de malheur. Car il n’y a rien de si commun à présent qu’une femme. Mais ne vous mettez pas en peine, je vais travailler pour vous rendre heureux, en invoquant un diable de mes amis, avec qui je ferai le diable à quatre. (II.11, p. 323)

 

mentre Gherardi aggiunge una certa violenza e carica satirica nell’espressione e nelle immagini evocate da Arlequin, forse a partire dalle allusioni ‘improvvisate’ durante la rappresentazione:

arlequin             Très volontiers. Voulez-vous vous faire aimer du sexe? J’ai un secret merveilleux pour cela.

le prince             Apparemment que vous en avez fait l’épreuve?

arlequin            Belle demande! Tel que vous le voyez, j’ai usé quarante-six femmes, mais usé, que les cordes y paraissent; et je suis après à expédier la quarante-septième. Mais parlons d’autre chose. Vous êtes amoureux sans doute, et je m’aperçois que vous avez de l’inquiétude de ne point découvrir celle que vous aimez? Vous jouez assurément de malheur; car rien n’est aujourd’hui de moins rare ni à plus juste prix qu’une femme. (II.7.52-54)

 

            In TI 1700 sono aggiunte due battute, una sulle donne sposate, spesso assenti e che spendono i soldi del marito: «Une femme mariée est comme une maison dont le propriétaire n’occupe que le plus petit appartement, et où cependant toutes les grosses réparations se font sur son compte» (II.7.78), e una subito dopo, sullo spirito diabolico delle donne: «Le Diable a bien de la peine à venir à bout de l’esprit d’une femme!» (II.7.80). In SupTI 1697 gli stessi difetti sono evocati in una sola battuta di Arlequin a proposito della pizia che, sollecitata da Arlequin, non vuole parlare (p. 328):

scaramouche     Quoi, Monsieur, elle est femme et ne parle pas?

arlequin             Non.

octave                 Quoi, Monsieur, est ce que votre pouvoir n’est pas assez grand pour la faire parler?

arlequin             Que voulez-vous, quand une femme s’est mise une chose en tête, qui diable lui pourrait ôter? Mais le secret de la faire parler, c’est d’avoir de l’argent.

 

            In questa versione è presente un particolare interessante, assente da TI 1700. Per far parlare la pizia, Pasquariel cerca anche nelle scarpe e infine trova una petite pièce da offrire all’oracolo, mentre Arlequin suggerisce al principe di cantare, poiché si tratta di una donna che ama molto la musica. Un diavolo porta allora un liuto ad Octave che comincia a cantare (pp. 328-329):

arlequin             Est-ce que c’est là une femme à petite pièce? Ecoutez, Monsieur, c’est une femme qui aime extrêmement la musique, à la place de l’argent vous n’avez qu’à l’interroger, en chantant elle vous répondra de même.

octave                 Il n’y a rien que je ne fasse pour me contenter. Mais je n’ai point d’instrument.

arlequin             Je vais vous en faire apporter à la bala de chiba [sic.]. (un diable apporte un lut à Octave)

octave                 (Chante)

                                            Tu vois l’amant le plus tendre

                                            que l’amour ait jamais soumis:

                                            si l’espoir d’être heureux est quelquefois permis,

                                            qui peut mieux y prétendre,

                                            que l’amant le plus tendre

 

Tutto questo scambio di batture con Octave che canta, è sostituito in TI 1700 dalla semplice decisione di Arlequin di far parlare gratis la pizia, accompagnata da alcuni lazzi (II.7.105):

arlequin             Vous êtes trop galant homme; et à cause de votre bon naturel, je m’en vais la faire parler gratis (aussitôt on entend un bruit de trompettes et de tambours, et la Pythie descendant de dessus son trépied, chante)

 

Gherardi ha forse temuto che il futuro primo amoroso non sapesse né cantare né suonare?

            Sono assenti in SupTI 1697 alcune battute comiche tra Pasquariel, Arlequin e il principe, suscitate dalle parole pytie (II.7.90) e Apollon, che vengono storpiate da Pasquariel, la cui ignoranza è oggetto di scherno in una battuta di Arlequin e del principe (II.7.91-98).

            Nella scena tra Colombine et Prudent (III.3), l’edizione Gherardi inserisce molte battute che definiscono il conflitto tra i due coniugi, le loro personalità: i rimproveri di Prudent alla moglie sempre assente e indifferente, le risposte insolenti di Colombine che disprezza il matrimonio e ironizza sulla vecchiaia del marito (III.3.5-8). Inoltre in SupTI 1697, forse per una svista, in una battuta Prudent si rivolge alla moglie utilizzando la seconda persona singolare, o forse questa familiarità è dovuta al suo stato di alterazione emozionale. Diversa nelle due versioni l’età del giovane principe: quindici anni in SupTI 1697, mentre venti in IT 1700. Anche le reazioni disperate di Prudent, che assiste impotente al dialogo amoroso tra sua moglie e il principe durante l’incontro che ha lui stesso organizzato (III.6), sono assenti dalla versione SupTI 1697 (III.7), forse perché lasciate all’improvvisazione dell’attore.

            Molto più elaborata con effetti comico-satirici assenti in SupTI 1697, si presenta anche la scena tra Prudent e Arlequin travestito da Pommenville (TI 1700, III.7). Oltre al gioco di parole sul nome di Prudent che i porteurs deformano in Pruneau, Impudent, Pudent, Imprudent (1,3), sono aggiunte molte battute (15-20) di Prudent e di Arlequin, attraverso le quali viene messo in ridicolo il personaggio del normanno Pommenville come per esempio quella di Arlequin che dichiara preferire Dieppe a Parigi, tessendo lodi ridicole dell’ambiente agricolo. Inoltre è aggiunta una battuta di Arlequin che esprime il suo desiderio di cibo, i piatti che si prepara a gustare, nonché quella in cui coglie l’occasione per mettere ironicamente in dubbio la paternità di Prudent, data la presenza di spirito di Angélique (24). Sono aggiunte anche le battute alla fine della scena (36-39) con l’insulto di Arlequin a Prudent prima di andarsene con AngéliqueQuel nigaud! Ah, ah! (il s’en va)»), quelle di Prudent che sospetta di essere stato ingannato da Arlequin/Pommenville, e la scenetta spettacolare con la rissa finale, la portantina che si trasforma in fortezza e il lancio di granate.

            Infine, l’ultima scena della commedia nella versione Gherardi (III.8) presenta molti cambiamenti che riguardano non solo alcuni dettagli, ma anche lo scioglimento dell’azione. In SupTI 1697 il principe attacca Arlequin con una spada e la didascalia annuncia la magia della montagna che avanza (III.12, p. 359: «Il met l’épée à la main, et comme il vient pour frapper Arlequin, qui lui donne un coup de sa baguette, il reste immobile, et la montagne qui paraît dans le fond s’avance»), mentre in TI 1700 la spada è sostituita da una scimitarra e la magia avviene dopo l’annuncio fattone da Arlequin. Inoltre in SupTI 1697 invece del riferimento ai lazzi che fa Arlequin girando intorno al principe con la sua bacchetta magica (III.8.21), si trova un’altra didascalia che spiega che Arlequin canta: «Il chante en donnant plusieurs coups de canne» (p. 360). Ma la differenza più significativa riguarda lo scioglimento dell’azione, con il matrimonio tra i due innamorati, il cui merito in SupTI 1697 è principalmente attribuito a Colombine. Infatti, in questa versione, dopo esssere apparsa sul balcone, dopo la trasformazione della montagna in palazzo, Colombine pronuncia ancora due importanti battute: nella prima, sorta di autogiustificazione morale, si scusa col principe spiegandogli le ragioni del suo innocent plaisir; e nella seconda mette in risalto il potere del principe chiedendogli l’accordo per il matrimonio tra i due innamorati, Angélique e Léandre (p. 362):

colombine          Me pardonnez-vous, seigneur l’innocent plaisir que je me suis fait d’avoir donné de la jalousie à mon époux, et d’avoir fait servir votre tendresse au dessin que je m’en étais proposé.

octave                Ah Madame! Je suis encore trop heureux, que vous m’ayez voulu choisir pour cette entreprise.

colombine          Mais Seigneur ce n’est pas tout, je viens vous demander grace pour deux amants, Angélique et Léandre.

octave                J’y consens de tout mon cœur.

arlequin            Et moi aussi, si Monsieur Prudent n’y consent pas. Vous voilà, bon homme, si vous ne consentez au mariage de Léandre et d’Angélique, je vais vous changer en fromage de Milan.

 

Invece, in TI 1700, Colombine non si manifesta più dopo la sua apparizione al balcone al fianco di Prudent, e tutto il merito viene attribuito ad Arlequin-mago. Gherardi inserisce inoltre il commento di Arlequin circa la rinuncia ragionevole all’amata da parte del principe, considerata tipica di uno straniero rispetto a quella di un francese: «arlequin (À part) Voilà une action qui sent bien son étranger. Un Français n’en serait pas demeuré là.» (III.8.30)

            L’annuncio del divertimento finale, comune alle due versioni, è molto più dettagliato nella didascalia di TI 1700. Inoltre, mentre in SupTI 1697 Arlequin specifica che si tratta di un divertimento concepito per le nozze, in TI 1700, invece, per celebrare la puissance di Arlequin. Poi, la didascalia indica che Mezetin canta travestito da Bacco (mezetin en Bachus, chante; pp. 362-363):

arlequin            Puisque cela est, je vais vous faire part du divertissement que j’avais préparé pour le jour de la noce des épousailles. (il frappe, et le palais se change en treille, et il en sort quantité de danseurs).

mezetin              (En Bachus, chante)

 

Mentre in TI 1700, Mezzetin non appare ed è semplicemente Bacchus che canta e danza e alla fine «beve e versa il vino a tutti i satiri », precisazione assente in SupTI 1697:

arlequin            Et moi, pour célébrer un si heureux jour, je m’en vais vous faire voir un échantillon de ma puissance, et vous donner un divertissement de ma façon. (il frappe le palais de sa baguette. Le palais se change aussitôt en un jardin très agréable, rempli de jets d’eau, et de berceaux. Bacchus suivi de plusieurs satires, s’avance en dansant, et après qu’on a dansé)

bacchus               (Chante)

                                             Vive, vive le Dieu de la tonne.

                                            Avalons le vin qu’il nous donne.

                                            (il boit, et verse du vin à tous les satires) (III.8.32-33)

 

Questi ultimi mutamenti si possono spiegare con il desiderio da parte di Gherardi di celebrare il personaggio di Arlequin da lui recitato.

 

Didascalie, rafforzamento dell’elemento spettacolare

Dalla versione SupTI 1697 le didascalie sono molto ridotte rispetto all’edizione Gherardi. Per fare qualche esempio, ci concentreremo sulle didascalie che descrivono effetti spettacolari (lazzi, scenografia, danza).

            I lazzi di Arlequin e Mezetin in SupTI 1697 (I.3) sono appena tratteggiati:

arlequin            Ça, ça. Voulez vous jouer un pied ou une main d’oublies, ensemble?

mezetin              Volontiers: et par dessus cela, je vais vous régaler de ma chanson. (Mezetin tire un cornet et trois dès).

mezetin              Allons, allons, Monsieur, écoutez. (il chante) (p. 277)

 

Segue la didascalia posta graficamente al lato della canzone: Arlequin fouille dans le corbillon et prend les oublies qu’il mange (p. 277).

            Molto più numerose e dettagliate le didascalie in TI 1700 (I.3.50-55):

arlequin            Ca, ça, voulez-vous jouer une main ou un pied d’oublies ensemble?

mezzetin            Volontiers, et par dessus tout cela, je vais vous régaler de ma chanson.

                              (il s’agenouillent tous deux à terre, le corbillon au milieu d’eux. Mezzetin tire un cornet et trois dès, et de temps en temps, crie: La vie, la vie; ce qui oblige Arlequin à se lever, et à chercher tout autour de lui. Après avoir fait plusieurs fois le même lazzi).

arlequin            (Regardant Mezzetin au visage, lui dit): N’avez-vous jamais vendu d’eau de vie?

mezzetin            Non, Monsieur. Mais remettez-vous donc à votre place si vous voulez jouer.

                              (Arlequin se replace à côté de Mezzetin, un genou à terre, et regarde de temps en temps dans le corbillon, pendant que Mezzetin chante)

mezzetin            (Chante)

[...]

arlequin            (Ayant la bouche pleine d’oublies qu’il a prises dans le corbillon pendant que l’autre chantait, contrefait Mezzetin, et répète en bredouillant)

                              Et le jour elles sont pour nous.

 

            La scena tutta italiana I.6 è assente in SupTI 1697, forse non segnalata nel testo, ma comunque prevista nello spettacolo dagli attori?

                        C’est une scène toute italienne. Pasquariel vient avec un flambeau allumé, suivi d’un de ses amis, qui tient une bouteille et un verre. Et comme toute l’attention de Pasquariel est tournée du côté de la bouteille, il ne songe qu’à la vider, sans prendre garde à ce que son maître lui dit; ce qui fait qu’il ne répond jamais juste aux demandes du Prince, qui lasse de ses impertinences, l’observe attentivement, et le surprenant avec un verre à la main, lui donne un coup de pied dans le ventre, et s’en va. Pasquariel tombe en arrière, fait la culbute sans renverser le verre de vin, se lève, le boit; et voulant s’en aller, il s’arrête voyant venir Arlequin habillé en femme.

 

            Sono invece presenti in SupTI 1697 didascalie che spiegano i procedimenti scenotecnici che producono l’illusionismo (assenti in TI 1700, I.11):

arlequin            C’est que c’est une poche à la mode. Dans les poches d’à présent, il n’y a rien. Mais, Monsieur, je vais vous faire voir une feuille qui vous charmera.

                              (on ouvre, et l’on voit Colombine avec un Cavalier: on ne voit que la tête véritable de Colombine, le reste du corps et le cavalier sont peints) (SupTI 1697, I.13, p. 293)

arlequin            C’est que c’est une poche à la mode. Dans les poches d’à présent il n’y a rien. (Au Prince) Mais, Monsieur, je vais vous faire voir une feuille qui vous charmera. (Arlequin fait voir une autre feuille du paravent, où Colombine paraît, avec un Cavalier à ses genoux) Eh bien, que dites-vous de cette feuille-là? (TI 1700, I.11.24)

 

arlequin            Allons, montrez ces paravents.

scaramouche     Mais, Monsieur, il faut les porter dans la chambre.

arlequin             Tout à l’heure.

                              (on lève les paravents de l’autre côté de celui que l’on a montré au Prince, et on voit une paysane peinte.)

                              Tenez ceci est Madame Simonne, quand elle ratissait des navets, voilà une autre feuille

                              (on ouvre la dernière feuille, l’on voit Mezetin et un joueur de flute, qui joue. Et Mezetin chante ce qui suit, il n’a que la tête, le reste du corps est peint) (SupTI 1697, I.14, p. 296)

arlequin            Ne voulez-vous que cela? Vous allez être bientôt content. Allons, qu’on lève encore ces paravents.

                              (on dresse les paravents de haut en bas, et l’on y voit une servante avec une botte de raves à la main)

prudent              (Étonné du changement) Qu’est-ce que cela?

arlequin            C’est Madame Simonne quand elle ratisse les navets. Mais je veux vous faire voire quelque chose de plus joli (il déploie une autre feuille de paravent, où est Mezzetin en flamand, fumant une pipe, avec un autre Flamand qui tient une flûte d’Allemagne à la bouche)

prudent              Voilà qui est fort drôle. (TI 1700, I.11.44-46)

 

            Nell’ultima scena del primo atto, in SupTI 1697 è assente la didascalia che descrive il colpo di scena finale nel quale Arlequin apre un altro paravento da cui esce un uomo con la pistola in pugno che minaccia Prudent e lo prende per la cravatta (I.11.52-53). Nel terzo atto è assente quella della fine della scena 7, che descrive la rissa tra i domestici di Prudent e i porteurs di Arlequin/Pommenville, con la trasformazione della portantina in fortezza e scoppi di granate (III.7.34).

            La lunga didascalia che descrive la pantomima di Arlequin durante la scena dei lamenti per la morte di Maître André (IT 1700, II.1.39), in SupTI 1697 è molto più sintetica e incompleta, manca il riferimento ai tre cappelli:

                              Arlequin apporte trois manteaux, un long pour Scaramouche, deux courts pour lui, et Mezetin, les habille et leur donne à chacun un petit papier, qu’il tire de sa poche. (SupTI 1697, II.2, p. 301)

arlequin            (Revient ayant trois manteaux noirs sur ses épaules, trois chapeaux noirs pointus sur sa tête, avec des crêpes trainant jusqu’à terre. Dans cet équipage il passe devant Mezzetin et Pasquariel en marchant gravement, et après avoir fait le tour du Théâtre sans rien dire, il se campe au milieu d’eux, et leur faisant signe du doigt de garder le silence, il ôte son premier manteau qui est le plus long, et le met sur les épaules de Pasquariel, puis lui ôte sa toque, et lui met à la place un des trois chapeaux noirs. Il fait la même chose à Mezzetin, de manière qu’après cela ils paraissent tous trois avec chacun un manteau noir, et un chapeau pointu sur la tête. Dans cet équipage Arlequin tire trois papiers de sa poche, et en donne un à Pasquariel, un à Mezzetin, et garde le troisième pour lui) (IT 1700)

 

            Anche la didascalia che descrive il concerto comico dei tre personaggi, alla fine della scena, presenta molti meno dettagli sui gesti e gli strumenti. Per esempio, dice semplicemente: «Arlequin fait la flute» (II.2, p. 302), mentre in IT 1700 si specifica che Arlequin fa una parodia: «Chante sur le ton du deuil d’Alceste) [...] (après quoi il contrefait la flûte avec sa gorge sur le même ton. Ensuite tous trois ensemble reprennent [...] (II.1.46).

            La didascalia che indica il lazzo con il quale Pierrot fa danzare e cadere a terra Prudent («il le fait danser, et le pousse à terre»; II.3.28) è assente in SupTI 1697 (II.3); mentre chiude la scena l’imprecazione di Prudent: «Va t’en au diable. As-tu envie de me rompre les bras?», assente invece in IT 1700.

            Sono anche assenti da SupTI 1697 anche le didascalie della lettera di Pommenville (II.5, p. 308); e anche quelle della scena del dépit amoureux tra Léandre e Angélique a causa dell’equivoco della lettera di Pierrot consegnata per sbaglio ad Angélique invece di quella di Léandre (II.8, pp. 314-316).

            Anche le didascalie dell’ultima scena del secondo atto sono molto ridotte (SupTI 1697, II.10). In quella iniziale che descrive la scenografia è assente la descrizione della posizione e azione di Arlequin: «Le théâtre représente un bois»(p. 317). Mentre in TI 1700, II.7 si legge:

                        Le théâtre représente un bois, et un gros rocher au milieu.

                              Le Prince, Pasquariel, Arlequin caché derrière le rocher, faisant l’écho.

 

            In SupTI 1697, l’ingresso dei diavoli è segnalato da una didascalia che precisa il tipo di formazione per la danza: «Il frappe de sa baguette. Il sort cinq diables dont quatre forment une entrée, l’autre chante» (p. 324).

            Mentre in TI 1700, questa precisazione è assente: «il frappe de sa baguette, et il sort des ailes du théâtre quatre démons dansants et un démon qui chante» (II.7.7).

 

Presenza della lingua italiana

In SupTI 1697, parole e battute in italiano sono quasi del tutto assenti e l’italiano è spesso scorretto, come nella scena I.3 (la battuta in SupTI 1697 con il numero di pagina, è seguita dalla versione IT 1700 con il numero di battuta):

mezetin              Come Arliquino è qui? (p. 271)

mezzetin            (Surpris) Come? Arlicchino è qui? (4)

 

arlequin             Siason qui una, grand merveille si à son qui. (p. 271)

arlequin             (D’un ton ferme) Signor , son qui. Una cosa ben straordinaria! Ah son qui, ah son qui. Mais, tout beau, ne faisons pas le brave à contretemps; la prudenza è la virtù dei poltroni, et à gens de ma sorte notre dos est souvent le médiateur des différents. (5)

 

mezetin              Puisqu’Arlequino è qui, o voglio me divertir de lui. (p. 271)

mezzetin            Poichè Arlicchino è qui, voglio divertirmi di lui (6)

 

arlequin             Tranquile bourgeois, qui dormez en repos, que cela me doit donner d’envie, car le sort vous prépare mille et mille fortunes. Il est permis aux chats de vos gouttières... Mezetin fait le chat (p. 271)

arlequin             (En se promenant) Tranquilli bourgeois, che dormite tranquillamente, che la vostra sorte me doit faire envie! Il vostro sonno vi prepara momenti fortunati; et il est permis aux chats de vos gouttières...

mezzetin            (Contrefaisant le chat) Miaou, miaou. (7-11)

 

            Quasi tutti gli altri inserti d’italiano (scene I.7-9) sono assenti in SupTI 1697, a parte l’espressione rivolta da Arlequin al principe «Fermati, temerario» (III.8.13), che ritroviamo leggeremente modificata in «Ferma temerario» (III.12, p. 359). E al posto del termine italiano mago pronunciato da Pasquariel (II.7.33) che Arlequin riprende nella battuta seguente in francese («Ah, Magot vous-même»), in SupTI 1697 entrambi i personaggi ricorrono al termine francese magot (p. 320), evidentemente confondendo a causa dell’omonimia, i due termini aventi significati ben diversi nelle due lingue (scimmia/mago). L’impressione è che il redattore della versione 1697 non conosca l’italiano e che quindi trascriva le parole foneticamente.

            In SupTI 1697, il canto del principe suscita quello della pizia, seguito da una canzone di Scaramouche in un francese familiare (II.11, p. 330):

scaramouche     (Chante)

                                             Je voudrais bien Madame épouser Olivette,

                                             mais quand elle sera ma femme,

                                             fera t-elle la coquette?

                                             Par la vertu de mon âme,

                                            je lui casserais la tête.

 

Mentre in IT 1700 la canzone in gergo franco-italiano produce un effetto molto più comico (II.7.105):

pasquariel          (Imitant l’air de la Pythie)

                                             Io vorrei ben, Madama,

                                             esposar Olivetta, ta, ta, ta.

                                             Ma quando sarà ma fama,

                                            sarà-t-ella coquetta?

                                             Par la merci, ci, ci, ci, de mon amor

                                             je lui casserai bien la testa

 

            In sintesi, il testo dell’edizione Gherardi (TI 1700) è molto più accurato, più completo, più ricco di personaggi, battute, didascalie rispetto alla versione del 1697 (SupTI 1697). La sintassi è in alcuni casi modificata, con inversioni di parti di frasi o di frasi intere. Sia lo stile comico-satirico che la vena patetico-sentimentale, espressa dal personaggio del principe, appaiono rafforzati, rispetto alla versione SupTI 1697, dalla quale sono invece assenti molte battute satiriche e quasi tutti i monologhi in versi del principe. Anche l’elemento spettacolare è più ampiamente sviluppato, grazie alle didascalie molto più numerose e dettagliate nella descrizione dei vari procedimenti scenici e degli effetti ottenuti con macchine, che spesso invece non troviamo nell’edizione SupTI 1697 (a parte alcune didascalie tecniche che spiegano i meccanismi per realizzare gli effetti speciali d’illusione nella scena I.11 con i paraventi). Inoltre risulta notevolmente aumentata la parte di Arlequin nello scioglimento finale dell’azione. La versione TI 1700 appare anche più accurata per quanto riguarda la lingua, sia quella francese che gli inserti in italiano, quasi tutti assenti in SupTI 1697.

 

 

 

 

Bibliografia citata

 

Opere

B ***, Arlequin défenseur du beau sexe (1694), in Évariste Gherardi, Le Théâtre Italien de Gherardi, ou Le Recueil général de toutes les comédies et scènes françaises jouées par les Comédiens Italiens du Roi, pendant tout le temps qu’ils ont été au service. Enrichi d’estampes en taille-douce à la tête de chaque comedie, à la fin de laquelle tous les airs qu’on y a chantés se trouvent gravés notés avec leur basse-continue chiffrée, Paris, Jean-Baptiste Cusson et Pierre Witte, 1700, 6 voll., vol. V, pp. 183-292.

_____, La Fontaine de sapience (1694), ivi, vol. V, pp. 293-334.

_____, Le Tombeau de Maître André (1694), ivi, vol. V, pp. 485-512.

_____, La Thèse des Dames ou le Triomphe de Colombine (1695), ivi, vol. VI, pp. 1-86.

_____, Arlequin misanthrope (1696), ivi, vol. VI, pp. 483-596.

Baron, Michel, Le Coquet trompé ou Le Rendez-vous des Tuileries, comédie en trois actes et en prose, Paris, Guillain, 1686.

____________, La Coquette et la fausse Prude, comédie en cinq actes et en prose, Paris, Guillain, 1687.

____________, Théâtre complet, vol. I, éd. Ioana Galleron et Barbara Sommovigo, Classiques Garnier, Paris, 2015.

Boileau, Nicolas, Satires, Epîtres, Art poétique, éd. Jean-Pierre Collinet, Paris, Gallimard, 1985.

Boisfranc, Les Bains de la porte Saint-Bernard (1696) in Gherardi, É., Le Théâtre Italien, cit., vol. VI, pp. 361-482.

Bourette, Charlotte, La Coquette punie, par Mme Bourette, ci-devant la Muse Limonadière, Paris, Versailles, 1779.

Corneille, Thomas - Donneau de Visé, Jean, La Devineresse ou les Faux Enchantements, Paris, Blageart, 1680.

Dancourt, Florent Carton, L’Été des coquettes (1690), Théâtre du XVIIe siècle, éd. Jacques Truchet et André Blanc, Paris, Gallimard (Pléiade), 1992, vol. III, pp. 425-449.

Delosme De Montchenay, Jacques, La Cause des Femmes (1687), in Gherardi, Le Théâtre Italien, cit., vol. II, pp. 1-76;

___________________, Les Souhaits (1693), ivi, vol.V, pp. 1-76.

De Pure, Michel, La Prétieuse, ou le mystère des ruelles. Dédiée à telle qui n’y pense pas (1656-58), éd. Emile Magne, Paris, Droz, 1938.

Desportes, Claude-François, La Veuve Coquette (1721), Paris, Briasson, 1732.

Destouches, Philippe Néricault, Le Philosophe marié ou le Mari honteux de l’être (1727), éd. Gabriele Vickermann-Ribémont, Genève, Droz, 2010.

Donneau De Visé, jean, La Mère coquette ou les Amants brouillés, La Veuve à la mode, Les Dames vengées ou La Dupe de soi-même, in id., Trois comédies, éd. Pierre Mélèse, Paris, Droz, 1940.

Dorat, Charles-Joseph, La Feinte par amour, Paris, Delalain, 1773.

Dufresny, Charles, Le Départ des comédiens, in Gherardi, Le Théâtre italien, cit., vol. V, pp. 335-360.

_______________ (in collaborazione con B ***), Pasquin et Marforio, médecins des mœurs, ivi, vol. VI, pp. 597-658.

_______________, Les Fées, ou les Contes de ma mère l’oye, ivi, vol. VI, pp. 659-682.

_______________, La Coquette de village ou le Lot supposé (1715), Paris, Ribou, 1715.

Fatouville, Anne Moduit Noland De, Arlequin Protée (1683) in Gherardi, Le Théâtre Italien, cit., vol. I, pp. 83-134.

Fatouville, Anne Moduit Noland De, Arlequin Empereur de la lune (1684), ivi, vol. I, pp. 135-204.

__________________________________, Le Banqueroutier (1687), ivi, vol. I, pp. 421-520.

__________________________________, Colombine, femme vengé (1689), ivi, vol. II, pp. 275-360.

__________________________________, La Précaution inutile, a cura di Lucie Comparini, Venezia-Santiago de Compostela, lineadacqua, 2014 (http://www.usc.es/goldoni)

Favart, Charles-Simon, La Coquette sans le savoir, Paris, Prault, 1744.

____________________, La Coquette trompée (1758), in Favart (C.-S.), Théâtre de M. et Mme Favart, I, Paris, Duchesne, 1763 (ristampa Genève, Slatkine, 1971).

Gaubier de Barrault, Sulpice Edmé, La Fausse Coquette, La Haye, chez H. Constapel, 1761.

Gherardi, Évariste (a cura di), Le Théâtre Italien de Gherardi, ou Le Recueil général de toutes les comédies et scènes françaises jouées par les Comédiens Italiens du roi, pendant tout le temps qu’ils ont été au service, cit.

_________________, Le Théâtre italien, vol. I, textes établis, présentés et annotés par Charles Mazouer, Paris, Société des Textes Français Modernes, 1994.

________________, Le Théâtre italien, vol. II, Les comédies italiennes de J. F. Regnard, textes établis, présentés et annotés par Roger Guichemerre, Paris, Société des Textes Français Modernes, 1996.

Goldoni, Carlo, I due gemelli veneziani, in Id., Tutte le opere, a cura di Giuseppe Ortolani, Milano, Mondadori, 1936, vol. II.

______________, Mémoires pour servir à l’histoire de sa vie et de son théâtre, éd. Norbert Jonard, Paris, Aubier, 1992.

______________, La cameriera brillante, a cura di Roberto Cuppone, introduzione di Paolo Puppa, Venezia, Marsilio, 2002.

______________, La locandiera, a cura di Sara Mamone e Teresa Megale, Venezia, Marsilio, 2007.

Guyot de Merville, Michel, La Coquette punie, S. l. n. d., in Œuvres de théâtre de M. Guyot de Merville, Paris, Veuve Duchesne, 1766, 3 vol. in-12, pp. 193-276.

La Noue, Jean-Baptiste Sauvé De, La Coquette corrigée, Paris, P. G. Lemercier, 1756.

Lantier Etienne-François de, Les Coquettes rivales, 1786, in Oevres complètes, Paris, A. Betrand, 1836.

Marivaux, Pierre Carlet De Chamblain De, Théâtre complet, éd. Jacques Schérer, présentation et notes de Bernard Dort, Paris, Seuil, 1964.

Molière, Oeuvres complètes, éd. dirigée par Georges Forestier et Claude Bourqui, textes établis par Edric Caldicott et Alain Riffaud, Paris, Gallimard, 2010 (édition de la Pléiade).

Monvel, Jacques-Marie Boutet de, L’Amant bourru, Paris, Duchesne, 1777.

Poisson, Raymond, Les Femmes coquettes (1691), in Oeuvres de M. Poisson, vol. II, Paris, Ribou, 1773.

Quinault, Philippe, La Mère coquette ou les Amants brouillés, Paris, 1666.

________________, Les Festes de l’amour et de Bacchus, pastorale, imprimé pour la première fois partition générale, Paris, J.B.C. Ballard, 1717; Béziers, Société de Musicologie du Languedoc, 1992.

________________, Alceste ou le triomphe d’Alcide, 1674.

________________, Amadis, 1684.

Regnard, Jean-françois, Le Divorce, in Gherardi, Le Théâtre Italien, cit., vol. II, pp. 107-202.

____________________, La Déscente de Mezzetin aux enfers, ivi, vol. II, pp. 361-405.

____________________, La Coquette ou l’Académie des Dames, in Il Théâtre Italien di Gherardi, Otto commedie di Fatouville, Regnard e Dufresny, presentate da Marcello Spaziani, Roma, Edizioni dell’Ateneo, 1966.

Regnard, Jean-françois - Dufresny, Charles, La Baguette de Vulcain (1693), in Gherardi, Le Théâtre Italien, cit., vol. IV, pp. 279-314.

Sade, Donatien Alphonse François de, Azélis ou la Coquette punie, comédie-féérie en un acte et en vers libres, (1790), in Le Théâtre de Sade, préface de Jean-Jacques Brochier, 3, pp. 255-314, in Oeuvres complètes, vol. XXXIV, Paris, Jean-Jacques Pauvert, 1970; cfr. anche, Oeuvres complètes du Marquis de Sade, XIV, ed. Annie Le Brun - Jean-Jacques Pauvert, Paris, Pauvert, 1991.

Supplément du Théâtre Italien, ou Nouveau Recueil des comédies et scènes françaises qui ont été jouées sur le Théâtre Italien par les Comédiens du Roi de l’Hôtel de Bourgogne à Paris. Tome troisième, Amsterdam, Adrian Braakman, 1697.

Vigée, Louis-Jean-Baptiste-Étienne, La Fausse Coquette, Paris, Prault, 1784.

Voisenon, Claude Henri de Fusée abbé de, La Coquette fixée, Paris, Jacques Clousier, 1746.

 

 

Fonti critiche

Annales dramatiques ou Dictionnaire général des théâtres, Paris, 1808-1812 (ristampa Genève, Slatkine, 1967).

Calame, Alexandre, Regnard. Sa vie et son œuvre. Thèse pour le Dottorat ès lettres, présentée à la faculté des lettres et des sciences humaines de l’université de Paris, Paris, P.U.F., 1960.

Campardon, Emile, Les Comédiens du roi de la Troupe italienne pendant les deux derniers siècles: documents inédits recueillis aux Archives Nationales, Paris, Berger-Levrault, 1880, 2 voll.(ristampa Genève, Slatkine Reprints, 1970).

________________, Les Spectacles de la foire: Théâtres, Acteurs, Sauteurs et Danseurs de corde, Monstres, Géants, Nains, Animaux curieux ou savants, Marionnettes, Automates, Figures de cire et jeux mécaniques des Foires Saint-Germain et Saint-Laurent, des Boulevards et du Palais-Royal: depuis 1595 jusqu’à 1791. Documents inédits recueillis aux Archives Nationales, Paris, Berger-Levrault et C.ie, 1877, 2 voll.

D’Origny, Antoine, Annales du Théâtre Italien depuis son origine jusqu’à ce jour, Paris, Veuve Duchesne, 1788, I.

Du Gerard, N. B., Tables alphabétique et chronologique des pièces représentées sur l’ancien théâtre Italien, depuis son établissement jusqu’en 1697 qu’il a été fermé, avec des remarques sur ces pièces et une table alphabétique des auteurs qui ont travaillé pour ce théâtre, Paris, Imprimerie de Prault, 1750 (ristampa Genève, Slatkine, 1970).

De Léris, Antoine, Dictionnaire portatif historique et littéraire des théâtres, Paris, Jombert, 1763 (ristampa Genève, Slatkine, 1970).

Maupoint, Bibliothèque des théâtres, contenant le catalogue alphabétique des Pièces Dramatiques, Opéra, Parodies, et Opéra Comiques; et le tems de leurs Représentations. Avec des Anecdotes sur la plupart des Pièces contenues en ce Recueil, et sur la vie des Auteurs, Musiciens et Acteurs, Paris, chez Laurent-François Prault, au bout du Pont Neuf, Quay de Conty, à la Charité, 1733.

Parfaict, François e Claude, Mémoires pour servir à l’histoire des spectacles de la foire, 2 voll., Chez Briasson, Libraire, rue S. Jacques, à la Science et à l’Ange Gardien, 1743.

Parfaict, François e Claude - Godin D’Abguerbe, Quentin, Dictionnaire des théâtres de Paris, Contenant Toutes les Pieces qui ont été représentées jusqu’à présent sur les différens Théâtres François, & sur celui de l’Académie Royale de Musique: les Extraits de celles qui ont été jouées par les Comédiens Italiens, depuis leur rétablissement en 1716, ainsi que des Opéra Comiques, & principaux Spectacles des Foires Saint Germain & Saint Laurent. Des faits Anecdotes sur les Auteurs qui ont travaillé pour ces Théâtres, & sur les principaux Acteurs, Actrices, Danseurs, Danseuses, Compositeurs de Ballets, Dessinateurs, Peintres de ces Spectacles, &c., Paris, Rozet, 1767, 7 voll.

Parfaict, François e Claude , Histoire du Théâtre français, année 1685, vol. III (ristampa Genève, Slatkine, 1967).

 

 

Saggi

Angelini, Franca, Lazzo (s. v.), in Enciclopedia dello Spettacolo, a cura di Silvio D’Amico, Roma, Le Maschere, 1954-1968, 12 vol. VI, pp. 1307-1308.

Attinger, Gustave, L’esprit de la commedia dell’arte dans le théâtre français, Paris, Neuchatel, 1950.

Bengloan, Bernard, La Muette. Le théâtre en suisse romande, 1960-1992, Lausanne, Paris, L’Âge d’homme, 1994.

Bonassies, Jules, Comédie-Française, Histoire administrative, Paris, Didier, 1874.

Bourqui, Claude - Vinti, Claudio, Molière à l’école italienne. Le lazzo dans la création moliéresque, Torino-Paris, L’Harmattan, 2003.

Bray, René, La Préciosité et les précieux. De Thibaud de Champagne à Jean Giraudoux, Paris, Nizet, 1968.

Brenner, Clarence Dietz, A Bibliographical List of Plays in the French Language 1700-1789, Berkeley, The Associated Students Store, , 1947.

______________________, The Theatre Italien. Its repertory, 1716-1793, Berkeley and Los Angeles, University of California Press, 1961.

De Jean, Joan, Ancients Against Moderns: Culture Wars and the Making of a Fin de Siècle, Chicago, University of Chicago Press, 1997.

De Luca, Emanuele, Lazzo: enjeux poétiques et esthétiques d’un intraduisible italien au XVIIe siècle français, in Les Mots et les choses du théâtre, a cura di M. Vuillermoz - A. Cayuela - S. Blondet Genève, Droz, 2017.

__________________, Il repertorio della Comédie-Italienne di Parigi / Le répertoire de la Comédie-Italienne de Paris (1716-1762), Paris, IRPMF, 2011.

__________________, Il Théâtre Italien (a cura) di Evaristo Gherardi, in Goldoni «avant la lettre»: esperienze teatrali pregoldoniane (1650-1750), a cura di Javier Gutiérrez Carou, Venezia, lineadacqua, 2015, pp. 135-145.

Francillon, Roger (éd.), Histoire de la littérature en Suisse romande, Carouge, Editions Zoé, 2015.

Gambelli, Delia, Arlecchino a Parigi, Roma, Bulzoni, 1993, 2 voll.

Garapon, Robert, La Fantaisie verbale et le comique dans le théâtre français du Moyen Âge à la fin du XVIIè siècle, Paris, Colin, 1957.

Gidel, Henri, Le Vaudeville, Paris, Presses Universitaires de France, 1986.

Grout, Donald Jay, The music of the italian Théatre at Paris, 1682-97, «Papers of the American Musicological Society», 1941, pp. 158-170.

Guardenti, Renzo, Gli Italiani a Parigi. La Comédie italienne (1660-1697). Storia, pratica scenica, iconografia, 2 voll., Roma, Bulzoni, 1990.

_______________, Le Fiere del teatro. Percorsi del teatro forain del primo Settecento. Con una scelta di commedie rappresentate alle Foires Saint-Germain e Saint-Laurent (1711-1715), Roma, Bulzoni, 1995.

Guerci, Luciano, La Discussione sulla donna nell’Italia del Settecento. Aspetti e problemi, Torino, Tirrenia Stampatori, 1987-1988.

Guery, Alain, La Pologne vue de France au xviiie siècle, «Cahiers du Centre des recherches historiques», 7, 1991 (http://ccrh.revues.org/2842).

Hommage à Jean Kiehl, «Journal du Théâtre Populaire Romand», 164, 1985 (La Chaux-de-Fonds).

Jolibert, Bernard, La commedia dell’arte et son influence en France du XVIe au XVIIIe siècle, Paris, L’Harmattan, 1999.

Jones, Louisa, Sad Clowns and Pales Pierrots, Paris, J.-M. Place, 1984.

Kiehl, Jean, Les Ennemis du théâtre, essai sur le rapport du théâtre avec le cinéma et la littérature, 1914-1939, Neuchâtel, La Baconnière, 1951.

Kirkness, W. John, Le Français du Théâtre italien d’après le Recueil de Gherardi, 1681-1697, Genève, Droz, 1971.

Lancaster, Henry Carrington, A History of French Dramatic Literature in the Seventeenth Century, The Johns Hopkins University Press, Baltimore, London - Paris, 1929-1942.

Lecercle, François, ‘La mort par les yeux’: comédie, scandale et théâtrophobie, «Méthode!» 2013, pp. 261-277.

Mazouer, Charles, Le Théâtre d’Arlequin. Comédies et comédiens italiens en France au XVIIe siècle, Brescia - Paris, Schena Editore - Presses de l’université de Paris-Sorbonne, 2002.

Moureau, François, Dufresny, auteur dramatique (1657-1724), Paris, Editions Klinksieck, 1979.

_________________, Présence d’Arlequin sous Louis XIV. De Gherardi à Watteau, Paris, Klinksieck, 1992.

Niderst, Alain, La bigarrure de prose et de vers dans les textes classiques , in Thèmes et genres littéraires au XVII° et XVIII° siècles. Mélanges en l’honneur de Jacques Truchet, Paris, Presses Universitaires de France, pp. 167-171.

Pougin, Arthur, Dictionnaire historique et pittoresque du théâtre e des arts qui s’y rattachent, Paris, Firmin-Didot, 1885.

Prévost, Michel - D’Amat, Roman (éd.), Dictionnaire de Biographies françaises, vol. V, Paris, Letouzey et Ané, 1951.

Scannapieco, Anna, Goldoni avant et après la lettre (divagazioni proemiali), in Goldoni “avant la lettre”: esperienze teatrali pregoldoniane (1650-1750), a cura di Javier Gutiérrez Carou, Venezia, lineadacqua, 2015, pp. 25-41.

Scognamiglio, Giuseppina, Le donne di Carlo Goldoni tra Venezia e Napoli, Napoli, ESI, 2011.

_______________________, Ritratti di donna nel teatro di Carlo Goldoni, presentazione di Dante della Terza, Napoli - Roma, ESI, 2002.

Scott, Virginia, The commedia dell’arte in Paris 1644-1697, Charlottesville, University press of Virginia, 1990.

Spaziani, Marcello, Il Théâtre Italien di Gherardi, Otto commedie di Fatouville, Regnard e Dufresny, Roma, Edizioni dell’Ateneo, 1966.

Spielmann, Guy, Le jeu de l’ordre et du chaos. Comédie et pouvoir à la fin du Règne, 1673-1715, Paris, Champion, 2002.

Stewart, Pamela D., Les femmes savantes e la poetica della ‘naturalezza’, in Ead., Goldoni fra letteratura e teatro, Firenze, Olschki, 1989, pp. 161-194.

Storey, Robert F., Pierrot: A Critical History of a Mask, Princeton, Princeton University Press, 1978.

Venard, Michèle, La Foire entre en scène, préface de Georges Couton, Paris, Librairie Théâtrale, 1985.

Vescovo, Piermario, «La peinture des faiblesses». Libertà e ‘delicatezza insidiosa’ nella Locandiera, «Problemi di critica goldoniana», I, 1994, pp. 299-317.

Viennot, Eliane, Revisiter la «querelle des femmes»: discours sur l’égalité-inégalité des sexes, de 1750 aux lendemains de la Révolution, éd. Éliane Viennot, in collaborazione con Nicole Pellegrin, Saint-Etienne, Publications de l’Université de Saint-Etienne, 2012.

 

 

 



[1] Guardenti, Gli Italiani a Parigi, cit., vol. II, fig. 83, p. 149.

[2] Per maggiori dettagli su questa raccolta cfr. Comparini - De Luca, Le Théâtre Italien di Evaristo Gherardi. Introduzione, cit.

[3]https://books.google.fr/books?id=H1M6AAAAcAAJ&pg=PP12&lpg=PP12&dq=fausse+coquette+dans+Suppl%C3%A9ment&source=bl&ots=dEg4uhKr10&sig=NWf1w3oycmi7FgBS5hCyl7lZh8E&hl=fr&sa=X&ei=jS8QVbbDB5DuaIPwgqgK&ved=0CC4Q6AEwBA#v=onepage&q=fausse%20coquette%20dans%20Suppl%C3%A9ment&f=false

[4] «... il me semble que ce troisième a quelque avantage sur les deux autres, en ce que presque toutes les pièces en sont suivies et complètes [...] Quoi que toutes les pieces ne soient pas de la même force, on peut dire neanmoins que toutes sont tournées avec esprit. Les expressions en sont heureuses, vives, et naturelles, et n’en déplaise à ces scrupuleux qui condamnent sans quartier tout ce qui s’appelle Comédie, celles qu’on donne ici ne seront pas inutiles pour faire connoître le coeur humain, pour découvrir les secrets ressorts qui font agir les hommes, et pour reduire sur le pied de la vérité les beaux pretextes dont ils savent si bien colorer les démarches les plus criminelles» (p. 3).

[5] L’Union des Deux opéra; La Fontaine de Sapience; La Fausse Coquette; Attendez moi sous l’orme; Le Retour de la foire de Bezons; Arlequin misanthrope; Pasquin et Marforio, medecins des moeurs. Alla fine del volume sono inseriti i testi seguenti con date diverse: 1) Scènes françaises de la Comédie Italienne: La Foire Saint Germain (Grenoble, 1696); 2) Les Fées ou Contes de la mère l’oye (1697).

[6] Reintegriamo tra parentesi quadre alla lista originale i personaggi che sono stati dimenticati nell’edizione di Gherardi e di cui non si sa chi recitasse la parte. Distinguendo tra due categorie separate da una riga bianca: la prima comprende i ruoli della compagnia e i personaggi corrispondenti, più le parti non chiaramente assegnate, forse delle doppie parti; la seconda i travestimenti interni, e le altre parti recitate da Arlequin, Intriguant. Come spiegato nella Prefazione, nel caso di Arlequin la situazione è più complessa poichè quelle di pittore e di mago non sono veramente doppie parti, ma declinazioni della sua natura proteiforme.

 

octave, Prince polonais (Giovanni Battista Costantini )

m. prudent, Gouverneur du Prince Cinthio (Marco-Antonio Romagnesi)

colombine, femme de M. Prudent (Caterina Biancolelli)

angélique, nièce de M. Prudent (Angelica Toscano, dite Angélique ou Marinette)

lÉandre, Amant d’Angélique (Charles-Virgile Romagnesi de Belmont)

arlequin, Intriguant (Evaristo Gherardi)

mezzetin, Valet de Léandre (Angelo Battista Costantini)

pierrot, domestique de M. Prudent (Giuseppe Geratoni o Jératon)

dame françoise, domestique de M. Prudent

pasquariel, Valet d’Octave

[maitre jacques,]

[un porteur des lettres]

[un porteur de chaise]

 

[un tailleur, Léandre]

un tailleur,

un peintre,

un normand, (Arlequin)

un magicien,

 

Plusieurs démons

[7] Octave, Prince polonais: Giovan Battista Costantini (16??- 15 maggio 1721), primo innamorato, recita la parte del principe dal 1688 al 1697. In La Fausse Coquette è sempre indicato come Le Prince, tranne due volte come Octave (I.6; II.7.76). Figlio di Costantino Costantini, attore della Comédie-Italienne, conosciuto col nome di Gradelin, e fratello di Angelo Costantini conosciuto col nome di Mezzetin, questo attore era anche molto abile nella danza e nella musica. Secondo Parfaict era bello («il est bien fait de sa personne») e cantava anche piuttosto bene.[7] Nella commedia si evocano scambi con la Polonia (I.10), nazione con la quale la Francia intrattiene relazioni molto profonde da sempre. Dalla fine del XVII secolo i rapporti di viaggio su questo paese mettono in evidenza il ritardo economico e sociale, la miseria dei contadini, l’opulenza dell’aristocrazia. Dunque il principe polacco della nostra commedia è un esempio di quest’aristocrazia molto ricca e potente, che spesso inviava i suoi giovani membri in Francia a formarsi sotto la guida di un precettore. Troviamo il personaggio di un finto polacco nella commedia di Hauteroche, Le Feint polonais ou La Veuve impertinente (1686), in tre atti, in prosa (un capitano di cavalleria si deve travestire da polacco per potersi sposare con la figlia di un banchiere che si oppone al matrimonio a causa di un conflitto con il padre del giovane).

[8] M. Prudent, Gouverneur du Prince Cinthio: Marco-Antonio Romagnesi detto Cinthio (1633-28 ottobre 1706) dal 1694. Prudent è Gouverneur, vale a dire precettore del giovane principe polacco.

[9] Colombine, femme de M. Prudent: Caterina Biancolelli, dite Colombine (1665-22 février 1716, figlia di Dominique Biancolelli. Comincia a recitare a 18 anni (1683) sulla scena della Comédie-Italienne, fino alla chiusura del teatro nel 1697, anno in cui si ritira dal teatro rifiutando di entrare alla Comédie-Française, dove recitava suo marito, l’attore Pierre Lenoir de La Thorillière (Maupoint, Bibliothèque des théâtres, cit., p. 76; Campardon, Les Comédiens du roi de la Troupe italienne, cit., t. I, pp. 64-65).

[10] Angélique, nièce de M. Prudent: Angelica Toscano, dite Angélique ou Marinette (16?-?). In realtà nella commedia Angélique è presentata come la figlia: nel secondo atto Prudent dice di aspettare M. de Pommenville che viene a sposare la figlia, poi nella lettera il futuro sposo lo chiama « Monsieur mon beau-père », e nella battuta ch segue Prudent dice di andare a portare la notizia alla figlia (II.3.27-28). Più avanti, Pierrot, parlando ad Angélique, definisce Prudent come « votre père, un veillard casé […] » (II.5.8). Nel terzo atto, Angélique si riferisce a « suo padre » (III.5.30), il porteur dice a Prudent di portargli il suo gendre (III.7.5), mentre Arlequin travestito da M. de Pommenville rivolgendosi a Prudent si riferisce ad Angélique definendola sua figlia (III.7.9). Tuttavia resta una certa ambiguità in quanto tra Angélique e Colombine, moglie di Prudent, sembra piuttosto esistere una relazione di amicizia che non tra madre e figlia. Probabilmente perché Colombine è una seconda moglie giovane di Prudent.

[11] Léandre, Amant d’Angélique: Charles-Virgile Romagnesi de Belmont 7 maggio 1670 - 9 marzo 1731.

[12] Arlequin, Intriguant: Evaristo Gherardi (1689-1697). Su questo personaggio centrale della commedia rimando all’introduzione e alle osservazioni puntuali nel corso del commento dell’opera. Già prima del 1684 l’importanza dei ruoli all’interno della compagnia era stata modificata. Arlequin e Mezzetin formavano una nuova coppia che occupava una posizione sempre più centrale rispetto agli altri tipi. Il primo dirigeva e commentava l’intreccio, ed ecco che infatti viene qui definito intriguant; il secondo, suo complice, ornava attraverso la musica vocale o strumentale, le situazioni comiche spesso di un realismo fino ad allora sconosciuto.[12] Spesso usavano travestimenti.

[13] Mezzetin, Valet de Léandre: Angelo Battista Costantini (1654-1729). Iniziò la sua carriera parigina nel 1681, come sostituto di Domenico Biancolelli. Si adattò a rappresentare anche piccole parti. Nel 1683 (11 ottobre) si affermò nel ruolo di Mezzettin che interpretò per la prima volta nell’Arlequin protée di Fatouville. Personaggio «a metà strada tra il valletto e l’avventuriero, aveva la funzione di conduttore dell’intreccio e indossava un costume a strisce verdi e rosse, un ampio cappello cascante e non portava la maschera» (Cfr. Guardenti, Gli Italiani a Parigi, cit., p. 19). Alla morte dell’Arlequin Biancolelli, nel 1688, fu impiegato nel ruolo di Arlequin, malgrado il fatto che il pubblico avesse manifestato il desiderio di vederlo a viso scoperto, poichè la sua versatilità era molto apprezzata, era considerato una specie di Proteo. All’arrivo di Gherardi riprese a recitare il ruolo di Mezzettin a viso scoperto, fino alla chiusura del teatro nel 1697. Passò più di 20 anni in prigione, dal 1700 al 1727 (Cfr. Parfaict, Dictionnaire des théâtres, cit., vol. II, p. 146; Maupoint, Bibliothèque des théâtres, cit., p. 208; Antoine D’Origny, Annales du Théâtre Italien depuis son origine jusqu’à ce jour, Paris, Veuve Duchesne, 1788, t. I, pp. 20- 21).

[14] Pierrot, domestique de M. Prudent: Giuseppe Geratoni o Jératon (1639-?). Svolge il ruolo di servo tuttofare che si lamenta della sua condizione a causa del comportamento invadente dei padroni, verso i quali nelle sue battute esprime commenti ironici che puntano a un abbassamento comico. È anche portiere e postino (II.4.8).

[15] Dame Françoise, domestique de M. Prudent: probabilmente una doppia parte, di cui non sappiamo chi la recitò. Forse un servo, Pasquariel o Mezzetin.

[16] Pasquariel, Valet d’Octave: Giuseppe Tortoriti, dit Pasquariel ou Scaramouche le jeune (1685-1697), talvolta anche Capitan, e Scaramouche dopo la morte di Tiberio Fiorilli nel 1694. Spesso in associazione con Pierrot. Al suo posto troviamo Scaramouche nell’edizione spuria del 1697. L’attore è così descritto da Guellette che lo vide: «grand grimacier, sauteur et qui faisait tous les tours périlleux et d’échelle» (Ms. Opéra, I, f° 125, cit. in Moureau, Présence d’Arlequin, cit., p. 59). Era lo specialista delle acrobazie sceniche. A proposito delle scene che recitava, Gherardi osserva: «[...] je n’[en] ai mis que la teneur, parce qu’elles étaient ou toutes postiches, ou tout à fait Italiennes, c’est-à-dire toutes grimaces et toutes postures» (Avertissement ; Le Théâtre Italien, I, cit. [non paginato]). Nella scena II.5 è lui che porta la lettera di Léandre a Angélique, svolgendo le veci di servo fidato di Léandre, mentre è il servo di Octave e Mezzetin quello di Léandre, come risulta dalla lista degli attori.

[17] Colombine, Angélique e Léandre, stanno recandosi a un ballo in maschera. ¨ en Espagnolette: da ragazza spagnola.

[18] paye comptant... arrérages: Colombine utilizza qui la metafora economica-monetaria (usure, payer comptant, arrérages: usura, contanti, rendite), per riferirsi alla sua interruzione del dialogo amoroso tra Angélique e Léandre.

[19] fastidieux époux: qui Angélique si riferisce a Prudent come se non fosse suo padre. Tuttavia benché nella lista dei personaggi sia definita «nipote», in molti altri luoghi della commedia essa è chiaramente identificata come sua figlia. Angélique non sembra neppure figlia di Colombine, che molto probabilmente è una giovane seconda moglie di Prudent. Inoltre si rivolge a Colombine con un vezzeggiativo affettuoso, «ma petite», quindi piuttosto da amica.

[20] je le payerais pour dormir... Est-ce que je suis payée pour le bercer: continua la metafora economica per riferirsi alle relazioni di coppia, anche tra Colombine e Prudent.

[21] In questa scena Pierrot si lamenta del trattamento riservato ai servi. Situazione tipica e ricorrente nelle commedie della raccolta (in Colombine, femme vengée, 1689, di Fatouville, dove, chiamato con insistenza da Colombine per preparare la cena, Pierrot si lamenta di non avere mai «un quart d’heure en repos» (I.6), anche in Les Bains de la Porte Saint-Bernard (1696) di Boisfranc, Scaramouche viene svegliato bruscamente da Octave (I.2).

[22] Arlequin entra qui in scena, con un ingresso da ‘primadonna’ che evita ogni volgarità, e permette l’immediato riconoscimento del personaggio da parte del pubblico grazie all’assurdità della battuta di esordio, una considerazione sulla differenza tra il giorno e la notte che comprende una tautologia e la personificazione del sole (Guardenti, Gli Italiani a Parigi, cit., p. 147). Il suo modo di ragionare è fantasioso e paradossale, ricorre a un linguaggio figurato. Fin da questa scena possiamo notare l’evoluzione del personaggio recitato da Gherardi rispetto all’Arlequin Biancolelli (vedi introduzione).

[23] Arlequin parla in francese intercalando parole e frasi in italiano, probabilmente comprensibili al pubblico per ottenere un effetto comico.

[24] Il vostro sonno vi prepara momenti fortunati: Arlequin ha una certa consapevolezza delle differenze di ceto; qui si rivolge ai borghesi che dormono tranquillamente, riferendosi con ironia a Prudent che dorme mentre la moglie si diverte alle sue spalle; più avanti si lamenterà della condizione di servo (valet) (I.3.14).

[25] matou: gatto maschio, ma anche un uomo, in generale il marito: «Il faut à vieux matou jeune et tendre souris» (Dancourt, Sancho Pança, II.1). ¨ mou: scarti di carne e grasso che il macellaio vende per gli animali di compagnia, spesso i gatti. ¨ Ne vous mettez point martel en tête: martel forma antica di marteau, martello, quindi l’espressione significa: tormentarsi in modo ossessivo (Molière: «Je ne vois point encore, ou je suis une bête, / Sur quoi vous avez pu prendre martel en tête. / Lucile, à mon avis, vous montre assez d’amour»; Le Dépit amoureux, I.1). ¨ partisan: militare di un esercito irregolare; anticamente, colui che organizzava dei partiti o delle società per riscuotere alcune tasse («Quelque gros partisan m’achètera bien cher» (Jean De La Fontaine, Fable 3, Livre 5).

[26] Mezzetin era specializzato nei versi degli animali e nei travestimenti.

[27] cabaret: taverna, modesto locale dove si vende vino e si può anche mangiare.

[28] Sono enumerati una serie di giochi: toton: un gioco con una specie di dado con quattro lati con una lettera su ogni faccia (A, D, R, T) che si fa girare come una trottola: A = accipe (lat.) fa prendere un gettone, D = donne, fa dare un gettone, R = rien, niente, non si deve né prendere né dare, T = totum, il giocatore prende tutto. ¨ Quilles: birilli. ¨ Palet: piastrella, disco. ¨ Paume: il famoso gioco nel quale si lanciava una palla con una racchetta. ¨ Cheval fondu: gioco molto antico (se ne trova traccia nelle opere di Rabelais), nel quale dei ragazzi si arrampicano sulla schiena di altri compagni curvati e disposti in fila uno dietro l’altro, il primo appoggiato contro un muro. ¨ Trou-madame: gioco della Picardia, risalente al XVI secolo, in cui si devono far passare delle palline nei buchi di una tavola di legno. ¨ Pet en gueule: gioco tra soldati o ragazzi, nel quale due persone si abbracciano ma rovesciando i corpi, in modo che ognuno abbia la testa tra le cosce dell’altro. I due devono rovesciarsi a terra alternativamente su altri che sono a quattro zampe e quindi cambiare di volta in volta di posizione («Quoi! je n’ons pas joué ensemble à la madame, à la colin-maillard, à la pet-en-gueule!»; Dancourt, Le Mari retrouvé, sc. 11). ¨ Plaît-il maître: antico gioco che consiste in una serie di domande e risposte tra il giocatore e un «maître».

[29] Franchon, Margoton, Alison, Salisson, Cotillon, Louison, pour boire du bon, au petit Bourbon: deformazione di una serie di nomi di forma popolaresca: Margoton: da Margot, tradizionalmente utilizzato per indicare una donna chiacchierona e leggera; Salisson, termine popolare, da sale, sporco, donna sporca o serva (come souillon, come Cenerentola); Cotillon: gonnella da contadina, si usa nel senso di amare la gonnella, amare le donne facili («Et voilà pour t’avoir, Georgette, un cotillon», Molière, L’Ecole des femmes, IV.4; «Je veux que nous dansions ensemble le rigaudon, la chasse, les cotillons, la jalousie et toutes les autres danses nouvelles», Regnard, Le Légataire universel, sc. 8); Louison: nome di donna, diminutivo di Louis che risale al XVII secolo; in seguito, dal XVIII secolo, nome di uomo; petit Bourbon: riferimento all’antico palazzo costruito nel XIV secolo davanti al Louvre, che divenne la sala del teatro in cui recitò Molière dal 1658, in alternanza con gli attori della troupe di Tiberio Fiorilli); nel 1645, gli attori italiani vi misero in scena La finta pazza, prima opera, con musica e balletti, che anticipa il genere dell’opéra-ballet francese; quando venne demolita nel 1660, per permettere la costruzione della colonnata del Louvre, le compagnie si spostarono nella sala del Palais Royal.

[30] ratafia: liquore composto da acquavite, zucchero e succo di frutta, una sorta di kirsch apparso verso il 1675 molto apprezzato nella società mondana: «Chez lui [un directeur de femmes], sirops exquis, ratafias vantés, / confitures surtout, volent de tous côtés»; Boileau, Satire X).

[31] le décorum de notre charge: charge: incarico, mestiere; nel linguaggio popolare anche storia inverosimile, o ancora si dice «Il en a sa charge» di qualcuno che è sazio o ebbro; qui gioco di parole tra il mestiere di Mezzetin di venditore di acquavite e suo stato di ebrietà.

[32] accourez tous...: la prima canzone di Mezzetin che sarà seguita da un’altra alla fine della scena, e nella battuta seguente viene contraffatta da Arlequin che a sua volta si mette a cantare. ¨ Rossoli: rosolio. ¨ Fenouillette: acquavite distillata con semi di finocchio. ¨ Eau clairette (o anche eau de vie clairette): per molti secoli questo termine è stato usato per indicare dei composti ottenuti dalla distillazione da liquidi alcolici, e in particolare dal vino; secondo Furetière si tratta di un’acquavite nella quale si fanno macerare delle ciliegie con zucchero e altri ingredienti cotti al sole. ¨ Bourbon: whiskey americano invecchiato. ¨ Nella Foire Saint-Germain (III.4), i venditori di oublies circolavano per le strade verso mezzanotte, e i venditori di eau-de-vie dalle quattro del mattino (Le Théâtre italien, vol. II, Les comédies italiennes de J. F. Regnard, textes établis, présentés et annotés par Roger Guichemerre, Paris, Société des Textes Français Modernes, 1996, nota n. 11, al Divorce di Regnard, III.6, p. 90).

[33] se change en oublieux: si trasforma in venditore di oublies, dolcetti a forma rotonda, di cilindro, chiamati plaisir quando sono in forma di cornetto («Mais à condition qu’en son plus grand besoin on ne lui donnera que deux tranches de coing, douze cornets d’oublies et deux verres d’eau claire»; Dancourt, Sancho Pança, V.12). ¨ tuileaux: biscottini a base di farina, burro e bianco d’uovo, arrotolati a forma di tegola cilindrica (sinonimo quindi di oublies) e gioco di parola per assonanza con eau (eau-de-vie) e joie.

[34] jouer une main ou un pied d’oublies: giocare a carte [con] i biscotti (oublies); forse anche nel senso di mangiarne una grande quantità, poichè nel linguaggio popolare si dice anche «faire des pieds et de mains» nel senso di ‘fare tutto il possibile’.

[35] In questo primo lazzo Mezzetin tira i dadi e i biscotti (cornet), mentre Arlequin si alza e si abbassa al ritmo delle grida dell’amico «La vie, la vie». ¨ corbillon: piccolo cestino usato nei giochi di carte e di dadi pour deporre la posta del gioco. ¨ La scena si conclude (I.3.58-59), con il lazzo della farina, che Mezzettino lancia in faccia ad Arlequin mentre si sta mangiando i biscotti. Troviamo altri lazzi nelle scene seguenti come quello acrobatico di Pasquariel (I.6). Un altro lazzo è quello, nella scena II.1, in cui Mezzettino alterna il pianto col riso. Un lazzo si trova anche alla fine della commedia (III.8), nella quale Arlequin travestito da mago compie con la sua bacchetta magica, una serie di gesti buffi intorno al principe.

[36] Seconda canzone di Mezzetin che, come sopra, viene subito dopo imitata da Arlequin con la bocca piena di biscotti.

[37] I.3.58-59 il lui jette une poignée de farine: lazzo della farina, tipico di molti scenari della commedia dell’arte.

[38] Durante il ballo Colombine incontra il principe. Malgrado sia mascherata, questi le dichiara il suo amore. Anche se non può vederla, il piacere, la fiamma che lo divora, è nato dai suoi sguardi e dai suoi occhi nascosti dietro la maschera. Tutti i dialoghi si sviluppano intorno al tema del vedere/nascondere/intravedere.

[39] marmouset: piccola figura grottesca, con senso dispregiativo, giovane scioperato («Faut-il qu’un marmouset, un maudit étourneau....»; Molière, Sganarelle, ou Le Cocu imaginaire, 9).

[40] J’ai enfin découvert l’original du portrait: il principe intuisce ciò che gli verrà confermato nella scena I.11.25, vale a dire l’identità tra la donna raffigurata nel ritratto e quella che ha incontrato al ballo, cioè Colombine.

[41] C’est une scène toute italienne: il lazzo acrobatico di Pasquariel che fa delle capriole con un bicchiere senza versarne una goccia, nella scena «tutta italiana», cioè tutta lasciata all’improvvisazione.

[42] le tour de bâton: profitto illecito; l’espressione si basa su un gioco di parole tra «tono basso» (bas ton), in riferimento al segreto del profitto, e ‘bastone’, cioè la bacchetta dei giochi di magia. Qui c’è anche il riferimento alle bastonate che tradizionalmente ricevono i personaggi come Arlecchino e i servi.

[43] Je suis une pièce d’étoffe...: eufemismo, «stoffa non ancora srotolata», cioè ragazza vergine.

[44] I.7.18-19 Continua il gioco di parole con doppio senso, come sopra, la metafora della stoffa (la ragazza vergine) in vendita. ¨ Aune: antica unità di misura per misurare le stoffe. Proverbio: Les hommes ne se mesurent pas à l’aune (gli uomini non si misurano a braccia, cioè, dall’apparenza).

[45] figlia: calco da fille, ragazza.

[46] gibier: animale da preda, in senso figurato persona da seguire, catturare e imbrogliare; anche prostituta («Nous autres fourbes de la première classe, nous ne faisons que jouer, lorsque nous trouvons un gibier aussi facile que celui-là»; Molière, Monsieur de Pourceaugnac, II.4).

[47] Comportamento tipico del personaggio di Arlequin avido di cibo e di sesso: qui si vuole approfittare del conflitto tra gli amici per bere il doppio.

[48] vers la cantonade: nel suo Avertissement qu’il faut lire, Gherardi spiega questo termine «usités par les comédiens italiens», che significa «aile, coin, côté du théâtre». Quindi qui indica la direzione della voce di Angélique verso un lato del teatro. ¨ galon d’or: tessuto, striscia dorata. ¨ Plumets: piume di struzzo poste sui cappelli dei galants, significando questi personaggi per metonimia.

[49] Gonesse: comune francese situato vicino a Parigi, nell’Île de France.

[50] galefretiers: termine invecchiato che significa ‘buono a nulla’.

[51] par le sang bleu: all’origine si trova l’imprecazione par le sang (de) Dieu!, attestata nel XIV sec. Ma durante l’Ancien Régime (tra il XV e il XVIII secolo), quando la nobiltà e il clero erano all’apice del potere, questa imprecazione era blasfematoria. Quindi venne usata al suo posto Palsambleu, una deformazione accettabile (Molière utilizza par le sang bleu e par la sangbleu: «A-t-on jamais vu une telle furie de chanter? Par le sang bleu! J’enrage»; Molière, La Princesse d’Elide, Premier intermède, sc. 2).

[52] gasconnade: termine significante fanfaronata, vanteria, derivato dalla reputazione dei guasconi, abitanti dell’antica Guascogna, regione al sud-ovest della Francia, al confine con la Spagna. ¨ je vous donnerai de mon flambeau par le nez: Pasquariel minaccia Angélique di bruciarle il naso con la fiaccola che sta usando per fare luce.

[53] In questa scena il principe, con il ritratto di Colombine in mano, declama una poesia d’amore in alessandrini scritta per lei, nella quale realtà e illusione, giorno e notte, si confondono e si sovrappongono. Il ritratto permette una visione in assenza dell’oggetto amato, così come il sogno offre all’innamorato tante sue nuove rappresentazioni. Ma questo oggetto non è frutto solo di pura immaginazione, infatti la notte il principe l’ha passata al ballo con Colombine, e ciò che ha visto non era un sogno, ma la realtà: «Voir cet objet la nuit, le chercher tout le jour». Prudent sopraggiunge e si accorge che il soggetto del ritratto e dell’innamoramento del principe è proprio sua moglie. Viene allora colto da ‘vapori’ che riprendono per contrasto il vapore evocato dalla poesia, per descrivere ciò che resta delle menzogne, delle visioni notturne. Questa poesia sviluppa il tema cruciale del rapporto tra realtà e illusione, tema che percorre tutta la commedia, e viene rilanciato qui subito nella scena seguente, con l’arrivo di Arlecchino pittore.

[54] A questa scena è dedicata la prima raffigurazione relativa a quest’opera; si tratta dell’incisione di Franz Ertinger, che costituisce il frontespizio della commedia: in essa vediamo rappresentati Arlequin in veste di pittore che presenta al principe alcuni pannelli sui quali appare Colombine (Guardenti, Gli Italiani a Parigi, cit., vol. II, fig. 83, p. 149).

[55] Arlequin sfrutta la polisemia del termine originale per evocare la sua originalità come personaggio, quella della sua arte e delle opere realizzate in quanto pittore. La genealogia nella quale si inserisce fornisce un esempio dell’effetto retorico-stilistico (bathos) ottenuto tramite contrasto, grazie all’inserimento di un elemento triviale, in un enunciato serio (Spielmann, Le jeu de l’ordre et du chaos, cit., p. 323). Altri esempi più avanti (II.7).

[56] L’arc-en-ciel!: esempio di umorismo paradossale di Arlequin che confondendo realtà e illusione, immagine naturale e rappresentazione: sostiene di aver dipinto l’arcobaleno.

[57] Ancora un esempio di confusione tra realtà e finzione.

[58] Colombine paraît, avec un Cavalier à ses genoux: in questa didascalia non è specificato se si tratti o meno di un tableau vivant, mentre nell’edizione SupTI 1697 la didascalia specifica che si tratta di una figura dipinta tranne il viso, che è quello di Colombine (vedi nota Apparato).

[59] Il principe ha qui la conferma dell’identità tra la donna raffigurata nel ritratto e quella che appare sul paravento, cioè Colombine.

[60] (il déploie une autre feuille de paravent...): nell’edizione SupTI 1697 anche qui, come prima a proposito del paravento con Colombine, la didascalia spiega come veniva realizzata l’illusione scenicamente.

[61] quest’ultima illusione, con un paravento raffigurante un ladro che cerca di derubare Prudent, è assente da SupTI 1697.

[62] Questa scena, nella quale Pasquariel in compagnia di Arlequin e di Mezzetin lamenta la morte dell’unico taverniere di Parigi che gli faceva credito, doveva essere molto popolare, e ricorda alcuni elementi del repertorio precedente. Essa anticipa il tema della commedia successiva Le Tombeau de Maître André (29 gennaio 1695), dove viene ripresa diventando puro non sense: gli zanni litigano per una bottiglia, Scaramouche pensa di sposare la vedova di Maître André, e fa sposare Arlequin con la figlia, Colombine; dopo la lettura del testamento, il lutto finisce quando Maître André si sveglia, si siede e comincia a cantare: «Beviamo! Beviamo! Beviamo!». ¨ Il momento in cui, mentre Pasquariel e Mezzetin stanno piangendo, entra in scena Arlequin e si mette a piangere con loro, è l’oggetto di un’incisione di Gabriel Huquier (erroneamente intitolata Le Tombeau de Maître André) da un disegno di Claude Gillot intitolato Arlequin pleurant (Guardenti, Gli Italiani a Parigi, cit., fig. 107, p. 135 e pp. 150-151). Ci sono altre due immagini di un momento successivo quando Arlequin torna con tre mantelli e tre cappelli che distribuisce ai suoi amici. Si tratta del disegno di Gillot (fig. 130) e dell’incisione di Huquier (fig. 116), anch’esse erroneamente intitolate Le Tombeau de Maître André (Per il commento di queste immagini, cfr. ivi, pp. 152-157). Guardenti arriva alla conclusione che, malgrado l’assenza di documenti comprovanti l’effettiva conoscenza dell’attività dei comici della Comédie-Italienne da parte del disegnatore Gillot, queste immagini potrebbero comunque fornire indicazioni sulla recitazione dell’Arlequin Gherardi. In particolare, i disegni di Gillot confermano che ci troviamo davanti a «un Arlequin ingentilito rispetto a quello che compare nelle figurazioni probabilmente ispirate alla pratica scenica di Biancolelli. L’Arlequin di Gillot si lascia decisamente alle spalle il patrimonio spesso forzatamente grottesco dei suoi predecessori e sembra essere dunque alla base dell’immagine settecentesca e quindi ‘classica’ del personaggio». Insomma, grazie a queste figurazioni sceniche, secondo Guardenti «inizia a prendere corpo il mito dell’arte scenica di Evaristo Gherardi». In effetti, secondo Guardenti, questi risulta essere più garbato, sottile, le battute perdono la sconcezza, acquistano finezza e capacità di penetrazione (Guardenti, Gli Italiani a Parigi, cit., pp. 135 e 138-139).

[63] chante sur le ton du deuil d’Alceste: Alceste ou le triomphe d’Alcide è una tragedia in musica i cinque atti con prologo di Jean-Baptiste Lully (1632-1687) su un libretto di Philippe Quinault (1635-1688), rappresentata il 2 gennaio 1674 al teatro del Palais Royal; molto apprezzata dal re, ebbe un grandissimo successo, metre fu attaccata da Boileau e Racine; negli anni seguenti venne ripresa a Versailles, Fontainbleau (1677), St-Germain-en-Laye (1678), à Paris à l’Académie Royale de muisque e al teatro del Palais Royal (1682). théorbe: strumento a corde della famiglia del liuto, ma più grande.

[64] In tutta questa scena Colombine viene presentata come una donna di spirito, arguta e ironica. Ogni sua battuta mette per contrasto in evidenza la semplicità e debolezza di Prudent. Le proteste di questi, causate dalle assenze ripetute di Colombine, ricordano quelle di Sotinet verso la giovane moglie Isabelle nel Divorce (1688) di Regnard (II.2).

[65] C’est une pièce... trébuchante: gioco di parole con l’espressione «pièces sonnantes et trébuchantes» che significa, moneta metallica, nuova e autentica (troviamo questa espressione nel Quart livre di Rabelais, 1552, prol. 178). L’aggettivo trébuchant significa traballante; mentre il sostantivo, riferito alla moneta, indica il sovrappeso che veniva dato volontariamente alle monete per compensarne l’usura e che veniva misurato tramite il trébuchet, una piccola bilancia usata per pesare le monete (nel XIV sec.). Qui Colombine ricorre alla metafora della moneta, sfruttando i doppi sensi di trébuchant, per devalorizzare ancora una volta il marito paragonando il suo onore (ma anche la sua persona) a una moneta senza valore, malgrado sia trébuchant, sovrappeso e traballante.

[66] chasse-marées: imbarcazione per il trasporto del pesce, tipico della Bretagna. Secondo il dizionario dell’Accademia francese, il termine marée (marea), va usato al singolare: «L’Académie qui, au mot chasse-marée, ne dit rien du pluriel, écrit, dans un exemple au mot chasse, des chasse-marées. Il est bien plus naturel d’écrire des chasse-marée; car les chasse-marée chassent, c’est-à-dire mènent en hâte la marée bien plutôt que les marées; marée ne se disant pas en ce sens au pluriel» (Littré). ¨ magot: scimmia simile al macaco che vive in Africa del nord e a Gibilterra. Si usa per designare una persona molto brutta: «Il est laid comme un magot». Si trova nel dizionario dell’Accadémie Française dal 1694.

[67] vin de Côte Rôtie: vino molto apprezzato della regione del Rodano.

[68] vin de Côte Bouillie: Bouillie, alimento costituito da latte o di altro liquido e di farina bolliti. Si usa in senso figurato per significare che qualcosa ha perduto ogni consistenza qualcosa d’inutile («De la bouillie pour les chats»). Qui gioco di parole di Pierrot in riferimento al termine appena usato da Pasquariel, per scherzare sulla qualità del vino che ha appena offerto all’amico.

[69] jour de dépêche: giorno consacrato alla posta, nel quale Pierrot deve fungere da postino.

[70] suisse: termine usato tra il XVII e il XIX secolo per indicare un portiere di un palazzo, di una grande casa, che indossa una divisa simile a quella delle guardie svizzere, e in particolare dei pantaloni («chausses») la cui parte alta era cucita con delle pieghe. Qui si vogliono evocare le varie mansioni di Pierrot come domestico tuttofare: postino, portiere... Infatti come spiega subito dopo, Pierrot ha il compito di portare alla posta le lettere scritte da un segretario (commis). C’è inoltre un doppio senso, poiché il termine significa anche qualcuno che beve e fuma molto: «boire comme un suisse», «elles fumeront comme des Suisses» (Les Bains de la Porte Saint-Bernard, I.6). Inoltre gli svizzeri avevano la reputazione di essere brutali e feroci, irragionevoli, si diceva: «n’entendre pas plus raison qu’un Suisse».

[71] rétive: recalcitrante.

[72] gourmandiller: fare dei piccoli rimproveri. Probabilmente un neologismo a partire da gourmander (rimproverare molto severamente). Nei dizionari l’unica occorrenza attestata del termine deriva proprio da questo testo.

[73] un vent... couchant: riprende il detto «rouge au couchant, vent au levant».

[74] Siamo in presenza di un lazzo verbale, in particolare secondo la tecnica del liage, in base alla quale il discorso si sviluppa sulla variazione di un tema, qui la metafora del vento, fino all’assurdo (Spielmann, p. 322). ¨ Corbeil: località che si trova nel dipartimento dell’Essonne, a pochi chilometri a sud-est di Parigi, dove non c’è naturalmente il mare. ¨ Le vent d’aquilon: Aquilone, nome romano corrispondente al greco Borea, vento freddo e violento del nord. Figlio di Eos e di Astreo, abitava in una caverna della Tracia o, secondo alcune fonti, nell’isola di Eolia, dove Eolo, il re dei venti, lo teneva incatenato. Veniva rappresentato come cavallo o come un vecchio dai capelli bianchi in disordine.

[75] postillon: mentre il cocchiere conduce la carrozza con i cavalli, il postillon monta il cavallo.

[76] vers la cantonade: cfr. I.9.1.

[77] fressure: insieme delle viscere di un animale macellato: polmoni, cuore, timo, fegato e milza. Interiora consumate in forma di ragù, in padella o arrosto.

[78] altro esempio di bathos.

[79] qui pro cro: deformazione di quiproquo, equivoco.

[80] écho: ritroviamo quest’uso della voce come eco da parte di Arlequin anche in altre commedie come in Arlequin empereur de la lune (5 marzo 1684) di Fatouville, in cui Pierrot, sentendo alcune parole di Arlequin nascosto in fondo al teatro, le attribuisce al Dottore, osservando: «Et c’est vous, monsieur, qui parlez comme un écho» (I, p. 142); si potrebbe anche trattare di un commento a proposito della recitazione del Dottore poiché, nell’Avertissement qu’il faut lire al primo tomo, Gherardi utilizza l’immagine dell’eco per descrivere un tipo di recitazione opposta a quella degli Italiani: «On peut dire que ces sortes de comédiens sont comme des ècoliers, qui viennent répéter en tremblant une leçon qu’ils ont apprise avec soin: ou plutôt ils sont semblables aux échos, qui ne parleraient jamais si d’autres n’avaient parlé avent eux. Ce sont des comédiens de nom, mais inutiles et à charge à leur compagnie». Invece l’attore italiano recita ricorrendo all’immaginazione e sa combinare perfettamente il testo che ha imparato a memoria con l’azione, interagendo con i suoi interlocutori in scena: «Qui dit bon comédien italien dit un homme qui a du fonds, qui joue plus d’imagination que de mémoire; qui compose, en jouant, tout ce qu’il dit; qui sait seconder celui avec qui il se trouve sur le théâtre: c’est à dire qu’il marie si bien ses paroles et ses actions avec celles de son camarade qu’il entre sur le champ dans tout le jeu et dans tous les mouvements que l’autre lui demande, d’une manière à faire croire à tout le monde qu’ils étaient déjà concertés» (Gherardi, Avertissement, in Le Théâtre Italien, I, cit. [non paginato]). ¨ Un triomphe en amour perd beaucoup de sa gloire: gli alessandrini del principe ricordano quelli del Cid di Corneille: «A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire» (II.2).

[81] Bois, prés, fontaines, fleurs, vous aimeriez aussi: riferimento a Molière, La Princesse d’Elide (1664), Deuxième intermède, scène I: «Bois, prés, fontaines, fleurs, qui voyez mon teint blême, / Si vous ne le savez, je vous apprends que j’aime. / Philis est l’objet charmant / Qui tient mon cœur à l’attache, / Et je devins son amant / La voyant traire une vache. / Ses doigts tout pleins de lait, et plus blancs mille fois, / Pressaient les bouts du pis d’une grâce admirable. / Ouf! Cette idée est capable / De me réduire aux abois». Stereotipo pastorale della «conversazione con gli alberi e le rocce», illustrato tra l’altro in testi poetici come: Les Charmes de Félicie (1654) di Montauban, due ecloghe de Mlle Desjardins (1662), un idillio di Madame Deshoulières (1674).

[82] Quel prix dois-je espérer que ma Philis m’accorde: il nome Philis è tipico della poesia pastorale e galante (Benserade, Mlle Desjardins, Sercy).

[83] Farfadet: piccolo personaggio immaginario dei racconti popolari dotato di poteri fantastici, aggraziato, più dispettoso e malizioso che malevolo.

[84] triple hécate: dea degli inferi, così chiamata perché era al tempo stesso Diana sulla terra, la luna nel cielo e Proserpina dell’inferno.

[85] Ah, Magot vous-même: lazzo verbale costituito dal calco francese magot (scimmia) sulla parola italiana mago della battuta precedente di Pasquariel: Signor mago? (cfr. II.3.27). ¨ cruche: caraffa, ma anche in senso figurato persona stupida e ignorante; in quest’ultimo senso se ne trovano delle occorrenze in vari autori dell’epoca (Boileau, Lafontaine, Molière).

[86] muid: antica misura di capacità che variava a seconda delle province, in genere indicante un grande volume.

[87] aussi diable que vous êtes noir: riferimento al colore della maschera d’Arlequin e all’origine del personaggio, hellequin, un diavolo, nel folklore medievale francese.

[88] Médée, frère de Circé, [...], d’Armide et de la Jobin: figura di stile (bathos), qui ottenuta con una lista di maghe appartenenti alla tradizione mitologica, interrotta e conclusa con riferimenti all’attualità (oncle à la mode de Bretagne; la Jobin) (vedi altri esempi: II.7.44 e II.7.50). Con la Jobin, in particolare, Arlequin si riferisce alla Voisin, la famosa avvelenatrice, bruciata viva nel 1680, la cui fama era stata sfruttata da vari autori comici come Thomas Corneille e Donneau de Visé con La devineresse ou les Faux enchantements (19 novembre, 1679; Paris, Blageart, 1680), mutandone il nome appunto in Jobin; questa pièce à machines ebbe un enorme successo tra il 1679 e il 1680 con 47 repliche, e venne rappresentata fino al 1739, con un totale di 194 rappresentazioni (Lancaster, A History of French Dramatic Literature, cit., p. 917); ritroviamo echi di questo personaggio in varie altre commedie della raccolta, in Le Divorce (II.6) e La Déscente de Mezzetin aux enfers (sc. 1 e 2) di Regnard, per esempio. ¨ Médée: tragedia in musica di Thomas Corneille e Charpentier (1693). ¨ Circé: tragedia di Thomas Corneille e Donneau de Visé (1675). ¨ Urgande: tragedia di Louvart (1679). ¨ Armide: tragedia in musica di Quinault e Lully (1686).

[89] petits collets: ecclesiastico, uomo di chiesa, in riferimento ai colli stretti delle camicie che indossavano. Altro esempio della figura di stile qui sopra evocata (bathos).

[90] la baguette de Vulcain [...] comédiens italiens: riferimento alla commedia di Regnard et Dufresny, La baguette de Vulcain, messa in scena sul Théâtre-Italien (1693).

[91] Franc goyer: ruffiano.

[92] l’enclouure: la difficoltà.

[93] Pythie: Pizia, la sacerdotessa di Apollo, oracolo del santuario di Delfi.

[94] Et n’épouste ici ton casaquin: da épousseter, ‘spolverare’, ma anche ‘colpire’, ‘battere con un bastone’ («Oui-da, très volontiers, je l’épousterai bien»; Molière, L’Etourdi ou le Contretemps, IV.7).

[95] Godelureau: termine peggiorativo per designare un bellimbusto che corteggia le donne. ¨ manger son blé en herbe: letteralmente ‘mangiare il grano acerbo’, nel senso di essere imprevidenti.

[96] rognures: resti, scarti di stoffa. Si utilizza anche in senso figurato e familiare, per significare qualcosa che risulta dall’utilizzo di materiale di scarto.

[97] tailler: uso metonimico del verbo ‘tagliare’ ch,e invece che al vestito, Pierrot applica a chi lo indossa ottenendo un effetto comico.

[98] Verge: gioco di parole, riferimento all’organo sessuale maschile (ancora un esempio di bathos).

[99] quinze-vingts: ciechi; allusione comica all’ospedale dei Quinze-Vingts, ospedale fondato a Parigi da San Luigi per trecento non vedenti («Et que les Quinze-Vingts disent que je suis borgne»; Régnier, Satire V).

[100] ensellée (enseller: sellare): qui nel senso di arcuata. Si applica per riferirsi al dorso dei cavalli che recano la traccia della sella. ¨ corps de jupe: corsetto che con una gonna faceva parte del vestito femminile seicentesco molto caricato.

[101] Gourgandines: termine a doppio senso: un tipo di vestito alla moda nel 1694 che consiste in un corsetto che lascia intravedere la camicia; ma anche ‘donna leggera’, ‘prostituta’.

[102] par la jarnibleu: jarnidieu e jarnibleu, imprecazione che deriva da un’alterazione di je renie Dieu (rinnego Dio). Troviamo harnibieu nel XVI sec. Cfr. sopra I.9.19 per altre forme simili d’imprecazione.

[103] croquignole: doppio senso tra il significato di ‘biscotto’ (specialità molto antica della regione di Pithiviers fino alla seconda guerra mondiale; se ne trova la prima occorrenza nel 1532 nel romanzo di Rabelais), e ‘colpo’ («S’appliqua mainte croquignole, pocha ses yeux, mordit ses doigts»; Scarron, Virgile travesti, IV).

[104] lâche-lui un peu la mesure: termine di scherma, che significa indietreggiare davanti all’avversario.

[105] Tutta la scena è l’occasione per fare la satira del provinciale normanno, in questo caso M. Pommenville, futuro genero di Angélique.

[106] Lourdauds: goffo, impacciato nei movimenti; ma anche, sul piano psicologico, qualcuno cui manca finezza, acutezza nella percezione. Il termine appare dal XV secolo, nel senso di sot, stupide. Tra i sinonimi troviamo: balourd, lourd, pataud. ¨ un quartier de froment: un quarto, una quarta parte di una quantità totale. ¨ poulets d’Inde: anticamente usato per riferirsi ai pulcini del tacchino. Le Renard et les Poulets d’Inde è la diciottesima favola del libro XII delle Fables di Jean de La Fontaine (1693). ¨ repaissance: da repaître, ‘nutrire’, ‘nutrirsi’.

[107] que d’affecter de [...] pour une cuisine: cercare con cura, con esagerazione.

[108] Bats ta femme et ton blé: forma proverbiale che indica il comportamento violento dell’uomo nei confronti di sua moglie: battre= picchiare [la moglie], battre le blé: trebbiare.

[109] Maître Gonin: persona furba; termine usato nelle locuzioni popolari («Il faut en devinaille [pour deviner] être maître gonin»; Régnier, Satire 10).

[110] ne varietur: scherzo di Arlecchino, che utilizza il linguaggio giuridico del termine latino (usato per significare che un documento non può essere modificato) in difesa dell’onore di Colombine.

[111] cimeterre: scimitarra. Quest’arma orientale viene attribuita al principe forse nel desiderio di rafforzare l’esotismo del personaggio.

[112] bassinet: piccola parte di un’arma da fuoco nella quale s’inseriva la miccia: mettre la poudre dans le bassinet.

[113] tonne: botte di vino. Il personaggio mitologico era all’epoca al centro di varie opere teatrali, tra le quali la pastorale di Quinault, Les fêtes de l’amour et de Bacchus (1672), la commedia eroica di Donneau de Visé, Le mariage de Bacchus et d’Ariane (1672), dopo il successo della tragedia Amours de Venus et d’Adonis (1670). Secondo Parfaict, la commedia non ebbe successo e non andò oltre le quattro rappresentazioni (Histoire du Théâtre français, année 1685, t. III (ristampa Genève, Slatkine, 1967, p. 259); e tra gli inediti, Les travaux divertissants d’Arlequin Bacchus, «comédie accomodée au Théâtre italien» di Denis (Lancaster, A History of French Dramatic Literature, cit., p. 700). Può anche essere utile ricordare che nel 1651, anno in cui il giovane Louis XIV iniziava a impegnarsi nel balletto, venne rappresentato quello in cui appariva Arlequin, dal titolo Fêtes de Bacchus, del quale ci resta il libretto, la musica e una serie di disegni, con colori vivaci, che raffigurano la scenografia e il personaggio di Arlequin in posizione di danza (Mazouer, Le Théâtre d’Arlequin, cit., pp. 64, 67, 73).

[114] Cfr. Evariste Gherardi, Le Théâtre italien, I, éd. par Charles Mazouer, Paris, Klincksieck - Société des Textes Français Modernes, 1994, pp. 320-323.

[115] Su tutto questo aspetto cfr. l’analisi approfondita di Emanuele De Luca, Il Théâtre Italien (a cura) di Evaristo Gherardi, in Goldoni «avant la lettre»: esperienze teatrali pregoldoniane (1650-1750), a cura di Javier Gutiérrez Carou, Venezia, lineadacqua, 2015, pp. 135-145.

[116] Trascriviamo il testo dell’edizione del 1697 rispettando l’ortografia originale.